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Climate Chance 2017 Agadir : Plongée centenaire dans l’innovation énergétique

Il y en a qui s’ingénient à réinventer la roue et qui en plus s’en vantent. Quelle perte de temps et d’énergie !

Justement à propos d’énergie, lors du 2° Sommet Climate Chance d’Agadir, on pouvait rencontrer sur le site du comité 21 les animateurs de Paléo-Energétique et découvrir la frise qui illustrait leur démarche.

De quoi s’agit-il ? Comme ils le disent eux-même, il s’agit de recherche participative. Mais au-delà des mots, il s’agit d’abord et avant tout d’un outil de connaissance mis à disposition d’ universitaires qui, souvent, dans le cadre de leur projet de recherche, veulent trouver LE truc qui va sauver le monde et ce faisant, la plupart du temps, ne font que réexplorer une piste qui avait été largement défrichée par leurs aînés, il y a parfois plus d’un siècle.

Pourquoi s’agit-il alors de science collaborative ? La plupart des inventions qu’on retrouve dans la frise ont été signalées par des gens comme vous est moi qui en avaient entendu parler et trouvaient vraiment dommage que ces trouvailles, souvent géniales, soient restées dans l’oubli.

Du coup l’objectif de Paléo-Energétique est double. Le premier est d’inciter des étudiants à revisiter certaines de ces innovations et voir comment, remises au goût du jour, elles pourraient avoir une nouvelle vie et pourquoi pas trouver leur marché. Le second objectif est plus de vulgarisation;il s’agit donc de montrer à un plus large public qu’il ne faut pas se laisser prendre au miroir aux alouettes de ces innovations qui n’en sont parfois pas et que beaucoup de choses ont déjà été testées qui, si elles étaient réellement développées pourraient changer bien des choses dans notre quotidien. C’est dans cet objectif de vulgarisation que la présentation de toutes les inventions est volontairement limitée à 1.500 signes. C’est aussi pour cela que la présentation du site est sous la forme d’une frise qui invite donc à la flânerie.

En flânant, on peut ainsi découvrir

  • le bacille perfringens du Dr Jean Laigret qui transformait les déchets carnés en pétrole brut
  • le camion à hydrogène de Messieurs Hubault et Dubled ou la voiture à hydrogène de Mr Perrier
  • les concentrateurs solaires de Auguste Mouchot ou de Padre Hymalaya
  • le mur à pêche de Montreuil
  • qu’il se fabriquait plus de voitures électriques que voitures thermiques en 1900

Le fait que ces inventions n’aient pas connu le succès interroge. Néanmoins, sans tomber dans un excès de suspicion, on peut penser que des intérêts économiques puissants militaient à l’époque contre leur généralisation. Incidemment, maintenant que le contexte économique a changé, voilà une raison de plus pour aller revisiter cette frise

Pour aller plus loin :

la frise de paléo-energétique https://paleo-energetique.org/

le site des initiateurs du projet : l’association atelier 21 qui’ n’en est pas à son coup d’essai dans la sensibilisation du grand public mais qui utilisent généralement des voies plus ludiques et artistiques https://atelier21.org/

L’association suisse d’où a émergé l’idée ADER http://ader.ch/

le site du comité 21 qui hebergeait la frise à Agadir http://www.comite21.org/




Climate Chance 2017 Agadir : une chance pour la planète

Il y a un an s’est tenu, à Nantes, dans notre région donc, une réunion préparatoire à la COP 22 de Marrakech, qui ne rassemblait que des acteurs non étatiques (Organisations non gouvernementales, collectivités territoriales, entreprises petites et grandes).

Nous ne savions pas alors que s’enclenchait un mouvement de fond.

Un an après, à Agadir dans le Sud du Maroc, sur la côte Atlantique, le deuxième sommet de Climate Chance se réunit du 11 au 13 septembre. Plus de 5.000 personnes sont là, représentant des centaines d’associations, des dizaines d’entreprises et autant de collectivités territoriales .

La multiplicité et la diversité des stands installés dans les allées et le village de tente attenant au Sommet montrent avec force que la Région d’Agadir, pour ne prendre qu’elle, s’est largement mobilisée pour la lutte contre le changement climatique, dans une démarche de transition pragmatique, prenant en compte tous les aspects que cette lutte induit : gestion de l’énergie, gestion de l’eau, de nouveaux modèles de développement agricole, la prise en compte de la problématique du genre dan la gouvernance de ces transitions.

Tout cela a été réaffirmé par les participants à la plénière inaugurale, le président de la Région Souss Massa (Agadir), les ministres marocains de mines, de l’énergie et du développement durable, de l’agriculture, de la pêche, du développement rural, de l’eau et des forêts, la secrétaire exécutive de la Conférence de Nations Unies sur le Réchauffement Climatique, le Président de la COP 22 et le président de Climate Chance.

Tous ont souligné le rôle que les acteurs non étatiques (les ANE) ont joué et continuer à jouer dans la mobilisation planétaire. Ainsi, la secrétaire exécutive de la CNUCC, Patricia Espinosa a témoigné du rôle d’aiguillon qu’avaient joué les ONG en apportant des solutions pratiques et réplicables mais aussi en mettant sur la table de nouvelles interrogations nées des observations qu’elles font sur le terrain. Elle a également témoigné du rôle de contre-poids que jouent les collectivités territoriales quand elles refusent l’inertie de leurs Etats, citant en exemple l’initiative américaine « We are still in » qui regroupent toutes collectivités territoriales des Etats -Unis, Etat comme la Californie mais aussi plus de 300 villes, qui refusent d’admettre que la foucade du Président Trump mette un coup d’arrêt aux dynamiques à l’œuvre sur le territoire américain depuis parfois des décennies.

Comme l’a souligné le président de la COP 22, Mr Mezouar, la COP de Marrakech fut un formidable catalyseur local des énergies et a permis de développer une méthodologie qui s’applique maintenant aux nombreux projets qui émergent dans les différentes régions du Maroc : étape 1, on structure, étape 2, on mobilise, étape 3 on accompagne. Cette approche des choses illustrent bien l’esprit de ce sommet des ANE. L’initiative vient des ONG, des entreprises ou des collectivités territoriales et l’Etat n’est là que pour ce soutien en trois temps, chacun ayant autant d’importance que les autres.

On aurait pu croire que ce sommet des ANE à moins de trois mois de la COP n’était fait que fourbir les arguments qui permettront de faire pression lors des négociations à Bonn en novembre 2017. C’est en partie vrai puisque les organisateurs reconnaissent qu’ils espèrent obtenir de cette COP 23 des engagements concrets et irréversibles. Mais selon le président de Climate Chance, les vrais enjeux ne sont peut-être pas là ; ils sont aussi de faire en sorte que ce rassemblement, qui est probablement le plus grand forum non étatique consacré au changement climatique permettent l’émergence d’initiatives concrètes entre ONG, entreprises et collectivités. Il est aussi de fourbir les arguments pour affronter des partenaires autrement redoutables que les Etats, les bailleurs de fond, dont les logiques échappent largement aux accords passés lors des COP.

C’est peut-être le début d’une maturité institutionnelle de ces acteurs non étatiques.




Le feuilleton de l’été « Les mots valises » : L’innovation (chapitre 3, épisode 2)

Tout d’abord, commençons par l’exercice de vocabulaire:voici la définition qu’en donne le Conseil Supérieur de l’Economie Sociale et Solidaire

« L’innovation sociale consiste à élaborer des réponses nouvelles à des besoins sociaux nouveaux ou mal satisfaits dans les conditions actuelles du marché et des politiques sociales, en impliquant la participation et la coopération des acteurs concernés, notamment des utilisateurs et usagers.

Ensuite, si on va sur les sites des différentes organisations qui fédèrent l’Économie Sociale et Solidaire, on trouve une multitude d’exemples pour illustrer ce qu’est pour eux l’innovation sociale.

Si cela vous intéresse, vous trouverez les liens vers ces sites en fin de l’article dans la rubrique « pour aller plus loin ».

Ce qui frappe d’emblée dans ces abondantes floraisons d’expériences, c’est d’abord sa grande diversité : quasiment aucun domaine de la vie quotidienne n’est épargné.

En second lieu, on ne peut pas ne pas remarquer que toutes ces expériences ont le même fondement : la solidarité, entre ceux qui savent et ceux qui demandent à apprendre, entre gens aisés et d’autres moins bien lotis, entre générations, au sein d’un même territoire entre acteurs économiques. Il s’agit bien là de nouvelles façons de tisser des liens sociaux. Nouvelles façons ? Cela reste quand même à voir. La nouveauté est évidente quand il s’agit par exemple de partager les nouvelles technologies ou lutter contre les effets les plus évidents de notre mode de consommation dispendieux (les déchets). C’est déjà moins évident dans d’autres cas et je prendrai ici deux exemples. Les logements intergénérationnels qui sont présentés comme une innovation sociale ne font que recréer des modes de cohabitation qui existaient dans nos campagnes et même parfois dans nos villes jusqu’à un passé récent. Les AMAP ressemblent quand même fortement aux marchés locaux où les producteurs vendaient directement aux consommateurs locaux les produits de leur travail. Ici l’innovation, n’est pas tant de créer un nouveau type de liens au sein de la société que de retrouver sous une forme nouvelle des liens qui existaient, je dirais naturellement, dans une société organisée différemment. Alors, l’innovation sociale, c’est parfois faire du neuf avec du vieux ? Oui et non. Si on se limite aux effets, la réponse serait plutôt oui. Si on se réfère aux ressorts de ces nouvelles approches de la vie en commun, ce se serait plutôt non car ce qui fait la différence, ce sont les acteurs et leurs motivations. Ce qui était fondé là sur un lien naturel , la famille ou le canton, s’enracine ici dans une démarche qu’on peut qualifier de politique si on veut bien admettre que l’objet de la politique c’est de faire évoluer la société vers un fonctionnement meilleur.

Et on retrouve là les mécanismes qui au XIX° siècle ont déclenché des mouvements qui confluèrent vers ce que nous appelons l’économie sociale et solidaire : le mouvement coopératif, le mouvement mutualiste et tous leurs avatars.

Cette filiation devrait d’ailleurs nous faire réfléchir. En effet, quand on regarde ce que sont devenus certains fleurons de cette économie, on peut s’inquiéter de l’évolution possible de ce ces innovations sociales. Après tout, les plus belles réussites financières de ces dernières années sont issues d’innovations sociales, mais celles-ci ont été captées à des fins commerciales par des gens astucieux. Et c’est là que nous retrouvons la définition donnée par les hommes de marketing de l’innovation : « l’innovation, ce serait une invention qui aurait trouvé son marché. »

Pour que l’innovation sociale reste autre chose que cela, il est donc nécessaire qu’elle garde intact son principal ressort, la solidarité ; c’est pourquoi, je préférerai parler maintenant d’innovation solidaire.

Si vous voulez aller plus loin dans la connaissance de ces innovation, vous pouvez consulter les sites ci-dessous -liste non exhaustive-. Vous pouvez aussi vous exercer à rechercher des initiatives qui relèvent de cette catégories sur un site qui en parle beaucoup au quotidien http://www.eco-bretons.info/ ou même sur l’ancien site http://old.eco-bretons.info/

http://www.avise.org/decouvrir/innovation-sociale/innovation-sociale-de-quoi-parle-t-on

http://www.atelier-idf.org/connaitre-ess/innovation-sociale/innovation-sociale-exemples-franciliens/

http://www.lelabo-ess.org/-developper-l-innovation-sociale-.html

http://fonda.asso.fr/-Exemples-d-innovations-sociales-.html




Le feuilleton de l’été « Les mots valises » : l’innovation (chapitre 3, épisode 1)

Il y a comme cela des mots ou des expressions qui apparaissent, deviennent à la mode et ont un tel succès que, finalement, tout le monde se les approprie. Évidemment, comme il s’agit d’expressions nouvelles, leur signification reste un peu floue et chacun y met ce qu’il veut, un peu comme dans une valise.

Cet été nous nous intéresserons à quatre expressions qui sont dans le ton de ce site : développement durable, transitions (qui peut être énergétique ou écologique, voire les deux à la fois), innovation ( qui peut-être sociale, technologique, commerciale) et démocratie participative (forcément participative, aurait dit Marguerite Duras).

Le feuilleton de l’été « les mots valises » chapitre troisième « innovation »

premier épisode : innover ou mourir

Comme d’habitude, je voulais commencer ma petite exploration des mots éculés par un petit détour par le dictionnaire, mais ce que j’y ai trouvé m’a laissé perplexe. En effet passons rapidement sur la première définition qui est une lapalissade

Action d’innover ; son résultat : .

En effet autant les deux premières définitions qui suivent me paraissaient cohérentes entre elles, autant la troisième m’a paru un peu plus éloignée

Introduction, dans le processus de production et/ou de vente d’un produit, d’un équipement ou d’un procédé nouveau.

Ensemble du processus qui se déroule depuis la naissance d’une idée jusqu’à sa matérialisation (lancement d’un produit), en passant par l’étude du marché, le développement du prototype et les premières étapes de la production.

Processus d’influence qui conduit au changement social et dont l’effet consiste à rejeter les normes sociales existantes et à en proposer de nouvelles.

Manifestement, les deux premières définition se rapportent au monde de l’entreprise alors que la troisième concerne un concept de plus large application

Dans le monde de l’entreprise l’innovation est devenue une obligation, un impératif catégorique comme aurait Kant. Sans innovation tu meurs. Mais pour autant les penseurs de l’entreprise ont du mal à la définir autrement qu’ainsi « l’innovation, ce serait une invention qui aurait trouvé son marché. » Un peu réducteur, non ?

l’OCDE définit l’innovation comme « [L]a mise en œuvre d’un produit (bien ou service) ou d’un procédé (de production)nouveau ou sensiblement amélioré […], d’une nouvelle méthode de commercialisation ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques d’une entreprise, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures. » (Manuel d’Oslo 3ème réédition).

Mais il n’y a pas que que dans l’entreprise que l’innovation est devenu un passage obligé. Les pouvoirs publics s’y sont mis à leur tour et notamment dans le cadre de leurs relations avec leurs partenaires associatifs. Combien d’appels à projets, combien de conventions partenariales insistent sur les aspects innovants de l’activité ou du du projet que ces services de l’État ou les collectivités territoriales acceptent de financer ?

Par exemple le Conseil régional de Bretagne dans sa direction de l’économie, dispose de deux services consacrés à l’innovation

SERVICE DE L’INNOVATION ET DU TRANSFERT DE TECHNOLOGIES

« Le SITT gère les dispositifs de soutien aux projets industriels innovants et développe des outils d’interface et appui technique aux entreprises afin de valoriser la recherche et de favoriser la diffusion des technologies. »

SERVICE DE L’INNOVATION SOCIALE ET DE L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE

« Le Service de l’innovation sociale et de l’économie sociale et solidaire gère les dispositifs de soutien et appels à projets qui visent à consolider les structures et les acteurs du secteur, à développer la vie associative et stimuler l’innovation sociale. »

Wikipédia a consacré à l’innovation, un article très long et très documenté que je vous invite à lire https://fr.wikipedia.org/wiki/Innovation dont je ne retiens que cet extrait : « L’innovation est souvent aujourd’hui appréhendée par un modèle linéaire de progrès »

Ainsi donc, l’innovation nous renvoie à l’idée de progrès. Tiens voilà un mot qui fut un mot-valise il y a quelques années et qui est depuis tombé en désuétude depuis que nous nous sommes rendus compte que le progrès qu’on nous avait vendu n’avait pas tenu ses promesses. En effet dans toutes les définitions de ce mot, nous n’avons retenu la plupart du temps que celle-ci : « Transformation vers le mieux dans un domaine particulier, évolution vers un résultat satisfaisant, favorable ».Or, l’actualité économique nous montre tous les jours que ce progrès, technologique le plus souvent, n’apporte pas que du bon. En serait-il donc de même avec l’innovation ?

On peut en effet le penser. En effet, la nouveauté n’est pas une qualité intrinsèque, c’est l’usage qu’on en fait qui en fait la valeur.

Si donc on considère, malgré tout, que le progrès, c’est ce qui rend les choses meilleures, nous sommes amenés à penser que l’innovation est donc un processus, technique, social ou organisationnel, qui produit quelque chose de nouveau ET de meilleur. Et là, cela nous renvoie à notre propre échelle de valeurs : quand considérons-nous qu’un objet qu’un mode d’organisation, que des relations sociales sont meilleurs ? Comme chacun voit midi à sa porte, tout le monde y trouve son compte et c’est ce qui fait le succès du mot « innovation » parce que dons nos esprits, son inverse est « ringardise » « archaïsme » et personne ne veut être ni ringard, ni archaïque.

C’est pourquoi l’innovation est donc mise à toutes les sauces : innovation technologique, innovation managériale, innovation collaborative, innovation de rupture, innovation pédagogique, innovation incrémentale, et que sais-je encore. Demain, je m’arrêterai à l’une d’entre elles, l’innovation sociale, qui à elle seule, fait déjà un sacré buzz.




Le feuilleton de l’été « les mots valises » : la transition (chapitre 2, épisode 3)

Il y a comme cela des mots ou des expressions qui apparaissent, deviennent à la mode et ont un tel succès que, finalement, tout le monde se les approprie. Évidemment, comme il s’agit d’expressions nouvelles, leur signification reste un peu floue et chacun y met ce qu’il veut, un peu comme dans une valise.

Cet été nous nous intéresserons à quatre expressions qui sont dans le ton de ce site : développement durable, transitions (qui peut être énergétique ou écologique, voire les deux à la fois), innovation ( qui peut-être sociale, technologique, commerciale) et démocratie participative (forcément participative, aurait dit Marguerite Duras).

Épisode 3 : Transitions radicalement progressives 

L’épisode précédent se terminait sur « trajectoire de transition » . En effet, il s’agit bien de cela, d’une trajectoire ou plutôt d’un trajet, le plus souvent personnel, parfois collectif (« seul on va plus vite, ensemble on va plus loin » dit la sagesse populaire africaine). C’est un mouvement continu, progressif mais résolu qui peut partir de n’importe où mais toujours d’un point qui touche particulièrement chaque individu. Cela peut être sa santé, son porte-monnaie, son boulot, ses relations de voisinage, le spectacle du monde. Peu importe. Le principal, c’est d’abord de se sentir concerné. Évidemment si on en reste là, les choses n’avanceront guère : on sera au mieux dans la protestation contre le système qui produit tout cela, au pire dans la désespérance résignée face au même système, en attendant on ne sait quel bouleversement qui renverserait ce système pour le remplacer par … on ne sait trop quoi. Et puis il y a l’attitude plus réactive qui est de dire : « au moins sur ce point-là, je peux faire quelque chose, changer mes habitudes ! » et en général on le fait parce que c’est ce point-là justement qui a permis une première prise de conscience parce que sur cette question, on se sentait concerné.

Et puis de fil en aiguille, à condition de s’en donner la peine et de faire preuve de curiosité, on se rend compte qu’il y a d’autres phénomènes néfastes liés à ceux-là et que l’ensemble fait partie d’un système et que lorsque on touche à un élément, c’est l’ensemble de l’écheveau qu’il faut dévider car rien n’est totalement indépendant et qu’il existe des chaînes de causalité : énergie-transport-mobilité-aménagement de l’espace, santé-alimentation-mode de consommation-mode de production par exemple et la liste est longue. Et plus on creuse, plus on va vers les racines. C’est pourquoi je parle de transition radicale, c’est à dire celle qui va jusqu’aux racines de chaque problème. Changer ses comportements, c’est bien mais ne pas faire couler l’eau en se brossant les dents ou faire pipi sous la douche pour économiser l’eau des toilettes, cela reste des comportements déculpabilisants voire un peu ludiques si parallèlement on ne se pose pas la question de la vie de l’eau : l’eau qu’on capte et détourne pour produire des plantes gourmandes, l’eau qu’on salit en empoisonnant la terre, l’eau qu’on rejette sans forcément la nettoyer. Ceci n’est évidemment qu’un exemple parmi tant d’autres. Mais si on décidait d’aborder toutes ces questions simultanément, ce serait un tel bouleversement de nos modes de vie que nous n’y résisterions pas. C’est pourquoi la transition écologique doit être progressive mais elle ne progressera que si elle vise à toucher aux racines des maux dont souffre notre planète. Radicale et progressive vous dis-je. Comme le chemin est long, mieux vaut le commencer le plus vite possible, chacun à sa façon, les solutions existent à portée de nos mains. C’est d’ailleurs ce qu’on voit tous les jours sur le site d’éco-bretons http://www.eco-bretons.info/.

Dominique Guizien




Le feuilleton de l’été « les mots-valises » : la transition (chapitre 2, épisode 2)

Il y a comme cela des mots ou des expressions qui apparaissent, deviennent à la mode et ont un tel succès que, finalement, tout le monde se les approprie. Évidemment, comme il s’agit d’expressions nouvelles, leur signification reste un peu floue et chacun y met ce qu’il veut, un peu comme dans une valise.

Cet été nous nous intéresserons à quatre expressions qui sont dans le ton de ce site : développement durable, transitions (qui peut être énergétique ou écologique, voire les deux à la fois), innovation ( qui peut-être sociale, technologique, commerciale) et démocratie participative (forcément participative, aurait dit Marguerite Duras)

Le feuilleton de l’été « les mots valises » chapitre deuxième la transition

Épisode 2 transition énergétique et transitions écologiques

En moins de 5 ans, la transition a fait son chemin dans le discours des politiques et dans les enceintes internationales. La ministre de l’écologie du précédent gouvernement a même pondu une loi sur la transition énergétique et l’actuel ministre de l’écologie parle de transition écologique ET solidaire ( pour ce dernier terme, se référer aux épisodes précédents). L’accord de Paris sur le changement climatique parle lui aussi de transition écologique. Bref tout le monde rêve d’un bon transit.

Effectivement le point de départ de la transition à Totnes, ça a été la réduction de la consommation énergétique, qu’ils ont appelé joliment « la descente énergétique » mais rapidement, le concept de résilience (encore un mot en passe de devenir valise) a étendu la transition à l’ensemble de leurs comportements sociaux. Et c’est donc cela qui caractérise actuellement tous les territoires qui se déclarent en transition : une démarche globale qui revisite tous nos comportements, au travail, dans notre consommation, dans notre mode de vie, dans nos relations avec les autres.

Mais comme le mot a eu de l’écho, les politiques l’ont récupéré. Je disais plus haut que l’ancienne ministre de l’écologie avait même fait voter une loi sur la transition énergétique, accréditant par là l’idée que la transition pouvait ne concerner qu’une partie de notre vie sociale et économique. Or justement en s’appuyant sur une des annonces fortes de cette loi, je vais essayer de montrer que les mêmes mots peuvent cacher des réalités très différentes

petit exercice d’arithmétique « royaliste »

Deux objectifs phares de cette loi :

réduire la consommation d’électricité de 50% ….d’ici 2050 dont 20% d’ici 2030

ramener la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50% d’ici 2025.

Je passe rapidement sur le premier objectif car en 2050, madame Royal aura 97 ans et cette projection est aussi fiable que celles qui furent faites en 1980.

Arrêtons par contre un instant sur le second objectif.

Pour cela, je vous renverrai à deux billets que j’avais publiés au moment du débat sur cette loi

#transition énergétique les limites arithmétiques de la loi Royal Publié le janvier 23, 2015

Petite arithmétique électrique Publié le avril 11, 2015

dont il ressort qu’il y a deux façons d’atteindre cet objectif, soit diminuer d’1/3 le parc nucléaire, à consommation constante, soit d’augmenter de 50% la consommation, si on s’avère incapable de fermer la moindre centrale nucléaire. Vu les succès obtenus entre 2012 et 2017 en la matière, on comprend ce que peut être le sens de ce 50%. mais alors il faudra dire adieu au premier objectif .

Il est clair dès lors qu’une véritable « transition » dans le domaine de l’énergie passe par un désengagement massif du nucléaire car le véritable objectif en terme de transition, ce n’est pas la part du nucléaire mais bien « la descente énergétique » esquissée dans le premier objectif.

En effet, toutes les sources de production d’énergie polluent plus ou moins. La seule énergie qui ne pollue pas est celle que nous ne consommons pas; cela veut dire entre autre qu’il convient de se poser la question des véhicules électriques et de leur alimentation, ce qui du coup nous amènerait à peut-être à repenser nos mobilités, et cela pourrait nous entraîner à réfléchir à la localisation de nos temps de vie (résidence, travail, consommation, loisirs). Cela peut nous amener loin et là on sera à mille lieues de « la croissance verte» , qui était la fin du titre de la loi de madame Royal,« loi de transition énergétique pour une croissance verte ». Par contre, nous serions au cœur de la réflexion sur une trajectoire de transition.