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Du Pesto à l’ail des ours pour saluer le départ de Monsieur Winter !

Article réalisé avec le concours de Séverine Lafarge, naturopathe*

Pour concocter les deux recettes de pesto que nous vous proposons, les feuilles d’ail des ours ont été cueillies le long de deux petites rivières du Finistère : sur les bords du Camfrout (Pays de Landerneau-Daoulas) par Séverine, sur ceux du Douron (Pays de Morlaix) par Liliane, ma maman. Des cueillettes effectuées en une de ces journées ensoleillées de mars s’en venant, qui donnent furieusement envie de chanter avec Gilbert Bécaud : « Monsieur winter, monsieur winter, monsieur winter, go home!» * Cela ne nous rajeunit guère, mais à chacun.e sa madeleine de Proust ! L’histoire ne nous dit pas si l’hiver s’enfuit devant l’haleine chargée des amateur.e.s d’ail des ours…

Mais avant de découvrir ces deux délicieuses recettes, laissons Séverine nous en conter de bien belles sur l’ail des ours (allium ursinum), autrement connu sous le nom d’ail des bois ou ail à larges feuilles. Outre son savoir, elle s’est appuyée sur La flore forestière tome 1 Plaines et collines et l’encyclopédie libre Wikipédia.

Cette plante herbacée fait partie de la famille botanique des Amaryllidacées, appelée Bärlauch en allemand, aglio orsino en italien, bear’s garlic en anglais (ail des ours) et daslook (ail des blaireaux) en néerlandais, en référence à une légende selon laquelle, après l’hibernation, ces mammifères se mettent en quête de ces feuilles pour se purger.

Elle pousse de mars à juin ( la partie aérienne dessèche en juillet) sous l’ombre des forêts de feuillus aux bords des ruisseaux sur une terre riche en humus. Premières à apparaître les feuilles mesurent jusqu’à 5cm de large et présentent de larges nervures. La tige est anguleuse et présente 2 angles saillants nets. Les fleurs blanches sont réunies en ombelle présentent 6 pétales pointus.

Riche en vitamine C et huiles essentielles sulfurées, l’ail des ours présente des propriétés médicinales identiques à son cousin l’ail cultivé : dépurative, antiseptique, vermifuge, hypotenseur, hypolipémiant, hypoglycémiant.

L’ail des ours a été très utilisé en Europe et en Asie. On peut manger ses feuilles comme légume ou condiment, ainsi que son bulbe mais il est assez coriace, ses fruits jeunes ou ses graines piquantes. Malgré la puissance de leur odeur, leur saveur est délicate avec une note sucrée et agréablement piquante. Ses feuilles se consomment crues dans les salades, se préparent sous forme de pesto et soupe ou comme épice dans des salades, des tisanes. On peut également les cuire comme des épinards, les consommer sur des tartines avec du tofu ou encore dans du yaourt nature, laitier ou végétal. On en fait enfin un beurre assaisonné pour les grillades. Ses boutons floraux (d’avril à juin en France) sont également comestibles. Passé avril, quand les fleurs sont bien présentes, les feuilles deviennent plus amères sans pour autant être impropres à la consommation.

A ne pas confondre lors de votre cueillette avec le muguet (froissez bien les feuilles pour différencier olfactivement la feuille d’ail des ours), l’ail triquètre ou ail à 3 angles ( l’ail des ours ne présente que 2 angles sur la tige), ail naturalisé en Bretagne utilisé plutôt pour l’ornement, qui lui croît sur les talus et présente une feuille peu large. Cette confusion avec l’ail des ours n’est cependant pas dangereuse car l’ail triquètre est propre à la consommation mais moins parfumé que l’ail des ours.

Le pesto à l’ail des ours de Séverine

?180g de feuilles d’ail des ours

?Une poignée d’amandes ou de pignons de pin (environs 90g)

?100g de parmesan

?200ml d’huile olive ou /et colza

?une pincée de sel

On mixe le tout et le tour est joué, à déguster en tartinable ou sur un plat de pâtes.

Séverine rappelle au passage que c’est un excellent vermifuge, protecteur cardiovasculaire et qui « nettoie » le microbiote ….

Le pesto à l’ail des ours de Liliane

Ingrédients : feuilles d’ail des ours fraîchement cueillies – purée d’amande blanche – huile d’olive, soyu, vinaigre balsamique – cumin.

Hacher les feuilles puis incorporer les autres ingrédients et mixer ensuite jusqu’à obtention d’une crème verte onctueuse. Mettre en pot de verre conservé au frais ou congeler pour le plaisir de déguster votre pesto au beau milieu du prochain Monsieur Winter !

* « Mister Winter, Go Home » (Gilbert Bécaud – 1969) : https://www.youtube.com/watch?v=5BAJ8AyfVfU

*Séverine Lafarge, naturopathe : https://www.naturopathefinistere.com/

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A Morlaix, le Zéro déchet s’invite au micro des jeunes de Carré d’As

Réaliser de A à Z une première émission de radio (on apprend avec plaisir qu’il y en aura d’autres!) et faire découvrir des acteurs du territoire engagés dans une démarche « Zéro déchet » : un joli coup double que voilà pour les six jeunes volontaires actuellement en service civique au sein du dynamique Centre d’action sociale Carré d’As de Morlaix. Eco-Bretons les a suivis dans leur aventure radiophonique.

C’est avec grand sérieux professionnel et bonne humeur que Célia, Maéva, Dylan, Léa, Lucien et Sylvano se sont livrés à l’exercice, non sans trac, sous la houlette de Yann Lever, coordinateur et animateur de « Micros-Ondes & Crustacés », qui propose des ateliers radios à différents publics « pour encourager l’expression de tous, développer la confiance en soi, raconter et écouter des histoires. »

Minutieusement préparée par nos jeunes reporters-animateurs, l’émission a été enregistrée voilà deux semaines dans les locaux de Carré d’As, dans les conditions du direct. Entre les interviews de deux invités qui se sont succédés au micro, deux petits reportages instructifs auprès de celles et ceux qui pratiquent le Zéro déchet à Morlaix et alentours.

Le premier invité est Mathieu Cirou, co-créateur et co-animateur de l’association Le Repair, une recyclerie de matériaux de construction et d’équipement pour la maison qui a ouvert ses portes depuis cinq mois à Pleyber-Christ (1). Un mini-reportage nous conduit ensuite jusqu’à l’épicerie morlaisienne « Les Jeannettes » (2), face à la place Allende, où Pauline Remeur ne propose que du vrac, qui permet d’acheter la juste quantité au prix le plus juste tout en réduisant le gaspillage et la pollution. « Faire soi-même permet de réduire son budget mais nécessite une bonne organisation», précise-t-elle.

Camille Le Nan, la deuxième invitée, participe avec enthousiasme depuis plusieurs mois au défi « Famille Zéro déchet », initié et coordonné par Morlaix Communauté, avec de nombreux ateliers (3) proposés tout au long du parcours des familles volontaires pour se former sans jamais négliger le plaisir et la convivialité. Elle y voit beaucoup d’avantages : contribuer à la préservation de la planète, préserver sa santé, réduire son budget (jusqu’à 800 euros d’économies par an), nouer d’autres relations avec les commerces de proximité. Camille entend ainsi contribuer à la démocratisation du vrac pour qu’il devienne accessible au plus grand nombre de personnes.

Enfin, un second reportage présente « En vrac à l’Ouest » qui organise chaque semaine des ateliers Zéro déchet à Carré d’As, avec le témoignage d’une participante convertie au compost et aux produits ménagers faits maison.

L’émission est à écouter sur les ondes de Radio Nord Bretagne les 3 et 6 mars, à 14 h 15, et sur ce lien : https://soundcloud.com/user-538052928/carre-das-saison-3-emission-1

  1. https://www.eco-bretons.info/le-repair-ouvre-ses-portes-a-pleyber-christ-29/
  2. https://www.eco-bretons.info/jeannettes-epicerie-local-sans-dechet-morlaix/
  3. https://www.eco-bretons.info/defi-famille-zero-dechets-atelier-fabrication-de-creme-de-jour/



Accélérons les transitions en Bretagne : un appel à mobilisation générale

Dans une lettre ouverte aux élu.e.s du Conseil Régional et des intercommunalités de Bretagne, des acteurs associatifs FBNE/Fédération Bretagne Nature Environnement, Réseau Bretagne Solidaire, Agir pour le Climat-Bretagne, Réseau Cohérence appellent ces dernier.e.s à une mobilisation générale et à de nouvelles coopérations avec les acteurs des territoires, pour accélérer les transitions.

En cette fin d’année le Conseil Régional de Bretagne livre sa copie du budget 2021 et du fameux Sraddet (NDLR : schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire) sur lequel nos associations ont travaillé dans le processus BreizhCop depuis 4 ans. Ce schéma constituera le cadre de l’action des territoires en terme d’aménagement face au dérèglement climatique, à l’extinction de la biodiversité, à la reconquête de la qualité de nos ressources naturelles. Certes nous sommes déçus car nous espérions une rupture plus franche, avec de fortes règles actant notamment la fin à court terme de la consommation de foncier sur les terres arables et naturelles et sur des moyens importants donnés à la régénération écologique. Nous comprenons que la dynamique dépendra de la volonté des territoires, portée par les présidents d’intercommunalités que nous interpellons fortement aujourd’hui.

La pandémie a conforté l’incertitude sur l’avenir, percutant de plein fouet les bases de nos économies. Elle a aussi renforcé la prise de conscience de l’urgence des enjeux climatiques, environnementaux et démocratiques. Albert Einstein disait «la folie c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent». C’est le moment de réagir et d’enclencher un renouveau breton, sur d’autres bases. Les moyens des plans de relance et des budgets régionaux,nationaux et européens doivent servir la transformation de nos modèles et impliquer tous les acteurs des territoires.

En juin dernier, nous avons lancé un appel aux élus bretons: «Pour une Bretagne résiliente, solidaire et vivante face aux crises (1)». Cette tribune rassemble aujourd’hui 1278 personnes/structures dont 56 entreprises, 9 syndicats, 9 collectivités, 186 associations et portés par des personnalités qualifiées dont Nicolas Hulot, Gilles Boeuf et de nombreux chercheurs. Il demande de conditionner et d’orienter les financements de la relance pour répondre aux enjeux climatiques /écologiques et sociaux. Il offre aussi d’oser la coopération. Car si les transitions supposent une volonté politique forte, elles requièrent aussi une coopération renforcée entre tous les acteurs.La mobilisation doit être générale pour co-construire demain ensemble. Déjà de très nombreux acteurs économiques, qu’ils soient citoyens, entreprises, associations ou collectivités sont prêts à s’engager. Parmi les bases indispensables dans chaque territoire pour tracer l’avenir de la Bretagne:- Se fixer des objectifs et des plans d’action ambitieux inclus dans les «Pactes Région Territoire d’engagement dans les transitions» et dans les «Conventions Opérationnelles thématiques» comme dans le cadre des Contrats de Transition Ecologique (CTE), PCAET, PAT (Plans Alimentaires Territoriaux), Atlas de la Biodiversité, SCOT, PLUI, PLU, Parc Naturels Régionaux, Trame Verte et Bleue … dans une démarche partagée et concertée avec tous les acteurs.- Se mettre en accord avec les objectifs des accords de Paris, la Stratégie Nationale Bas Carbone II et les nouvelles ambitions européennes de réduction de 55% des Gaz à Effet de Serre à l’horizon 2030.- Promouvoir un grand plan d’installations agricoles basées sur l’agro-écologie et le bio, en respectant le lien au sol,optimisant les services écologiques de l’agriculture et créateur d’emplois.- Prolonger le développement des circuits courts en mettant fin à notre dépendance par rapport aux importations d’oléagineux en mettant en place des contrats de territoire avec les agriculteurs pour une culture locale..- Développer les projets d’énergies renouvelables locaux, sobres en carbone et utilisation des terres, basés sur l’autoconsommation et partagés entre collectivités, entreprises et citoyens.- Travailler en coopération renforcée avec les associations environnementales et de transition écologique et solidaire pour accélérer et optimiser la définition et la mise en œuvre des plans d’action Il est temps de tous se mobiliser, nous, partenaires associatifs, sommes vigilants et exigeant pour la réalisation de ces objectifs. Nous sommes prêts à de nouvelles coopérations avec les acteurs des territoires, pour accélérer les transitions!

(1) 1- Pour une Bretagne résiliente, solidaire et vivante face aux crises (fbne.bzh




Plabennec (29), Conférence-débat Jacques Caplat – L’agriculture bio pourra-t-elle nourrir le monde ?

Le 16 octobre 2020 à 18 h 30 min

Salle Marcel Bouguen
15 Rue du Penquer
29860 Plabennec

Face à la crise agricole, il n’est plus pertinent d’opposer agriculture et environnement. À partir de son expérience de terrain et d’un retour historique, Jacques Caplat*, agronome et anthropologue,  expliquera comment le modèle agricole actuel s’est élaboré puis fragilisé,et sur quelles bases il est possible de refonder l’agronomie : semences paysannes, cultures associées, valorisation de la main-d’œuvre, suppression des pesticides… Ces pratiques se révèlent non seulement très performantes à l’échelle mondiale, mais permettront en outre de réconcilier enfin l’agriculture avec l’environnement, la société et les territoires.

Cette conférence-débat se déroulera dans le respect des règles sanitaires, avec les masques obligatoires.

Les places sont limitées, n’oubliez pas de vous inscrire……. pour le 11 octobre en envoyant un email à : coquelicots@orange.fr

*Fils de paysan et agronome, Jacques Caplat a exercé comme conseiller agricole de terrain, d’abord en agriculture conventionnelle puis en agriculture biologique. Son parcours de conseiller l’a mené au Bénin, puis en France dans une Chambre d’Agriculture, et enfin dans un Groupement d’Agriculture Biologique. Il a été l’un des animateurs de la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique, où il coordonnait notamment les dossiers de politique agricole et des semences. Il fut pendant 4 ans l’animateur du « Groupe d’experts français sur les semences biologiques » et à ce titre l’un des représentants de la France sur le sujet auprès de l’Union européenne, et participa à la création du Réseau Semences Paysannes. Désormais également docteur en anthropologie sociale, il est aujourd’hui conférencier et consultant. Il est l’auteur de « L’agriculture biologique pour nourrir l’humanité » (Actes Sud, 2012), « Changeons d’agriculture – Réussir la transition » (Actes Sud, 2014) et co-auteur avec Pierre Rabhi de »L’agroécologie, une éthique de vie » (Actes Sud, 2015). À titre bénévole, il est secrétaire général de l’association Agir Pour l’Environnement. »




JARDINS DE L’IMAGINAIRE – ÉTATs D’ESPRITs L’expérience photographique sensorielle et sensible de leur lieu par des écoliers du Cloître Saint-Thégonnec

Dans un récent article, nous vous présentions le travail mené il y a quelques mois par le photographe morlaisien Gérard Rouxel, en résidence à l’école publique Cragou-Monts d’Arrée sur la commune du Cloître-Saint-Thégonnec, afin d’initier les élèves du CP au CM2 à sa pratique artistique en croisant son propre projet avec celui des enfants.

Gérard Rouxel joue avec l’imaginaire que le site de l’Abbaye du Relec peut dégager, appréhendant l’esprit du lieu par des assemblages numériques de photographies, prises à différents moments de l’année. Son travail photographique a été mené d’octobre 2019 à mars 2020 (il devait se poursuivre jusqu’en mai… un virus en a décidé autrement) sur l’ensemble du lieu. Parallèlement les enfants de l’école du Cragou du Cloître-Saint-Thégonnec ont réalisé avec lui un «portrait imaginaire» de leur commune, pendant la même période.

Récit de cette expérience singulière avec les mots de l’artiste qui a accompagné les élèves dans leur démarche créative, les laissant choisir ou être choisi par les lieux.

La résidence avec l’école du Cragou au Cloître-Saint-Thégonnec a permis aux enfants et à la communauté éducative, sur une période de six mois, de participer à une expérience de création photographique personnelle et collective en lien avec des lieux de la commune, où il fallait mener de front un projet artistique (sensibilité du regard, approche et représentation du paysage, rapport à la nature…) et technique (prise de vue, assemblage sur ordinateur, montage de l’exposition).

Le photographe a accompagné cette mise en relation des enfants avec la et leur nature, ces rencontres entre ÉTATs D’ESPRITs photographié/ photographiant, en les compilant, comme dans un dialogue.

Par groupe de quatre ou cinq, les enfants ont choisi de façon collective un lieu, un espace de la commune qui «leur parle» et qui permet de venir le voir et le prendre en photo chaque premier mardi du mois, quelles que soient les conditions climatiques. Le seul moyen d’expression est l’écriture photographique (photographier : écrire avec la lumière), elle permet de raconter une histoire de rencontre entre un être humain et un lieu. Une écriture servant à transmettre l’expérience. Chaque photographie de chaque enfant est ensuite assemblée par ordinateur et représente ainsi «la vision» de chaque groupe sur le lieu choisi. Les enfants en prenant la photographie se mettent en relation avec leurs cinq sens (voir, écouter, sentir, goûter, toucher). Une présence, une conscience, un respect est ainsi établi entre êtres humains et ensemble du lieu.

Ce qui est montré ici, est l’assemblage de toutes les photographies prises groupe par groupe chaque mardi (il manque évidemment la prise de vue du mois d’avril), laissant place à l’imaginaire du visiteur. Les enfants invitent les visiteurs à s’immerger dans leurs images. Les regarder, y écouter le chant de l’oiseau, ressentir le goût du nombril de Vénus, sentir l’odeur de la terre que vous touchez avec vos mains. Vous verrez que l’on redevient vite un enfant.

«Mon groupe et moi, nous avons choisi un ruisseau. Il est magnifique. L’eau est transparente et j’aime bien l’écouter couler. Il y a ce sable en dessous avec des reflets. Ça donne l’impression qu’il y a plein d’or dedans. Au-dessus du ruisseau, il y a un arbre perché et il y a de la mousse dessus. Elle est humide, elle sent bon et ça lui donne sa splendeur. Ce qui rend cet endroit majestueux aussi, c’est ses branches toutes fines qui tombent en plein milieu de l’endroit. Sur le chemin qui mène au ruisseau, il y a comme des cordes de lierre qui tombent. Cet endroit est majestueux et marcher dans les feuilles est agréable. En gros, c’est superbe !!!» L…

«On a choisi notre lieu. C’est la rivière. On a utilisé deux sens : la vue et l’ouïe. On a entendu des voitures au loin et les oiseaux. On a vu les feuilles tomber. Elles faisaient des galipettes, tournaient et tombaient dans l’eau. J’ai vu que l’eau était plus haute que la dernière fois. On a pris des photos.

Quand j’ai appuyé sur le bouton… j’ai senti comme un clic à l’intérieur de mon cerveau. J’ai senti plein de sensations dans mon corps.» L…

C’est une expérience extraordinaire pour un auteur photographe de partager un processus de création en cours, de faire voler en éclats ses doutes en voyant les enfants s’immerger totalement dans ce projet. Merci à eux et à l’équipe pédagogique qui a largement contribué à la réussite de cette résidence, malgré l’arrivée de l’inattendu virus. Merci à toute l’équipe de l’Abbaye du Relec d’avoir mis en relation ce lieu culturel départemental, des enfants d’une école publique primaire élémentaire d’un territoire rural et un projet régional de création artistique.

L’exposition de leur travail et de celui de Gérard Rouxel est à voir dans le jardin potager de l’abbaye jusqu’au 31 octobre prochain.




JARDINS DE L’IMAGINAIRE – ÉTATs D’ESPRITs. Dialogue artistique entre un lieu et la photographie

Le photographe morlaisien Gérard Rouxel était au début de cette année en résidence* à l’école publique Cragou-Monts d’Arrée sur la commune du Cloître-Saint-Thégonnec, afin d’initier les élèves du CP au CM2 à sa pratique artistique, en croisant son propre projet artistique avec celui des enfants. Gérard Rouxel, joue avec l’imaginaire que le site de l’Abbaye du Relec peut dégager, il appréhende l’esprit du lieu, par des assemblages numériques de photographies, prises à différents moments de l’année. Les écoliers quant à eux font le portrait imaginaire de leur commune. Subventionné par la DRAC, ce projet donne lieu à une exposition du photographe et des écoliers visible jusqu’au 31 octobre dans le potager de l’Abbaye du Relec, l’un des magnifiques sites de Chemins du Patrimoine en Finistère.

Nous ouvrons nos colonnes en deux temps : aujourd’hui avec les mots du photographe et ceux du paysagiste Gilles Clément qu’il convoque pour présenter son propre travail. Celui des enfants le sera dans un second article à venir tout prochainement.

C’est un processus créatif et une écriture qui s’est imposée sur le lieu de l’abbaye. Une question est arrivée, assez simple et en même temps redoutable « Une écriture photographique peut-elle traduire un dialogue entre un lieu et un photographe ? ». La réponse est arrivée juste après la question ou, peut-être, juste avant.

Bien que la question soit assez précise, ce qui se joue là est beaucoup plus vaste, sûrement plus complexe aussi. Dialoguer avec un lieu, demande de le faire avec l’ensemble des éléments présents, tous les éléments, y compris celui ou ceux que l’on ne voit pas : l’esprit ou/et les esprits du lieu. Il y est question de dialogues, d’échanges entre des êtres et des esprits.
Entamer ce dialogue peu habituel, de vivant à vivant, de matière à matière, d’espace à espace, en reliant tout avec tout. Comment capter sans enfermer, demander la permission, se faire accepter, garder sa place, chacun la sienne ? Être à l’écoute ou converser avec l’esprit des arbres, celui des êtres humains, de l’eau, du vent, des pierres, du héron, du potager, des voix d’Arrée Voce, de la ligne de crête juste au-dessus…
Se laisser embarquer par ces esprits qui font l’esprit du lieu. Être vraiment là, présent, car ils sont joueurs. Sans oublier l’esprit de Chronos, du temps, du temps qui passe ou qui s’éternise. Regarder le temps prendre sa place à chaque instant, instant après instant. Instants collés en transparence les uns avec les autres, créant un autre temps, une autre existence du temps, comme on regarde un nuage, pfttt…, déjà transformé.
Cette écriture ne traduit pas, ne montre pas. Elle transmet sans comprendre, comme un chaos brut de création, comme une expérience de liberté laissée au lecteur de recevoir, ou pas, son envie ou besoin de voir… pour voir.

Claire Prijac, directrice du site de l’Abbaye du Relec et Gérard Rouxel
devant deux de ses tirages photographiques.
Photo : Laurence Mermet

« Le paysage renvoie chacune de ses perspectives aux perspectives intérieures de celui qui le contemple. Le jardin est la démonstration d’une pensée. Le paysage, symptôme culturel, création de l’esprit, ne sera rien sans une image qui lui soit propre, atteinte et gagnée à travers le corps : le jardin. Tout homme, assujetti à sa propre cosmogonie, porte en lui-même un jardin qui traduit le paysage et, au second plan, l’univers entier. Le fait que dans un lieu de culture, contrôlé et circonscrit, cohabitent le visible et l’invisible, oblige à considérer ce lieu, le jardin, comme le territoire spécifique de l’âme où l’artifice, quels que soient les capacités et les résultats, se met au service des visions les plus lointaines. D’où l’impossibilité de réduire ce lieu à des limites physiques. La corrélation entre paysage et jardin nait quand l’homme prend conscience de son propre environnement et trouve les mots pour le définir ». Gilles Clément, les caractéristiques du jardin planétaire.

*Une « résidence d’artiste » désigne l’octroi pour un artiste d’une aide à la création artistique tant financière que logistique sur une durée et un projet donné. Une résidence est soumise à un cahier des charges strict impliquant que 70% du temps de présence de l’artiste soit dévolu à sa création sur le lieu ou le territoire d’accueil et employer 30% à des actions de médiation.
Ici, la structure d’accueil est Chemins du Patrimoine en Finistère (dont l’Abbaye du Relec est un des cinq sites). Le travail photographique de Gérard Rouxel a été mené d’Octobre 2019 à mars 2020 (il devait continuer jusqu’en mai, un virus en a décidé autrement) sur l’ensemble du lieu. Parallèlement les enfants de l’école du Cragou du Cloître-Saint-Thégonnec ont réalisé un «portrait imaginaire» de leur commune, pendant la même période. L’artiste a accompagné les élèves dans leur démarche créative, les laissant choisir ou être choisi par les lieux. L’exposition de leur travail est à voir dans le jardin potager de l’abbaye.

Gérard Rouxel a créé un catalogue de cette exposition, en vente à la boutique de l’Abbaye du Relec. Format 20×20 cm, 36 pages en double et 4 pages de couverture. 22€