Relocalisation : « Court-circuiter », ça peut « super-marcher ! « 

 Relocalisation : « Court-circuiter », ça peut « super-marcher ! « 
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Comment fonctionne « Court-circuit en Pays de Brest » ?

Notre fonctionnement prend avant tout racine dans la distribution de produits sains, locaux, biologiques et de saison grâce au travail de nos 25 producteurs. Nous avons 230 familles bénévoles membres de notre association, et une personne permanente de l’association gère aussi toute la partie administrative. Le lien entre les producteurs, les produits proposés et les adhérents consommateurs est direct, car chacun met la main à la pâte. Les familles choisissent une taille de panier de légumes et le maraîcher remplit celui-ci avec des légumes de saison, ou d’autres produits comme des laitages, du pain, des jus… Tout le monde est alors sur un pied d’égalité, car tous sont consommateurs de ces produits locaux.

 
Qu’est-ce que signifie le mot « circuit-court » pour vous ?

C’est un partenariat de promiscuité dans lequel il y a peu d’intermédiaires. Une des premières notions est de raccourcir au maximum le chemin entre la production, la distribution et la consommation. Nous la complétons dans notre localisation au Pays de Brest : nous faisons nos recherches sur le territoire, nous observons les demandes et remontons l’information à la production en leur communiquant les besoins de chacun dans la gamme des produits de saisons. L’objectif final est de développer ce système de circuit court en créant des opportunités pour les personnes souhaitant s’installer en tant que producteurs.

 

Quels sont les moyens d’entretenir ces réseaux ?

Les adhérents qui viennent sont aussi bien consommateurs que producteurs. Nous organisons des visites d’exploitations et des rencontres avec des producteurs. L’idée est d’entretenir ces réseaux, car nous sommes tous des personnes qui réfléchissons, dans le but de promouvoir le modèle biologique et local. Nous voulons recréer des filières sur le territoire.

 

Pensez-vous que le mode de consommation locale peut s’étendre de manière globale ?

On le souhaite et on nous y encourage en ce sens, car il y a une véritable demande croissante avec un nombre d’adhérents toujours plus grand. Pour un mode de consommation locale, les freins des consommateurs sont psychologiques mais aussi financiers. Il y a une vraie volonté pour s’engager dans cette relocalisation et c’est pour cela que nous faisons un effort au niveau des prix de notre côté. Nos paysans sont d’ailleurs mieux rémunérés par rapport à des magasins spécialisés. Nous n’avons pas de stock et donc pas de besoin d’assurer une marge, de frais car notre fonctionnement est sur un montant de panier global. Une participation aux frais de fonctionnement de 25% sur le produit est versée à notre structure associative, à but non lucratif. Dans d’autres systèmes les marges commerciales sont en général comprises entre 40 et 50%.

 

La mise en place des circuits-courts peut-elle durer à terme ?
Si je prends notre exemple, nous avons démarré il y a un an et demi avec quelques paniers. Puis, deux personnes ont été embauchées en tant que chargés de mission. Une personne en service civique va aussi être prochainement recrutée.
En terme de projets, nous souhaitons l’agrandissement de nos champs d’action : remplir les points de distribution en passant de 250 à 400 paniers par semaine avec un objectif de 50 personnes par point de distribution. Les producteurs de notre réseau ont le potentiel pour nous approvisionner. Pour cela, nous misons sur l’augmentation de la communication. Il y a un potentiel à terme, et notre idée est clairement de bâtir un vrai modèle économique qui fonctionne. Nous reprenons le modèle d’Alterconso* à Lyon qui est viable économiquement et rencontre un fort taux de satisfaction.
 
Dans quel état d’esprit sont les personnes s’approvisionnant dans votre association lorsqu’ils viennent vous voir ?

La satisfaction générale des adhérents est au rendez-vous. L’ambiance est conviviale, les gens parlent entre eux et la fréquentation est intergénérationnelle. On voit les progressions, les changements d’états d’esprits, où chacun communique autour de lui : on entend souvent « j’en parle à tout mes amis » ! C’est très bon enfant. Il y a une réelle motivation et les gens sont de plus en plus réceptifs à ce mode de consommation.

 

Quelles sont les raisons pour lesquelles vous avez éprouvé le besoin de créer une alternative aux supermarchés ?
Les produits de supermarchés ne prennent pas en compte le coût environnemental et social de leurs modes de productions, que l’on pourrait chiffrer. Tout cela nous paraît primordial. Nous proposons un produit avec un vrai prix, un prix qui est réaliste et significatif.  Il y a une profonde volonté de transparence qui nous tient à cœur. Les conséquences de productions et les pourcentages affichés sont identiques dans tout les produits. Le consommateur n’est pas considéré comme une poule aux oeufs d’or, mais comme un membre adhérent. Que ce soit la confiture, le pain ou les légumes, le taux de participation est le même pour chaque produit. Nous souhaitons maintenir un maillage, et faire en sorte que les petits producteurs aient une place d’honneur. De cette façon nos actions ont un impact fort, autant au niveau local qu’environnemental, avec une offre de produits sains et intéressants remise au goût du jour.

 

Y a t-il des avantages à faire en sorte que l’argent reste sur le territoire breton ?

L’avantage principal est le lien direct avec la monnaie locale alternative Heol sur le pays de Brest, portée par l’ADESS du Pays de Brest. Cet argent qui circule sur le pays Brest n’est pas de l’argent épargné, et on sait pour quel projet porté il est investi.

Que répondriez-vous à une personne qui vous présente la relocalisation de l’économie comme un retour en arrière ?

Ma réponse serait : « Un retour en arrière par rapport à qui, à quoi et à quand ?» C’est un argument que donnent toutes les personnes qui ne veulent pas y croire, et ne croient pas à un mode économique alternatif. Dans les systèmes d’exploitations agricoles intensives ce sont des principes de fertilisation chimiques qui ont été appliqués. Ces utilisations d’engrais, d’insecticides et de pesticides se traduisent par un dopage des cultures où les sols s’épuisent, comme des sportifs trop stimulés par leur drogue : c’est ce mode d’exploitation qui n’est pas durable. De plus, il y a une véritable perte de connaissance et d’expérience dans ces pratiques. Dans notre structure nous sommes tous issus du milieu conventionnel dont nous avons été déçus, et aujourd’hui nous voulons nous battre pour une transition durable.

Cette transition est la remise au goût du jour des pratiques agricoles respectueuses de la connaissance de l’environnement.
Par exemple, plusieurs de nos maraîchers n’ont plus de tracteurs mais travaillent avec des ânes. Or, cette pratique c’est une pratique très technique, qui demande de l’expérience : il y a toute une dimension dans l’approche à l’animal, avec la prise en compte des itinéraires culturaux, des outils à utiliser, du rythme à prendre… Toutes ces pratiques s’enrichissent à partir de connaissances améliorées existantes depuis 50 à 100 ans. Il y a donc une conciliation authentique entre la modernisation et le progrès, vers de meilleurs pratiques toujours durables. Dans ces méthodes alternatives de travail, l’expérience et l
es liens ne se perdent pas…

 

En savoir plus  :
http://court-circuit-ess.infini.fr/

 

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Marion Moureau

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