Bonnets Rouges: des revendications ambitieuses et hétérogènes

Bonnets Rouges: des revendications ambitieuses et hétérogènes
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« C’est une vraie démocratie qui en train de se mettre en place en Bretagne ». Christian Troadec, maire de Carhaix, et Thierry Merret, leader de la FDSEA Finistère, ne sont pas peu fiers de présenter le mouvement des Bonnets Rouges, dont ils sont les têtes de pont. Réunis à Langolvas/Morlaix samedi, près de 3000 participants ont donné le ton dès l’ouverture des portes. Bonnets rouges vissés sur la tête et drapeaux bretons en avant, ils veulent avant tout « Vivre, décider et travailler au pays », selon leur mot d’ordre.

Dès 15 heures, les onze renvendications issues de « 15 000 doléances recueillies auprès des comités locaux », selon les organisateurs, sont présentées sur scène, devant la salle. Différents intervenants se succèdent, notamment des grands patrons bretons (Britanny Ferrie, Queguiner..). L’accumulation de taxes, ils n’en veulent pas, et notamment l’écotaxe, symbole de la colère bretonne et revendication principale et fondatrice du mouvement. « De toute façon, il n’y aura pas d’écotaxe. Nous prenons notre destin en mains et nous le ferons sans écotaxe, évidemment », lance ainsi Jean-François Jacob, président de Combiwest, opérateur privé de transport combiné rail-route, acclamé par la salle.

Pour le développement des énergies renouvelables

Pas d’écotaxe, mais les doléances ont révélé la volonté de développer des énergies renouvelables. Ainsi que l’appropriation par les Bretons du domaine de l’énergie en général. « On veut casser le dispositif d’accès à l’énergie qui est très étatique. Pourquoi les Bretons ne seraient pas précurseurs dans la création de filières énergétique moins coûteuse et plus proches des consommateurs ? », se demande Jean-Marc Roué, président de Brittany Ferries.

Bruno Rosec, entrepreneur dans le photovoltaïque, a quant à lui rappelé les contraintes administratives qui pèsent sur la filière, issues notamment de l’Union Européenne. « Bruxelles a demandé à Paris de suspendre l’arrêté déposé l’année dernière par la France visant à valoriser les panneaux solaires français et européens. Cet arrêté instaurait  une taxe sur les panneaux solaires venus de Chine notamment, et majorait le tarif de rachat de l’électricité produite par des panneaux français ou européens », explique-t-il. « Cela pourrait entrainer la suppression de 12 000 emplois en France, dont 4 à 5000 en Bretagne ». « Ici, dans la région, nous produisons des panneaux solaires, il faut travailler pour nous », affirme-t-il.

La relocalisation de la finance est également une des revendications du mouvement, notamment via le financement par les banques de projets locaux, l’investissement sur le territoire, la création d’une monnaie régionale, la mise en place d’un « crowdfunding breton », et la volonté de créer des échanges sans argent.

Reste à savoir maintenant ce que vont devenir toutes ces propositions, très hétérogènes et qui visent, pour la majeure partie, une plus large autonomie pour la région. Les Bonnets Rouges ont appelé le président de la république François Hollande à venir en Bretagne les rencontrer et entendre leurs doléances. Mais le mouvement, assez hétéroclite, a perdu de son souffle, passant de manifestations regroupant 17 000 personnes en octobre à un rassemblement de 3000 citoyens ici en mars. Continuera-t-il sur sa lancée dans les mois à venir ? Les leaders annoncent d’ores et déjà un « printemps breton »…

 

Les 11 revendications des Bonnets Rouges

  • Maintenir la gratuité des routes en Bretagne et supprimer définitivement l’écotaxe.
  • Libérer les énergies et soutenir l’emploi par l’allègement des charges et des contraintes administratives.
  • En finir avec le dumping social et les distorsions de concurrence en Europe
  • Relocaliser les décisions et les pouvoirs économiques en Bretagne
  • Développer des infrastructures et des modes alternatifs de transport avec un rééquilibrage Ouest/Est
  • Appropriation par les Bretons de la filière énergie et développement des énergies renouvelables
  • Relocaliser la finance
  • Officialiser la langue et la culture bretonnes
  • Renforcer l’expérimentation, le dialogue, la transparence et le « vivre ensemble » en Bretagne
  • Doter la Bretagne de ses propres médias audiovisuels et numériques
  • Une Bretagne forte à 5 départements avec relocalisation des décisions politiques

 

 

A lire aussi : http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/070314/les-bonnets-rouges-une-double-manipulation

« Au moment où les « comités des Bonnets rouges » tiennent leurs « États généraux » à Morlaix, samedi 8 mars, l’essayiste Françoise Morvan revient sur les faits pour expliquer comment la « révolte des Bonnets rouges » a été, selon elle, organisée et résulte, au total, d’une manipulation de l’opinion reposant sur l’invention d’un symbole, le bonnet rouge. Chronologie et analyse. »

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Marie-Emmanuelle Grignon

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