Un magazine féminin poussé vers le haut

Un magazine féminin poussé vers le haut
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Saviez-vous que les goélands posaient de réels problèmes au centre pénitentiaire pour femme de Rennes ? « La psychose s’est installée à l’été 2012. Des attaques se concentrent sur les uniformes bleus de la prison, au point de paralyser les déplacements à l’intérieur de la détention. Les auteurs de ces forfaits ? De charmants oiseaux au bec capable de casser des pierres. » L’article est signé Lady J, qui participe, comme une quinzaine d’autres détenues, à l’élaboration de Citad’elles, « le féminin sans barreaux ». « On ne voulait pas faire un « guide de la vie en prison » comme cela se fait souvent », rapporte Alain Faure, coordinateur de projets aux Etablissements Bollec – une association issue d’un collectif d’illustrateurs. Après avoir réalisé divers fanzines au sein de la prison pour hommes, le but était de « faire quelque chose de plus professionnel : on cite nos sources, on vérifie nos informations, on fait des recherches… Et on s’impose aussi une contrainte de temps ». Pari réussi : le rythme trimestriel a été tenu pour la parution des trois premiers numéros, et les articles et illustrations – entièrement réalisés par les détenues qui sont encadrées par les professionnels de l’association et de la Ligue de l’Education – offrent 40 pages de qualité.

Lady J, par exemple, est allée à la rencontre d’une codétenue pour en retirer cette anecdote illustrant son article : pour se venger des goélands qui lui avaient, la veille, volé son repas, celle-ci leur a tendu un piège en posant sur sa fenêtre de belles tartines de mayonnaise qu’elle avait fortement chargée en… piment, « pour les dégoûter à jamais ! » S’en suit un entretien avec un membre de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) qui donne un éclairage sur le comportement des goélands.

 

Permissions et blues du retour

Les articles de ce magazine féminin, entièrement réalisé au centre pénitentiaire pour femmes de Rennes, sont souvent à l’image de celui de Lady J : il est souvent question de prison, mais avec un regard peu commun, qui n’hésite pas à prendre une certaine distance avec l’univers carcéral. Regroupées au sein d’un comité de rédaction, ce sont les détenues elles-mêmes qui déterminent les sujets. « Elles abordent les thèmes qui leur tiennent à cœur, témoigne Alain Faure. On s’aperçoit que les sujets sont de plus en plus exigeants. A leur initiative, on va bientôt traiter de choses plus graves, comme les violences faites aux femmes. Cela montre qu’elles se sont totalement approprié le projet. » Le journal est diffusé gratuitement au sein de l’établissement de Rennes ainsi que dans les médiathèques des prisons pour femmes du grand Ouest*. Les lectrices peuvent y trouver des conseils de maquillage, des articles sur l’importance de prendre soin de soi en prison, des recettes de cuisine, des jeux etc. Mais aussi des débats et des enquêtes sur les permissions et le blues qui peut apparaître lors du retour en détention, sur la sexualité en prison, sur le fait d’être une mère en détention, sur les bénéfices du yoga…

La mise en page, particulièrement soignée, est là pour valoriser leur travail. Les membres de l’association Bollec qui travaillent avec elles ont ainsi pu constater qu’elles se montraient « de plus en plus à l’aise avec l’écriture et dans la prise de parole devant un groupe ». Le secret ? « On leur donne la possibilité de s’exprimer », explique Alain Faure. Le quatrième numéro, déjà bien avancé, devrait encore sortir à la date prévue. Du vrai travail de pros…

 

 

Au sommaire du dernier numéro de l’Age de Faire

RENCONTRE AVEC ZUMRA NURU
Cet Ethiopien a créé, sur des règles simples de partage et de respect, la communauté Awra Amba, souvent citée comme le Marinaleda africain.

 

LA PAROLE AUX PLANTES
Avec verve et ironie, le botaniste Francis Hallé dément la prétendue supériorité du règne animal sur le végétal. Passionant et décoiffant !

 

Dossier : PRISONS : UN AUTRE REGARD
Venues de l’intérieur et de l’extérieur, des idées pour rompre l’isolement des prisonniers et ouvrir des fenêtres vers une justice plus humaine.

 

LE PIANISTE ET LES VAGABONDS
A Nanterre, au Centre d’accueil et de soins hospitaliers, rencontre entre un musicien de jazz japonais et un public marqué par la précarité.

 

REPORTAGE : Des détenus en fin de peine réapprennent la liberté

La Ferme de Moyembrie, dans l’Aisne, accueille des détenus en fin de peine et les accompagne sur le chemin de la reconstruction, en leur offrant un « vrai » travail et une écoute dans un cadre familial.

• Climat : ça chauffe encore / Le maïs OGM définitivement interdit ?

• Nous avons tous besoin du Smic / La fin des cabines téléphoniques

• Eleveuses de cochon d’Inde au Pérou/ Des Indiens contre le plastique

• Antilles : les assos torpillent l’épandage aérien

• Lire, écouter, voir / Un festival pour les femmes / Spécial prison

• Précurseurs de la décroissance : Epicure ou l’économie du bonheur

• A Athènes, on cultive l’ancien aéroport / Le vélo en docucomédie

• Jean Bouteille, la petite entreprise du liquide en vrac

• Le Mans a plus d’une fête dans son parc

• Fiche pratique : en forme grâce aux huiles végétales

• Fiche pratique : fabriquer des pommades naturelles

• Histoires d’école : actions de terrain à Villefranche-de-Rouergue

• Forum des lecteurs / Agenda / Annonces

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Nicolas Berard

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