Cohérence : « Il ne peut y avoir de transition écologique sans participation citoyenne »

Cohérence, créée en 1998, est un réseau d’associations (de consommateurs, de paysans, de défenseurs de l’environnement), qui dès sa naissance s’est emparé des questions agricoles, puis au fil des ans a étendu son champ d’intervention à la transition écologique dans son ensemble. L’association travaille aussi autour de la participation citoyenne dans la transition écologique, en développant des outils spécifiques. A l’occasion de la redéfinition de son projet associatif, coup de projecteur sur cette association pionnière et référence dans le milieu associatif breton, avec l’interview croisée de Julian Pondaven, son directeur, Maëlla Sourivong et François Baron, respectivement co-présidente et co-président de Cohérence.

Comment l’association Cohérence a-t-elle été créée ? Et comment a-t-elle évoluée ?

Julian Pondaven : Cohérence a été créé en janvier 1998. La première assemblée générale s’est déroulée à Rennes, avec dès le départ une trentaine d’associations de consommateurs, de défenseurs de l’environnement, et des paysans. Des grandes structures, régionales, mais pas seulement, réunies autour du premier slogan de Cohérence qui était « l’agriculture, c’est l’affaire de tous ». Il y avait la volonté de créer une alliance de paysans, de consommateurs et de défenseurs de l’environnement pour une eau pure, par le biais d’une agriculture durable. C’est d’ailleurs l’un des premiers piliers de la philosophie de Cohérence : dire qu’on peut avoir des natures associatives différentes, mais pour autant être convaincus ensemble qu’une agriculture durable, donc autonome et économe, respectueuse de l’environnement, créatrice d’emplois, aménageuse du territoire, permettra de reconquérir la qualité de l’eau, de fournir des produits de qualité aux consommateurs, et sera rémunératrice pour les paysans.

Le deuxième constat était de se dire que l’union fait la force, on a besoin de travailler ensemble, tirer dans le même sens. Et on a besoin d’un réseau qui promeut des alternatives, puisqu’à l’époque on était déjà dans des luttes contre des projets de porcheries industrielles ou autres. Mais les fondateurs de Cohérence, comme Jean-Claude Pierre par exemple, voulaient un réseau qui promouvait les alternatives agricoles et alimentaires, pour compléter les luttes.

François Baron : C’était aussi un changement de posture, Cohérence n’était plus seulement dans le rôle de contestataire et défenseur, et faisait désormais des propositions. L’idée était de mettre aussi sur la table les perspectives. Il fallait se positionner sur l’avenir.

Comment est-on arrivé au nouveau projet associatif ?

François Baron : Cohérence avait été créée pour être force de proposition et de représentation. Mais progressivement chaque structure s’est un peu autonomisée. Ce qu’on pouvait leur proposer en termes d’outils, de fonctionnement, de savoirs, devenait plus faciles à acquérir par internet par exemple. Ce changement a été sensible et nous a obligé à évoluer différemment.

Julian Pondaven : Dans la nature des adhérents il y a eu cette modification. Les associations évoluent, elles ont une durée de vie, un cycle . On est passés d’associations rurales de défense de l’eau à des adhérents plus urbains, qui travaillent sur les transitions en général. Cohérence a aussi élargi son domaine d’intervention, puisqu’on est passé de l’eau et l’agriculture à l’ensemble de ce qu’on appelait à l’époque « le développement durable » et qu’on nomme maintenant « la transition écologique et solidaire ». Solidaire, parce qu’il ne faut laisser personne sur le bord de la route. La transition écologique c’est ici, maintenant, mais c’est aussi là-bas, à l’autre bout de la planète, et pour les générations futures. Mais c’est vrai que quand Cohérence a élargi son spectre d’intervention à la sensibilisation, la pédagogie, l’habitat, les huitres, et la participation citoyenne…il a fallu à un moment « rerésumer » qui on était. On était connus, mais les gens ne savaient plus vraiment pourquoi on était là, et où nous trouver. Le fait de réécrire le projet associatif nous a permis de redéfinir notre identité, de mettre des mots sur une évolution naturelle qui s’était faite avec le temps. Quand on disait « l’agriculture c’est l’affaire de tous », on avait déjà un pied dans la participation citoyenne. Mais là on a décidé de l’affirmer encore plus.

Quels sont les grands axes du projet associatif actuel ?

Maëlla Sourivong : Nous avons redéfini nos valeurs, nos missions, notre vision : la coopération, l’engagement citoyen, la solidarité, la sobriété. C’est ce qui nous porte, ce à quoi on tient. Sans oublier notre appartenance au vivant. Pour nous c’était important d’avoir ce lien, de ne pas oublier le reste du monde vivant, de ne pas se focaliser que sur l’homme. Redéfinir ces valeurs nous a permis de repréciser nos missions : d’une part, porter le récit de notre appartenance au vivant, c’est -à-dire exprimer comment avoir un discours différent de celui de la société consumériste et productiviste. Et comment en développant ce récit on arrive à proposer un futur, un imaginaire différent au grand public et à tous nos partenaires.

La deuxième mission est de créer et valoriser des outils, toujours dans un esprit coopératif. Depuis le départ, Cohérence, Julian, et les différentes personnes qui ont composées l’équipe ont créé des outils d’animation, d’analyse, qui permettent un travail autour du développement durable, de la transition ou de la participation citoyenne. Ces outils, on les créés dans l’optique qu’ils puissent être appropriés par d’autres, et puissent être utilisés sans notre intervention.

Notre troisième mission est la mise en mouvement de tous les citoyens et citoyennes, et d’être un espace de médiation. Là encore, on se voit comme un facilitateur d’échanges, entre différents acteurs de la société, que ça soit les collectivités, les associations, les entreprises, les habitants. Et comment faire en sorte qu’ils puissent agir de façon efficace, ensemble, et sur des sujets de transition.

L’objet maintenant de Cohérence est d’être ce facilitateur sur l’engagement citoyen, la participation citoyenne, sur tous les sujets qui touchent les transitions écologique et solidaires.

François Baron : Nous sommes aussi convaincus qu’il ne peut y avoir de véritable transition écologique sans participation citoyenne. L’un ne va pas sans l’autre. On œuvre sur ces deux versants car on se rend compte que beaucoup d’acteurs aujourd’hui, en particulier les acteurs politiques et économiques, ne prennent pas en compte l’aspect « participation » et vont focaliser sur du techno-solutionnisme etc…qui risque d’être rejeté par une partie de la population. Notre cheval de bataille est vraiment la participation citoyenne et la transition écologique « en même temps ».

Au fil des années, avez-vous vu des thématiques émerger, ou au contraire d’autres délaissées, par les citoyens en Bretagne ?

Julian Pondaven : Quand Cohérence a démarré, il y avait au cœur du réseau les questions agricoles, peu celles alimentaires finalement. A l’époque, il n’y avait pas beaucoup d’outils pour intervenir sur ces questions. Il y avait en revanche la question de la réforme de la PAC, sujet sur lequel on a passé pas mal de temps à Cohérence, parce que la PAC est réformée tous les 4-5 ans. Nous avons beaucoup travaillé là-dessus, avec la difficulté de s’opposer à un mastodonte, qui est piloté au mieux à Paris, et en fait plus vraisemblablement à Bruxelles. C’était un sujet vraiment important à l’époque, porté par certains administrateurs qui étaient du milieu agricole. En 24 ans à Cohérence, quand je fais le bilan sur le volet agricole, je constate qu’il n’y a pas grand-chose qui a changé. On a vu une concentration des fermes, la disparition des petites exploitations…Par contre, le bio est monté en puissance, a évolué, s’est structuré, s’est organisé. Sur la question des pratiques, l’utilisation des phytos, la présence des algues vertes, sont des thématiques toujours prégnantes. La visibilité des algues vertes a été une façon de faire un focus sur une pollution qu’on ne voyait pas. Quand il y a plus de 50 mg de nitrates par litre d’eau dans la rivière, personne ne le voit.

Sur le volet alimentaire cependant, en 25 ans, on a vu les citoyens s’en emparer, avec l’émergence des Amap, de Terres de Liens…Maintenant on voit les PAT (Projets Alimentaires Territoriaux) qui commencent à prendre une place de plus en plus importante dans les collectivités. Celles-ci, et les citoyens, se sont dit que l’alimentation étaient un vrai sujet. Autant avec la réforme de la PAC, dès qu’on parlait du premier ou deuxième pilier des aides environnementales, on perdait tout le monde, autant l’alimentation est un sujet qui parle à tous. Tout le monde mange et tout le monde peut se projeter sur ce sujet. Désormais, l’émergence de la Sécurité Sociale de l’Alimentation en est la continuité. Les citoyens ont encore beaucoup de mal à s’emparer de la forteresse agricole parce que c’est très technique, très corporatiste.

Nous avons vu également la progression dans les réseaux de la question de la mobilité, avec le vélo, la question de l’habitat, de l’économie sociale et solidaire, de la participation citoyenne. Les champs d’investigation, d’engagement, se sont démultipliés. Les citoyens montent en compétences, sur des sujets assez techniques, se forment, et mettent les mains dans des dossiers de plus en plus compliqués.

François Baron : C’est aussi le fruit d’une tendance générale qui veut remettre le citoyen un peu au centre du débat politique. Il y a encore quelques années on le mettait en dehors, en lui disant « ne vous occupez pas de ça, on va laisser la place aux experts ou aux élus ». Mais aujourd’hui, face aux dommages et à la crise climatique, les citoyens se disent qu’ils ont aussi peut-être leur mot à dire. Il y a une transformation de la société civile qui est encore trop lente, trop timide. Nous, on essaie aussi de pousser pour que les gens agissent et s’emparent des sujets qui les concernent. Et surtout qui concerne les générations futures, qui ne sont pas écoutées, et sont totalement absentes du débat politique. Aujourd’hui la politique en règle générale est faite par un homme blanc de plus de 50 ans, qui ne prend pas beaucoup en compte tous ces aspects-là.

Quels sont les grands projets de Cohérence pour fin 2024 et 2025 ?

Julian Pondaven : Hormis le projet de Sécurité Sociale de l’Alimentation, nous accompagnons un groupe d’habitants de communes du Pays de Lorient, à Guidel et Quéven, pour voir comment ils peuvent réduire leur impact sur l’environnement, tout en travaillant leur bonheur. Comment on peut les rendre aussi heureux, voir plus, mais avec moins ? Le tout en suivant l’adage « Moins de biens, plus de liens ». L’accompagnement va durer jusqu’en début 2025. L’idée, c’est qu’ensuite les habitants portent un message auprès de l’agglomération et fassent des propositions d’aménagement pour faciliter le passage à la transition.

On a aussi le projet de redévelopper le réseau des Repair Cafés en Bretagne, avec une première mission pour des volontaires en service civique.

Nous travaillons également toujours sur la biodiversité. On va sortir 5 épisodes de podcasts, issus d’une action avec la commune de Laillé (35) qui s’est déroulée durant 3 ans. Les podcasts vont évoquer l’histoire des habitants et certains lieux de la commune, à travers leurs liens à la nature.

Parmi les autres projets, on peut citer aussi des conventions citoyennes locales, pour que les citoyens puissent émettre des avis sur des sujets sur lesquels les élus ont du mal à trancher. On organise une série de webinaires cet automne, avec des intervenants des territoires où elles ont été mises en place.

François Baron : Il y a aussi la Cop Bretagne, qui a été actionnée au niveau national par le gouvernement, qui souhaite mettre en place une planification écologique au niveau régional. Elle a été présentée au mois d’avril, à Rennes. Suite à cette présentation, nous nous sommes rendu compte que le monde associatif et la société civile étaient mis à l’écart, on était en périphérie du dispositif. Alors que pour nous, la transition écologique est justement une chose sur laquelle on travaille et on est acteur depuis de nombreuses années. Modestement, on pense qu’on a quand même des choses à dire, surtout dans le sens où il faut changer, renverser la table. Aujourd’hui, on a l’impression que les gros organismes et l’Etat en particulier, vont répliquer encore des méthodes de travail qui ont donné satisfaction mais qui ont aussi produits des effets contre lesquels on veut lutter. Pour nous, il faut changer vraiment ces données-là. Avec le Mouvement Associatif de Bretagne, la Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire, et FNE-Bretagne, on essaie de se faire entendre auprès de la Préfecture de Région pour que l’on soit réellement intégré en tant qu’acteurs, au même titre que peut l’être la Chambre Régionale d’Agriculture ou les services de l’état. On a été quand même assez bien écoutés par la région et par nos partenaires associatifs. Nous voudrions que les associations aient une place, mais pas un strapontin, au sein de la gouvernance de la Cop Bretagne, pour que la voix des citoyens soit portée, et que le volet « social » de la transition écologique ne soit pas oublié.




Mamik, une boite à savons éco-conçue en Loire-Atlantique

https://mamik.fr

 

 




Wild Bretagne, l’association qui veut faire pousser des forêts sauvages

L’association Wild Bretagne achète dans la région des parcelles, afin de « faire éclore des forêts sauvages ». Les terrains acquis deviennent ainsi des biens communs, sur lesquels la chasse, la coupe des arbres, la cueillette sont interdites, et le bois mort conservé. Laissés en « libre évolution », ces forêts deviennent ainsi des lieux privilégié pour la faune et la flore locale, qui y est préservée. Une façon aussi pour l’association d’amener à s’interroger sur les relations entre l’humain et le vivant, et notre lien au sauvage. Rencontre et reportage à Plouec-Du-Trieux(22), où se trouvent les premières parcelles acquises.

C’est dans la Vallée du Trieux, à quelques encablures de Saint-Clet (22), que nous rencontrons Pat et Sane. Tous deux font partie de l’association Wild Bretagne, née il y a maintenant 4 ans, et qui a pour but d’agir concrètement pour « faire éclore des forêts sauvages en Bretagne ».Une aventure démarrée par une « bande de copains et copines », qui se rencontrent durant leurs études. « On pratiquait tous et toutes la rando, le stop, le vélo, et on aimait voyager », explique Sane. A force de découvertes, la petite bande commence à se questionner autour de la notion d’espaces sauvages : Est ce qu’il possible d’en avoir encore ? Et en Bretagne. ? Comment peut-on faire ? Sane, Pat et les autres vont alors jusqu’en Pologne, à la découverte de la dernière grande forêt européenne, Bialowesa. Une rencontre va profondément les marquer : celle avec Bogdan Jaroszewicz, directeur de la station géobotanique de la forêt. « Il nous a permis de comprendre comment on pouvait faire revenir une forêt primaire », précise Pat.

Et donc, comment faire germer des forêts sauvages en Bretagne ? L’association Wild achète alors des parcelles, qui deviennent ainsi des « biens communs », pour les laisser ensuite en « libre évolution », et exemptes de toutes activités humaines. La chasse et la coupe d’arbres y sont interdites, tout comme la cueillette. Le bois mort est conservé, car il sert d’habitat et de nourriture à de nombreuses espèces. « Les études scientifiques montrent que la non-gestion permet l’augmentation de la biodiversité forestière », soutient Pat. « Cependant, nous ne sommes pas contre l’usage du bois. On essaie juste d’embarquer un maximum de gens dans nos questionnements», précise-t-il. Il faut savoir qu’en Bretagne, qui est l’une des régions les moins boisées de France, les forêts sont toutes très jeunes, et très exploitées. Et en France, seulement 0,14% de celles-ci sont laissées en libre évolution !

Chasse interdite et chevreuils

A Plouëc-Du-Trieux (22) ; l’association a donc acheté 18 000 m2 de forêt, divisé en trois partie. Le tout grâce à un financement participatif, qui a eu un très beau succès. « On avait pour objectif 7500 euros, finalement on en a obtenu 27 000 ! », se réjouissent Sane et Pat. L’une des parcelles se trouve à 30 minutes de marche de la route départementale, en longeant le Trieux, par le GR. Le temps étant clément, nous partons donc à sa découverte avec Pat. L’endroit est idyllique, bordé de quelques chaos rocheux, et de la rivière. Quelques arbres tombés du fait des récentes tempêtes obstruent le chemin, ce qui nous oblige à quelques contournements par les fougères. Nous arrivons finalement après quelques descentes et montées sur le territoire de la réserve. Un panneau signale que la chasse est interdite. Ici, on trouve ce qui fait la biodiversité classique d’une forêt bretonne, à savoir des hêtres, des châtaigniers, des chênes, des ifs, mais aussi du sureau ou des très jeunes érables. Des passages et des empreintes indiquent la présence de chevreuils, qui viennent également s’abreuver dans le Trieux. « On a installé un piège photo et on les a repéré », explique Pat, en chuchotant, pour ne pas les effrayer. Le terrain est à eux, ainsi qu’aux sangliers, pics, chouettes, hiboux…qu’on pourrait y trouver. Mais le sentier reste accessible aux humains, qui « font aussi partie du vivant ».

Des balades botaniques ont déjà eu lieu sur le site. Une manière de sensibiliser le grand public, qui est par ailleurs le second axe d’action de Wild Bretagne. « L’idée, c’est aussi de conscientiser, notamment par l’art et le jeu. Certain.e.s membres de l’association ont une sensibilité plus artistique. On peut proposer des ateliers de peinture, d’écriture…qui permettent une première approche ». L’association a ainsi créé une exposition photo sur la forêt primaire polonaise de Bialowesa, et un jeu de cartes « memory » pour apprendre aux petits et grands à reconnaître les arbres. Elle intervient également dans des écoles, des bibliothèques, des festivals…et souhaite créer du lien avec les habitant.e.s. « Tout ceci permet de croiser les regards et des sensibilités différentes », indique Pat. « Chacun peut réinterpréter sa vision du sauvage, retrouver un lien sensible avec le vivant. Il faut changer de paradigme : nous sommes juste des humains qui habitons un écosystème. Il faut savoir coexister et partager ».

« L’appel du sauvage », de nouvelles parcelles à acheter bientôt

L’équipe de Wild Bretagne a lancé début juillet un nouveau projet, baptisé « L’appel du sauvage ». Trois terrains sélectionnés sont soumis aux votes du public, pour être achetés par l’association, grâce aux dons supplémentaires qui ont été récoltés dans le cadre de la campagne de financement participatif précédente. Un nouvel appel aux dons, pour compléter les fonds, sera lancé également.

PSST…. NOUS AVONS TOUJOURS BESOIN DE VOTRE SOUTIEN !
Nous sommes un webmédia associatif, basé à Morlaix qui met en avant les actrices et les acteurs des transitions écologiques nécessitant évidemment des transitions sociales, culturelles et solidaires dans nos territoires de Bretagne. Outre, notre site d’information, alimenté par notre journaliste-salariée et par des plumes citoyennes bénévoles, nous menons ponctuellement des actions de sensibilisation aux transitions et de formation aux médias citoyens avec des interventions auprès d’associations et d’établissements scolaires.
Pour tout cela, nous avons le soutien de collectivités territoriales et de l’Etat. Percevoir de l’argent public pour nos activités d’intérêt général fait sens pour nous.
Pour autant, votre participation citoyenne nous est essentielle :- vos envies d’écrire, ou de photographier, ou de podcaster des initiatives de transitions dans les cinq départements de Bretagne historique.- vos contributions financières pour continuer de mener à bien nos projets en 2024, notamment nos « Portraits de femmes en transition ». – vos implications dans notre vie associative.
Pour cela, vous pouvez adhérer en ligne : https://www.helloasso.com/associations/eco-bretons/adhesions/adhesion-2024

Plus d’infos :

https://wild-bretagne.fr




Portrait de femme n°18 : Flavie Despretz : L’art de faire ensemble

Flavie Despretz est une bretonne pure souche, baignée dans les objets bruts depuis toute jeune. Le monde du recyclage a toujours fait partie d’elle. C’est tout naturellement qu’il a perduré à l’âge adulte. Et quoi de mieux que l’artisanat d’art pour l’exprimer, le montrer et le faire vivre.
« C’était une évidence […] nous avons tellement de matières intéressantes dans nos poubelles, tellement de choses qui sont là et que nous jetons ».
De la construction de cabanes dans les bois, aux luminaires avec des morceaux de canettes et de vieilles bandes de cinémas, le travail de la matière l’interroge.
Travailler les matériaux, les faire vivre de nouveau dans un environnement, questionner nos pratiques, nos habitudes. C’est dans cet objectif que Flavie a créé l’événement « La Balade Artistique »
.

« Le projet est de faire sortir l’art […] que les gens se ré- émerveillent de nos paysages
et de notre environnement ».

Plus d’une quarantaine d’artistes étaient présents le dimanche 19 mai 2024 à Carantec dans le Finistère. Le concept de la balade est de présenter une prestation artistique (tableaux, danse, land- art, sculptures…) en symbiose avec le littoral de Carantec. Pour que tous et toutes puissent découvrir l’art au-delà d’une galerie ou d’une exposition fermée.

Tableaux de Noelle Irvoas, photographie de Sophie Sanchez, Balade Artistique Carantec, 2024.

Lors de cette journée, Flavie a créé une œuvre souhaitant refléter la montée des eaux et la fragilité du littoral. « La commune de Carantec fait partie du littoral en danger […]Il est important pour moi de le montrer et de replacer l’humain face à la nature », rappelle Flavie.

Imaginez-vous d’ici trente ans, vous baigner dans le sable, comme si de rien n’était, car nous n’aurons pas changé nos habitudes face au dérèglement climatique. C’est l’idée que Flavie a souhaité montrer à travers ses œuvres saugrenues sur la plage du port de Carantec.
« C’est une reconnexion : de se parler, de regarder ce qu’il se passe, voir ce que l’on peut faire ensemble. Le jeu est surtout de ne pas paraître effrayant, mais plutôt de passer par le comique et l’ironie ».

Baignade sur la plage. Flavie Despre, photographie @DilineGwen, Balade artistique Carantec, 2024

« Parler ou faire parler d’écologie par le rire et non par la peur »

Avec tout ce que l’on voit dans les médias, sur les réseaux sociaux ou à la télévision, Flavie se sert de l’art comme moyen d’expression, pour faire passer un message différent. Pour que les personnes se rassemblent et échangent face à l’absurdité.
« Les gens font comme si de rien n’était alors que l’on sait que nager dans le sable c’est une horreur […] tout va bien dans le meilleur des mondes », assure-t-elle.
Techniquement les œuvres sont en « plâtre du Marais » un mélange de plâtre et de chaux aérienne
avec un corps en filasse.
Flavie a choisi ce matériau pour sa légèreté et sa flexibilité. Cela lui a permis d’aller chez les personnes et de faire des moules sur mesure.

« Les baigneurs de l’absurde, œuvres de Flavie Despretz, Balade Artistique Carantec, Sophie Sanchez, 2024

Autre proposition, l’ours blanc sirotant son cocktail tout en scrutant l’horizon, sur le plongeoir
de la plage de la Grève Blanche, donne matière à réflexion.
Un message simple réalisé collectivement par les bénévoles et autres artistes -dont Flavie en est la
cofondatrice avec Léa Roussy- de la journée.
« Passé le moment de surprise et de rire, les gens parlaient spontanément d’environnement »
C’est donc cela l’art selon Flavie Despretz. Le faire ensemble par l’humour et par l’amour.

L’Ours de Carantec, Œuvre Collective, Balade Artistique, Photographie de Sophie Sanchez, 2024.

Propos recueillis par Sophie Sanchez.
Merci encore à Flavie Despretz pour son temps et son incroyable travail lors de la journée Balade Artistique Carantec.

Retrouvez le travail de Flavie
Sur son site internet :
https://flaviedespretz.wixsite.com/home
Et sur Instagram :
@flavieluminariste
@baladeartistique_carantec


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Benoît Hamon : « La Bretagne est plutôt à la pointe en matière d’innovation dans l’ESS »

La cinquième Conférence Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire s’est déroulée hier jeudi 19 décembre, au Roudour à Saint-Martin-des-Champs. Accueillies par l’équipe salariée et bénévole du pôle ESS du Pays de Morlaix, plus de 260 personnes se sont réunies pour évoquer 10 ans de développement de l’ESS dans la région et sur le Pays de Morlaix, depuis la loi ESS de 2014, et pour poser les bases de la nouvelle stratégie régionale 2025-2028. Benoît Hamon, ancien ministre et désormais président de l’association ESS France, était présent. Retrouvez son interview audio en fin d’article.

13,8% des emplois en Bretagne avec 164 000 salarié.es , et première région de France. Voilà ce que représente l’économie sociale et solidaire en Bretagne. Celle-ci « n’est pas un secteur d’activité, mais une façon de faire et d’entreprendre qui rassemble des organisations alliant performances, démocratie et utilité sociale ». Telle est l’ESS définie par la CRESS (Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire) de Bretagne.

La loi du 31 juillet 2014 prévoit des conférences régionales de l’économie sociale et solidaire, qui sont organisées au moins une fois tous les deux ans par l’Etat, la Région, et la CRESS. « Elles abordent les orientations, les moyens et les résultats des politiques locales de développement de l’économie sociale et solidaire. », explique la CRESS Bretagne.

L’édition 2024 de cet événement régional se déroulait jeudi 19 décembre, au Roudour, à Saint-Martin-des-Champs près de Morlaix. L’occasion pour plus de 260 acteurs et actrices breton.nes de se réunir et d’évoquer le développement de l’ESS depuis 2014, et de réfléchir aux orientations de la nouvelle stratégie à venir, qui entrera en vigueur en 2025, jusqu’à 2028.

Après un mot d’ouverture de Jean-Paul Vermot, maire de Morlaix et Président de Morlaix Communauté, qui a rappelé l’importance de l’ESS sur ce territoire, notamment du point de vue historique avec l’apparition des premières coopératives à Morlaix il y a plus d’un siècle, un quiz interactif sur l’ESS a permis à la gagnante de repartir avec le premier billet de 29 Buzuks, monnaie locale du Pays de Morlaix, qui sera édité en 2025*.

Puis, une première table-ronde a évoqué les 10 années passées. Michel-Pier Jézéquel, président de la CRESS Bretagne, a ainsi rappelé  « L’espace de coopération assez remarquable qu’il y a en Bretagne ». « En 10 ans, on aura vu la pérennisation du DLA (dispositif local d’accompagnement de l’ESS), la création des TAg**, le travail sur Guid’asso avec le Mouvement Associatif, l’amélioration de la qualité de l’emploi dans nos structures, le travail sur la structuration des filières alimentation, maritimité, l’économie circulaire… nous avons oeuvré pour faire de l’ESS un modèle d’entreprendre qui répond aux enjeux sociaux et environnementaux », a-t-il souligné.

Gaëlle Le Stradic, Conseillère Régionale déléguée à l’ESS, a appelé à se « féliciter collectivement » de ces résultats, et du bon travail entre « les institutions, l’économie sociale et solidaire, l’Etat et la Région ».

Le reste de l’après-midi a été consacré à des ateliers sous forme déambulatoire permettant de réfléchir aux grandes orientations à définir pour la prochaine stratégie. Puis, après la remise du Prix de l’ESS à la Scic Distro, spécialiste de la consigne du verre (voir encadré), la plénière a permis des échanges entre le public et Benoît Hamon, ancien ministre et Président d’ESS France, Gaëlle Le Stradic, Michel-Pier Jézéquel, et Thierry Couret, correspondant régional ESS à la DREETS (Direction Régionale de l’Economie, de l’Emploi et des Solidarités). Au programme de ce dernier grand temps fort : Comment se projeter positivement dans les 10 prochaines années pour l’ESS ? Benoît Hamon a exhorté à « essayer de penser des stratégies qui alignent les planètes », et à « regarder ce sur quoi on a collectivement la capacité d’agir ». Pour lui, l’avenir de l’économie sociale et solidaire s’annonce « potentiellement radieux », étant « un secteur très doué pour préparer l’avenir ». « La responsabilité qui est la nôtre est de construire des alliances, il faut prendre la place et le rang qui nous revient, sans attendre l’Etat », a-t-il conclu.

*https://www.eco-bretons.info/sur-le-pays-de-morlaix-le-buzuk-lance-de-nouveaux-billets/

**Le TAg est un idéateur qui accompagne les porteurs et porteuses de projets à transformer leurs idées innovantes en un véritable projet de création d’entreprise.


Interview audio de Benoît Hamon, ancien ministre et Président d’ESS France, et Michel-Pier Jézéquel, président de la CRESS Bretagne. Ils évoquent le bilan pour l’ESS à l’occasion des 10 ans de la loi, et la place de la Bretagne dans l’ESS française.

Le prix régional de l’ESS remis à Distro

Le prix régional de l’ESS a été remis à Distro, filière bretonne de réemploi du verre.

Née en 2015, d’abord sous forme associative, puis transformée en Scic en 2022, Distro est basée à Plérin dans les Côtes-d’Armor. Elle regroupe des producteurs, des citoyen.ne.s, des collectivités, des points de vente, des imprimeurs, des laveurs, des transporteurs…

Distro gère la collecte, le lavage et la remise en valeur des contenants en verre. Plus de 400 000 bouteilles ont ainsi été réemployées, grâce à 65 points de collecte répartis en Bretagne.

https://www.ess-bretagne.org

Distro : https://distro.bzh/




ChouetteCoop, la coopérative morbihannaise du réemploi et de l’insertion

ChouetteCoop, anciennement Book Hémisphères, est une Scic consacrée au réemploi, et également une entreprise d’insertion. Elle récupère des livres dans 250 points de collecte en Bretagne, les trie, et les revend sur internet ou dans ses boutiques de Kervignac et Carhaix. Depuis quelques mois, l’entreprise Tikoantok, spécialiste du matériel de puériculture reconditionné, a rejoint la coopérative. Une nouvelle activité pour cette structure de l’économie sociale et solidaire, qui a aussi lancé un appel à souscription de part sociale. Rencontre à Kervignac, à côté de Lorient.

Née en 2010 à Kervignac, l’association Book Hémisphères a grandi et évolué. Transformée en coopérative depuis 2018, la structure est désormais une Scic et une entreprise d’insertion, à but non lucratif. Elle comprend maintenant une recyclerie à Merlevenez et une boutique à Carhaix, en plus du point de vente historique de la zone du Braigno à Kervignac. Une aventure qui a démarré « il y a plus de 20 ans », rembobine Benjamin Duquenne, président-directeur de la coopérative. « A l’époque, j’avais lancé le site de vente de livres d’occasion, livrenpoche.com ». Ce grand collectionneur de livres a fait évoluer son activité avec la création de l’association Book Hémisphères, qui employait déjà du personnel en insertion. « L’objectif, c’était de créer de l’emploi, en faisant ce que j’aimais ». De 4 salarié.e.s et 130 000 ouvrages collectés dans 40 points de collectes en 2010, la structure est passée à 39 salarié.e.s, dont la moitié en insertion, et a désormais quatre camions qui passent dans 250 points de collecte. Elle traite 100 000 livres par mois !

Des livres qui sont tous triés un par un. Ceux en bon état, environ 45%, sont revendus sur internet ou dans les boutiques, à Kervignac et Carhaix. Les autres partent en direction d’une usine en Normandie, qui les transforme en pâte à papier. Tous les livres ont leur solution de recyclage, certains sont même revendus à des professionnels pour faire de la décoration. Mais attention, souligne Benjamin Duquenne, « Le but n’est pas de faire un maximum de volume, on fait attention. Il faut qu’on soit capable de traiter tous les flux entrants ».

Après le tri qui s’effectue dans un hangar à Kervignac, direction la boutique juste à côté. Celle-ci est un petit paradis pour les amateurs de littérature : de nombreux rayonnages de livres d’occasion, triés par catégorie. Polar, cuisine, bien-être, histoire…

Le choix est vaste. Des dvd et vinyles sont également disponibles. Un peu plus loin, un espace « enfants-familles » a été aménagé : on peut y trouver des jeux de société d’occasion, des neufs, des livres jeunesse, mais aussi du matériel de puériculture. C’est l’une des dernières activités de la coopérative, qui a « absorbé » l’entreprise Tikoantik. Fondée par Séverine Inkermann, elle propose aux parents et aux professionnels de la petite enfance du matériel de puériculture reconditionné et contrôlé. « Depuis mai, nous avons rejoint ChouetteCoop, cela correspond à notre évolution et nos besoins, avec des volumes de ventes qui ont augmenté, notamment auprès des professionnels comme les crèches ou les Maisons d’Assistantes Maternelles », souligne Séverine, qui travaille aussi désormais avec l’un des leaders de la vente aux professionnels de matériel pour la petite enfance. « Et puis, ça nous permet de créer des synergies. On peut par exemple vendre à la fois des livres jeunesse et du matériel de puériculture, pour équiper des activités d’hébergement par exemple », souligne Benjamin Duquenne. Dorénavant appelée « ChouetteCoop Petite Enfance », Tikoantik a gagné il y a quelques mois un des Trophées Bretons des Transitions, dans la catégorie « Entreprise ».

Dernière actualité en date pour ChouetteCoop : le lancement d’un appel à souscription de part sociale, à partir de 50 euros, et devenir ainsi sociétaire de la Scic. Dans la gouvernance de la structure, chaque sociétaire a une voix, peu importe le nombre de parts détenues. Le renforcement du capital de la Scic permettra à ChouetteCoop de continuer son développement, élargir dans le futur ses collectes à de nouvelles régions, et agrandir ses locaux.

En attendant, la coopérative donne rendez-vous pour les braderies mensuelles et grandes ventes qu’elle organise à Kervignac. La prochaine aura par exemple lieu le samedi 11 janvier.

Plus d’infos : https://www.chouettecoop.org/