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La Butineuse, une maison d’édition « slow » et atypique à Auray (56)

Dans une démarche de « Slow édition », la Butineuse, créée par Audrey Carpentier et François Barnaud, déploie ses ailes à Auray (56). Elle propose, en petit tirage, des ouvrages éco-conçus qui traite de sujets tels que l’agriculture, l’alimentation, l’eau ou encore le compost. Avec comme ligne éditoriale « l’impact des activités humaines sur le monde ».

C’est en 2020 que se déploient les éditions la Butineuse, à Auray. Aux racines du projet, on trouve Audrey Carpentier et François Barnaud. Tous deux, arrivés de Région Parisienne il y a une poignée d’années, exerçaient auparavant dans le département édition d’une organisation internationale pour François, et dans le domaine de l’édition et de la culture pour Audrey. Face à des pratiques qu’ils décrivent comme « peu vertueuses », ils choisissent de quitter les entreprises dans lesquelles ils travaillaient. « Le métier d’éditeur nous habite, mais le milieu de l’édition ne nous plait pas », explique François. « Il y a beaucoup de surproduction, de logiques industrielles…on assiste à la fusion de groupes qui détiennent des centaines de marques, les auteurs sont mal rémunérés, les imprimeurs sont sous la pression des prix… ». Un constat en effet peu reluisant, malgré « une image affichée qui est très positive ».

Tous deux se lancent alors dans l’aventure de la création de leur propre maison d’éditions, en terres bretonnes. La ligne directrice est trouvée : ce sera « les impacts des activités humaines sur le monde ». Les formats se veulent hybrides, au croisement entre livre, revue et média en ligne.

Les ouvrages, en format numérique ou papier, sont disponibles en vente directe sur le site de la Butineuse, mais aussi dans des librairies, comme par exemple Le Temps qu’il Fait à Mellionnec (22), Dialogues à Brest (29). « Ce sont de petits tirages, imprimés en France », expliquent François et Audrey. « Et nous n’avons pas de stocks ».

Pour le moment, dix titres sont disponibles, dans trois collections : « Néo Métiers », « Planète sensible », et « Cultures croisées ». On peut citer par exemple « Terre et climat », de Patrick Love, qui travaille avec l’OCDE, et qui propose un éclairage sur le rapport spécial du Giec sur les terres émergés, ou « Hydrater la terre », d’Anada Fitzimmons, qui explique les liens entre assèchement des terres par les activités humaines et réchauffement climatique. D’autres livres sont consacrés à l’agriculture, au compost, aux émotions liées à la transition. «On propose des ouvrages qui permettent d’éclairer des sujets », résume François. La Butineuse a également lancé un sondage en ligne, afin de connaître les préférences des visiteurs et visiteuses en terme de sujets à traiter dans les parutions. Une façon d’impliquer davantage le public.

Hormis le site internet et les librairies, on peut également retrouver la maison d’édition sur des événements bretons. Ce sera le cas le samedi 3 juin à la médiathèque d’Auray, dans le cadre de la semaine du développement durable. Et le 13 juin, à Pluvigner (56), pour le Forum des Circuits Courts et de l’accueil à la ferme.

 

Plus d’infos : https://www.editions-labutineuse.com/

 




Voir, ressentir « L’oiseau, en soi » et ceux du dehors, qu’il reste encore !

Dans leur exposition, « L’oiseau en soi », visible à Auray (Morbihan) jusqu’au 9 juillet, s’accompagnant d’ateliers et d’une balade avec la LPO Bretagne, les deux artistes Juliette Gautier et Thomas Baudre nous invitent rien moins qu’à Habiter en oiseau, ainsi qu’à Une infinité de manières d’être au monde. Pour mieux sauver tous ceux du ciel, dont Bretagne Vivante nous rappelle l’urgence.

Nous pourrions aisément (mais non sans peine) en oiseau de mauvaise augure, filer la métaphore sur ce que nous, humains, faisons aux seuls représentants actuels des dinosaures théropodes, réchappés de l’extinction Crétacé-Paléogène il y a 66 millions d’années, pour mieux saisir à quel point ils battent de l’aile, tant à travers l’Europe qu’en sa pointe bretonne.

Les faits sont pourtant bien là, implacables. Il y a quelques jours, une étude a révélé que « en quarante ans, le nombre d’oiseaux des champs a diminué de 60 % sur le Vieux Continent », nous alertait le journal Le Monde. Etude qui hiérarchise, pour la première fois, les raisons de ce déclin : pesticides et engrais sont les causes majeures de l’effondrement des populations d’oiseaux en Europe.

Et l’association Bretagne Vivante d’enfoncer douloureusement le clou sur les chiffres et l’origine de la disparition des oiseaux, en particulier dans notre région : « Près de 800 millions d’oiseaux ont disparu depuis 1980, soit 20 millions chaque année, selon une étude du Centre national pour la recherche scientifique (CNRS) et de l’université de Montpellier publiée le 15 mai dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS). “Le nombre d’oiseaux a décliné de 25% en 40 ans sur le continent européen”, souligne un communiqué de presse et le chiffre atteint même “57% pour les oiseaux des milieux agricoles.»

En Bretagne : le moineau friquet en danger critique et le tarier des prés, considéré éteint

«Les oiseaux des milieux agricoles sont des espèces de milieux ouverts ou bocagers qui utilisent cultures ou prairies pour rechercher leur alimentation ou nicher, telles que l’alouette des champs, le bruant jaune ou le pipit farlouse. En Bretagne, en plus de l’agriculture intensive, les changements climatiques affectent aussi la dynamique de ces espèces et leurs aires de répartition. Ainsi, les populations de bruant jaune et de pipit farlouse sont en régression, et abandonnent le sud et l’est de la région. Les analyses du protocole STOC en Bretagne montrent que les populations de bruant jaune ont subi une diminution estimée à 73 % de 2001 à 2021, tandis que l’abondance de la Tourterelle des bois est en déclin de 43% sur la même période. Cette espèce qui se nourrit au sol de graines et niche dans les haies basses est particulièrement impactée par les pratiques de l’agriculture intensive. » Le CNRS alerte aussi sur le sort de plusieurs espèces, comme le moineau friquet ou le tarier des prés dont les populations ont baissé de 75% en France. Le premier est en danger critique d’extinction en Bretagne et le second considéré éteint. Les conclusions de l’étude  “démontrent l’urgence de repenser le mode de production alimentaire actuel. » (Source : https://www.bretagne-vivante.org/2023/05/lintensification-de-lagriculture-est-a-lorigine-de-la-disparition-des-oiseaux-zoom-sur-la-bretagne/).

Malgré ces constats factuels sans appel qui s’accumulent au fil des dernières décennies (dans son ouvrage récemment réédité « Le printemps silencieux », la biologiste nord-américaine Rachel Carson lançait déjà l’alerte… en 1962), nous peinons à changer de braquet pour enrayer l’hécatombe, tant notre action collective ne parvient pas à se hisser efficacement sur l’échelle systémique du problème.

L’oiseau, en soi

Dans son puissant livre « Manière d’être vivant » (https://www.actes-sud.fr/catalogue/sciences-humaines-et-sociales-sciences/manieres-detre-vivant), Baptiste Morizot en appelle à une « bataille culturelle à mener quant à l’importance à restituer au vivant », où « il s’agit de refaire connaissance : approcher les habitants de la Terre, humains compris, comme dix millions de manières d’être vivant ». A l’instar du philosophe pisteur, des croisements à la fois stimulants et poétiques s’opèrent, par la grâce de porteuses et porteurs de pensées hybrides, scientifiques et interdisciplinaires, et de gestes artistiques. Les récents ouvrages, « Habiter en oiseau » de la philosophe et psychologue Vinciane Desprets (https://www.actes-sud.fr/catalogue/nature-et-environnement/habiter-en-oiseau, citée plus bas par les deux artistes) et «  Une pluie d’oiseaux » de l’historienne-essayiste Marielle Macé (https://www.jose-corti.fr/titres/une-pluie-d_oiseaux-mace.html) en attestent de magnifique et vibrante façon.

Avec leur exposition « L’oiseau, en soi », visible en la Chapelle du Saint-Esprit d’Auray jusqu’au 9 juillet prochain, les deux artistes Juliette Gautier et Thomas Baudre s’inscrivent dans cette lignée.

Diplômée d’arts plastiques à l’école européenne supérieure d’art de Bretagne (EESAB) de Rennes puis de l’EESAB de Brest en option Design de la Transition, Juliette Gautier mêle ses pratiques artistiques à une approche sociologique et zoologique. Elle aime questionner nos us et coutumes au travers des tabous. Le corps humain et les phénomènes de dégradation naturelle sont omniprésents dans sa recherche.

De son côté, après des études en ingénierie à l’Institut national des sciences appliquées de Rennes, Thomas Baudre (www.thomasbaudre.com) est ensuite diplômé de l’École nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d’art (ENSAAMA) à Paris ; il a ensuite développé plusieurs projets de films d’animation. À travers ce médium, il s’intéresse à ce qui motive les gestes humains et animaux, et à ce qu’ils engendrent.  L’intelligence du geste est devenue un sujet central dans sa démarche artistique.

Crédits photos : Thomas Baudre

Avant d’aller découvrir leur exposition qui a fait l’objet en avril dernier, d’une résidence de création artistique menée au Domaine de Kerguéhennec/Département du Morbihan, une mise en bouche – au sens propre du terme, c’est-à-dire en lecture à voix haute pour en apprécier les saveurs, à tous les étages de notre être – des bons mots des organisateurs/trices de l’exposition et des deux artistes s’impose. Les voici donc :

« Et si un oiseau résidait en chacun de nous ? Cette question jalonne les œuvres installées au cœur de la Chapelle du Saint-Esprit d’Auray, en nous conviant à une introspection inhabituelle. Mêlant installations et cinéma d’animation dans un dialogue teinté de chants, les artistes Juliette Gautier et Thomas Baudre nous donnent à voir et à ressentir « L’oiseau, en soi ».

À travers cette exposition, Juliette Gautier et Thomas Baudre placent l’oiseau au centre de toute notre attention. Ils nous invitent à le considérer en soi, pour ses qualités intrinsèques. L’oiseau est un sujet à penser en profondeur dans toute sa singularité, dans toute son étrangeté. Cette exposition nous invite ainsi à changer profondément de regard.

Une approche ornithologique singulière s’ouvre à travers cette incitation, articulant le naturalisme et l’animisme, deux manières de percevoir le monde. Les deux artistes s’accordent avec l’anthropologue Philippe Descola : la séparation Nature / Culture n’est qu’une production sociale, une frontière qui n’existe pas. Il y a simplement des humains et des non-humains, faisant partie d’un Tout continu.

Habiter en oiseau
La notion de territoire se veut présente dans cette exposition, il est ici question de frontières. Que signifie le fait d’ « habiter en oiseau » ? Cette formule tirée du livre de Vinciane Despret, psychologue et philosophe des sciences belge, nous convie à une forme d’empathie, à un regain de sensibilité, nécessitant un arrachement à soi. Comprendre la manière dont les oiseaux peuplent la terre implique de s’extraire, un instant, de sa peau d’être humain. Aussi, les œuvres présentées questionnent, chacune à leur manière, les complexités propres à l’acte de territorialisation des oiseaux.

Une infinité de manières d’être au monde
Les oiseaux déploient une infinité de manières d’être au monde, tout en nuances. À ces mouvements infinis, il convient d’accorder la plus grande importance. C’est également à cela que nous invitent les deux artistes : focaliser notre attention sur l’infime, sur cette somme de détails qui constitue la beauté du peuple des cieux. Le moindre battement d’aile est décomposé, redessiné, amplifié, grâce au potentiel du cinéma d’animation.

Questionner les manières d’être au monde des oiseaux implique nécessairement des renversements : basculement d’échelle, de perspective. Dans cette exposition, le territoire est mis en branle, déséquilibré. Et pour cause : il n’y a rien de plus mouvant qu’un territoire. Le Parc Naturel Régional du Golfe du Morbihan constitue un cadre idéal pour cette recherche, au regard de la variété des espèces d’oiseaux qui y vivent. Mêlant le sensible à l’intelligible, les deux artistes ont déployé pour l’exposition un langage plastique qui parle pour les oiseaux : pour, c’est-à-dire à leur attention, mais aussi en leur nom. Au nom et à l’attention, aussi, de l’oiseau qui vit en nous. »

Crédits photo : Thomas Baudre

L’oiseau, en soi – Juliette Gautier et Thomas Baudre
Exposition du 13 au mai au 9 juillet 2023 à la Chapelle du Saint-Esprit, Auray
Entrée libre

Horaires d’ouverture :  Lundi > samedi 10h30-12h / 14h-18h – Dimanche 14h-18h – Fermé le mardi

Autour de l’exposition

ATELIER NICHOIRS
avec Juliette Gautier
Mercredi 24 mai 14h-17h à la Chapelle du Saint-Esprit

Lors de cet atelier, vous apprendrez à construire un nichoir pour les oiseaux. Avec des planches de bois, vous fabriquerez une maisonnette. Chaque oiseau aime faire son nid dans des conditions différentes, vous apprendrez à comprendre ses spécificités et vous les appliquerez afin qu’il s’approprie la cabane. Pour finir, vous pourrez décorer votre nichoir avec des éléments naturels.
Atelier ouvert à 10 personnes à partir de 10 ans
Gratuit – sur inscription à mediation.athena@ville-auray.fr

ATELIER ROTOSCOPIE
avec Thomas Baudre
Samedi 3 juin 14h-16h à la Chapelle du Saint-Esprit

Au cours de cet atelier, vous apprendrez à réaliser de courtes séquences en animation, à travers la « rotoscopie ». Cette technique accessible consiste à relever image par image les éléments d’une figure filmée afin de les retranscrire en dessin animé.
Atelier ouvert à 10 personnes à partir de 5 ans
Gratuit – sur inscription à mediation.athena@ville-auray.fr

VISITES GUIDÉES DE L’EXPOSITION
avec les médiatrices culturelles
Chaque samedi à 11h à la Chapelle du Saint-Esprit

Les médiatrices de l’exposition L’oiseau, en soi vous proposent des visites guidées tous les samedis.
Gratuit – sans réservation

DES LINOGRAVURES DANS LA VILLE
Dans les vitrines de commerces d’Auray

Baladez-vous dans les rues d’Auray et découvrez des linogravures réalisées par Juliette Gautier dans les vitrines des commerçants. Deux parcours vous sont proposés pour découvrir les 10 linogravures de Juliette Gautier dans 20 vitrines. Vous trouverez ci-dessous (et à télécharger) un plan pour vous accompagner dans votre balade.

BALADE A LA DÉCOUVERTE DES OISEAUX
avec la LPO Bretagne (Ligue de Protection des Oiseaux)
Samedi 3 juin 9h30-11h30

Partons sur le terrain à la découverte des oiseaux ! Équipés de jumelles, nous observerons les oiseaux et apprendrons à les reconnaître à travers de petites anecdotes.
Départ du Centre Culturel Athéna et balade vers le parc Cadoudal
Balade ouverte à 20 personnes dès 7 ans
Gratuit – sur inscription à mediation.athena@ville-auray.fr

https://www.auray.fr/Culture-Loisirs/Centre-Culturel-Athena/Exposition-L-oiseau-en-soi




Kergrist 2030 : des propositions concrètes pour un futur souhaitable

Après une première séance visant à mieux comprendre les grands enjeux sociaux-écologiques de notre époque, cette deuxième séance a permis aux habitants de se projeter dans un futur souhaitable et d’en tirer des propositions concrètes pour leur commune.

 

Dimanche 26 Février dernier avait lieu le deuxième acte de la démarche Kergrist 2030. Cette initiative, proposée par Bertrand Coupet et soutenue par la municipalité, vise à inviter Kergristoises et Kergristois à contribuer à construire la commune de demain, en intégrant les grands enjeux sociaux-écologiques de notre époque (déclin de la biodiversité, inégalités, pollutions, emploi, dérèglement climatique, convivialité, vivre ensemble…)

Animée par Julien Fortel, cette deuxième séance a permis à 18 participants d’embarquer pour un « voyage en 2030 glorieuses ». Cet atelier, conçu par Julien Vidal, invite chaque participant à se projeter dans un futur proche où ses aspirations individuelles se sont réalisées et où la société s’est profondément transformée pour répondre à ces aspirations. La conversation entre les participants mets ainsi résolument l’accent sur tout ce que le futur a d’enthousiasmant à nous offrir, à contre-courant des discours anxiogènes sur l’avenir.

« Il ne s’agit pas de fuir la réalité du présent, ou d’occulter les défis et les menaces du futur, mais bien de choisir de porter notre attention sur tout ce que nous avons à gagner, plutôt que sur ce que nous risquons de perdre. Cet état d’esprit me semble plus susceptible de donner envie de s’investir, en mettant la joie et l’optimisme au cœur de la démarche. » Julien Fortel, facilitateur de Kergrist 2030

Après avoir exploré ce futur désirable, les participants ont pu découvrir de nombreuses initiatives qui contribuent dès aujourd’hui à transformer nos différents secteurs d’activité : agriculture et alimentation, mobilité, logement, biodiversité, cohésion sociale, éducation, santé…

La dernière partie de l’atelier a quant à elle permis aux participants de formuler des propositions concrètes pour leur commune : partage et réparation des outils et appareils entre habitants, accompagnement de l’habitat léger, tendre vers zéro logement vacant sur la commune…

« Nous avons étudié l’ensemble des propositions en conseil municipal et, pour chacune d’entre elles, une réponse détaillée sera faite aux participants afin d’aiguiller et d’accompagner les habitants désireux de s’impliquer, le cas échéant, dans leur mise en œuvre. » Arnaud David, adjoint en charge de l’environnement et de l’urbanisme.

Un bien bel exemple de participation citoyenne, ingrédient indispensable à la prise en compte des grands défis de notre époque, qui devrait très certainement inspirer d’autres communes à l’avenir.

« J’avoue que je rêvais d’une participation plus importante des habitants de Kergrist dans la démarche. Mais je comprends que ce genre de proposition n’embarque pas les foules, chacun ayant déjà fort à faire avec les différentes activités de son quotidien. Je suis particulièrement reconnaissant vis-à-vis de l’équipe municipale qui m’a soutenu et accompagné pour que cette proposition puisse voir le jour. Nous avons pu formuler des propositions très concrètes en seulement 2 réunions, c’est une vraie réussite ! Place à la mise en œuvre maintenant, tous les Kergristoises et Kergristois sont les bienvenus pour contribuer à la suite de l’aventure ! » Bertrand Coupet, habitant et initiateur de la démarche Kergrist 2030.




Portrait de femme numéro 12. Maryline Le Goff sème les graines de l’éco-construction et de l’autonomie à Questembert (56)

(Rediff) Rencontre avec Maryline Le Goff, à Questembert dans le Morbihan. Autoconstructrice, Spécialiste de l’éco-construction, elle vit dans un « éco-lieu familial » avec son mari et ses deux filles, qu’elle a créé elle-même, avec jardin vivrier et maison bioclimatique. Elle est également conseillère en éco-habitat et formatrice professionnelle en « bois brûlé », technique très utilisée au Japon pour le bardage des habitations.

Questembert, 7400 habitants dans le Sud Est du Morbihan. C’est dans cette commune, à quelques pas de la Chapelle Sainte-Suzanne, que se sont installés Maryline Le Goff, son compagnon Franck et leurs deux petites filles. Depuis 2014, la famille habite ce que Maryline appelle un « écolieu familial ». « L’idée, c’était de se dire : si tout s’écroule, comment faire pour abriter une famille et la nourrir, avec peu de moyens », explique-t-elle. On y trouve donc une maison bioclimatique économe, en « matériaux bio-sourcés », accompagnée d’un jardin vivrier, « qui nous permet de réduire au maximum nos charges quotidiennes, on est aujourd’hui quasi-autonomes en légumes », souligne Maryline.

Le fruit d’un parcours qui a emmené la jeune femme des études de sociologie à l’éco-construction, et à l’auto-construction. « Après mon bac+6, j’ai travaillé en tant que chargée d’études dans la prospective territoriale, au sein d’une association. C’était un travail de bureau, d’analyse, de communication, de secrétariat », détaille-t-elle. Lorsque son emploi se termine, vient le temps du questionnement. « Je me suis demandée si je voulais continuer dans ce type d’activités ». Ayant pris conscience, de par son activité professionnelle de prospective, des perspectives en terme d’effondrement, de réchauffement climatique, à plus ou moins long terme, Maryline choisit alors de « pouvoir y faire face ».

Avec Franck, ils partent alors tous deux en quête d’un terrain dans le Morbihan, du côté de Theix, siège de l’association où celui-ci travaille alors. C’est à Questembert qu’ils trouveront la perle rare. Maryline y découvre notamment l’association La Marmite, très active dans le développement local, qui va l’épauler dans la « gestion de projets ». Le couple, choisit de vivre dans un mobil-home sur le terrain le temps de construire une maison bioclimatique. Elle sera auto-construite. Maryline se charge alors de la conception, épaulée par des professionnels. Elle part ainsi en stage au sein d’Echopaille, société coopérative spécialisée dans la construction…en paille mais c’est avec Déwi Le Béguec et l’association ECLAT de Nantes qu’elle découvre plusieurs techniques liées à ce type de construction et plus particulièrement une technique adaptée aux auto-constructeurs, avec « de toutes petites sections de bois ». C’est celle-ci qu’elle adoptera pour la construction de la maison, qui fait 99 mètres carrés de surface. « Elle contient pour les fondations 3mètres cubes de béton, tout le reste c’est du bois, de la paille, de la terre, un peu de vitres, un peu de gaines électriques. C’est une maison très économe, qui se chauffe globalement avec le soleil, qui nous fait consommer une stère à une stère et demi de bois par an. », s’enthousiasme-t-elle. Franck l’a rejointe sur la maison après avoir quitté son emploi, et s’occupe désormais du jardin, cultivé notamment grâce à des techniques issues de la permaculture, du maraîchage en sol vivant. «  On fonctionne avec nos deux poules, nos deux canards, notre compost, nos toilettes sèches, on fait nos conserves. On développe tout un savoir aujourd’hui qui nous permet de diminuer nos charges et de vivre finalement confortablement. C’est très rassurant, par rapport à ce qu’on vit actuellement », analyse Maryline, qui avoue néanmoins avoir dû franchir un cap, à savoir changer de niveau de vie. «Ça n’a pas toujours été simple, Ça a été un sacré changement, on a quitté notre vie avec nos deux salaires pour venir s’installer dans un mobil-home ». Le regard des proches a aussi été parfois compliqué à vivre. « Mais maintenant, ils voient que notre modèle marche, et que notre jardin est plein de légumes ! ».

Grâce à toutes les compétences acquises lors de l’élaboration et la mise en œuvre de son projet de maison, Maryline, passionnée par tout ce qui touche à l’habitat, a lancé son entreprise de conseils en éco-habitat. Elle a aussi eu l’occasion de découvrir le bois brûlé, une technique notamment utilisée au Japon pour le bardage des maisons, qu’elle a elle-même utilisée. Incitée par une amie, elle anime alors un premier stage sur le sujet. C’est la révélation. « Je me suis éclatée à faire ça. Alors pourquoi pas d’autres ! ». Elle organise désormais des ateliers-découvertes. « Je vais chez les gens qui ont un projet de bardage bois brûlé, ou alors je les accueille ici par groupe de six ». Certifiée Qualiopi depuis janvier, Maryline reçoit aussi les artisans, architectes ou entreprises voulant se former professionnellement. Les avantages du bois brûlé selon elle ? « Il permet de valoriser un bois qui va être tout simple, par exemple une planche brute. On part d’un matériau peu cher, et on va le traiter pour qu’il dure des décennies, sans entretien. » « On brûle le bois, sans énergie fossile, avec un tout petit brasier. On utilise la force du feu pour le traiter en surface et en profondeur », poursuit la jeune femme ». On obtient ainsi un bois résistant aux insectes, aux champignons, aux assauts de l’eau, du vent, des rayons UV, et qui est durci. Seul l’aspect esthétique peut changer avec le temps. ». C’est ce qu’elle a utilisé pour le bardage de sa maison, qu’elle a réalisé avec l’aide de sa mère. Grâce à son entreprise, ses formations, mais aussi l’association qu’elle est en train de créer, elle souhaite semer à son tour auprès d’autres citoyens et citoyennes les graines d’une plus grande autonomie sur son lieu de vie et dans son quotidien.

Les prochaines dates de ses formations sont à retrouver sur son site internet : https://www.ideedoasis.org/




Portrait de femme n°14. Angélique Rocheteau, les brins et les liens de Penerf

Photo : Sous Un Autre Angle

(Rediff) Rencontre avec Angélique Rocheteau, osiéricultrice et vannière, installée non loin de la rivière de Penerf à Surzur (56), en plein cœur du Parc Naturel Régional du Golfe du Morbihan. Elle créé sur-mesure et répare des objets en osier, propose des stages de découverte dans son atelier, et anime des actions dans des écoles. Elle nous raconte son parcours personnel et professionnel, dans lequel la notion de transmission est particulièrement importante.

La bonne humeur, l’enthousiasme, la passion de transmettre, mais aussi la détermination. Voilà ce qui caractérise Angélique Rocheteau. Artisane-vannière mais aussi osiéricultrice, elle s’est lancée en 2017, et s’est installé à Surzur, non loin de la rivière de Penerf, dans un territoire à la riche biodiversité. Un tournant dans son parcours professionnel. « J’ai fait des études de gestion. Mon dernier emploi, c’était au service dépannage d’une société de bâtiment à Vannes !». Pas grand chose à voir avec la plantation de saules et les créations en osier…Et pourtant, l’agriculture fait partie de la vie d’Angélique depuis longtemps. « Mon grand-père était paysan, je m’amusais toute jeune avec des brins d’herbe en mettant la clôture pour les vaches », se souvient-elle. « Mais quand j’étais étudiante, ce n’était pas un secteur qui était valorisé. Mon parcours scolaire a fait que mon installation a été retardée, mais cela m’a permis au final d’acquérir de la maturité pour me lancer plus tard ». La toute récente quadragénaire revendique aussi son « amour de la terre et du végétal » pour expliquer sa transition professionnelle vers la vannerie. « C’était en moi je crois, mais je m’interdisais tout simplement d’y rêver ! ». Alors à côté de son emploi, Angélique se forme, passe des diplômes grâce à la Validation des Acquis de l’Expérience, s’exile temporairement du côté de Nancy pour se former à la vannerie dans la seule école française dédiée. Pas facile quand on est « mariée et maman de trois enfants », souligne-t-elle. Mais elle persévère. Et créé son activité. Aujourd’hui, elle peut vivre de sa passion, même si tout n’a pas été si simple… « Etre vannière, c’est encore connoté. Et puis être une femme, en agriculture, et travailler l’osier, parfois ça fait beaucoup pour certains !Sur certains comportements ou réflexions, notamment dans les réseaux, on a encore des marges de progression ! », affirme-t-elle.

Si son parcours a été plus long que d’autres, cela lui été particulièrement utile pour réfléchir à son projet : l’acquisition et l’installation sur des terres agricoles humides, en plein cœur du Parc Naturel Régional du Golfe du Morbihan. Des terrains « qui n’étaient pas même cultivés en agriculture traditionnelle », et sur lesquels elle a pu planter 2500 pieds de saule. « C’est un endroit propice pour la culture de cet arbre, car il n’y a pas besoin d’arroser ici », précise-t-elle. D’autres pieds se développent aussi au camping de la Fontaine du Hallate, à Plougoumelen, où le propriétaire pratique entre autre la phytoextraction, c’est-à-dire l’assainissement des eaux à l’aide de plantes. « L’oseraie, c’est une culture de saule, qui est coupée tous les ans, généralement entre novembre et mars, quand la sève est descendue. C’est à ce moment que le saule devient osier. On sèche ensuite le saule, on le calibre et on le stocke », détaille Angélique.

Dans son atelier en bois, qu’elle a construit l’année dernière, l’osiéricultrice et vannière réalise des créations sur-mesure, et répare des objets en osier que les particuliers peuvent lui apporter. Angélique anime aussi des stages, à destination des adultes et des enfants. Et intervient pour des actions pédagogiques dans des écoles. Des moments qui sont très importants pour elle. « Transmettre, je crois que c’est ça qui m’anime », souligne-t-elle. Une volonté qu’elle attribue à sa rencontre, alors adolescente, avec Michel Le Corno, directeur du lycée Saint-Paul à Vannes, où elle était élève. « J’étais obligée de travailler en parallèle de mes études, j’étais dans une situation vraiment atypique. Et il a toujours été bienveillant avec moi. Ça a changé ma vie », avoue-t-elle.

La transmission, pour Angélique, c’est aussi faire passer des messages sur l’écologie, notamment aux plus petits. « C’est important aussi d’éduquer les enfants. On n’a pas tous la même chance à la naissance, et reconnecter les enfants à la nature grâce à l’école, c’est super. On a aussi ce travail d’éducateur, en collaboration avec les communes et les équipes enseignantes. On travaille plein de valeurs dans ces ateliers ! ». Mais la vannière ne veut pas pour autant être « donneuse de leçons ». «Le but, c’est de trouver chacun à notre niveau des solutions pérennes. Je sensibilise les gens, par exemple au rotin, qui vient de très loin, pour qu’ils puissent faire des choix ». « Il va falloir se secouer et trouver tous des solutions, mais sans opposer les gens. C’est comme ça que pour moi on arrivera à faire bouger les lignes. », ajoute-t-elle.

A son niveau, Angélique Rocheteau essaie de « faire sa part ». Des panneaux photovoltaïques vont bientôt être installés sur son atelier, afin d’être autonome en électricité. Elle utilise des toilettes sèches. Et fait attention à l’utilisation des ressources et la production de déchets dans le cadre de son activité. « Je suis labellisée « Green Morbihan » », explique-t-elle. « Pour l’obtenir, il faut répondre à 64 critères très précis, notamment sur l’eau et l’électricité ». Une démarche logique, quand on est situé dans une zone à la biodiversité remarquable, et qui permet à Angélique, grâce à son « double-métier », d’atteindre l’équilibre parfait, à savoir le lien avec la terre qu’elle travaille et qu’elle aime tant, mais aussi le lien avec les autres. De quoi, pourquoi pas, rebaptiser son activité « Les liens et les brins de Penerf » !




TikoAntik veut développer l’achat de matériel reconditionné pour les bébés

Proposer aux parents et aux professionnels de la petite enfance du matériel de puériculture reconditionné et contrôlé, c’est l’objectif du projet de la morbihannaise Séverine Inkerman. Baptisé « TikoAntik », il est suivi par l’incubateur d’entreprises de l’ESS Tag56 et devrait être opérationnel avant l’été 2022.

« Ti » pour maison, et « Koantik » pour mignon/mignonne. Voilà la signification en breton de TikoanTik, projet porté par la morbihannaise Séverine Inkerman, et qui vise à « faciliter l’achat d’occasion de matériel de puériculture dans une démarche de réemploi et d’impact positif sur l’environnement via un contrôle qualité strict des produits, un conseil adapté et des partenariats ». « Tout est parti d’un constat », précise Séverine. « Quand on a un enfant, il faut acheter beaucoup d’équipements : lits, couches, matériel de portage, poussettes…la plupart sont de basse qualité environnementale, en plastique ou en aggloméré, et coûte très cher. Lorsque j’étais enceinte, je travaillais pour France Active. J’étais en contact avec beaucoup de ressourcerie et recycleries. Toutes expliquaient qu’elles avaient beaucoup de matériel de puériculture, qu’elles finissaient par jeter car il prenait de la place et ne se vendait pas ». Pourquoi l’achat de seconde main dans ce domaine fait encore l’objet de réticences ? « Pour des raisons de sécurité, avec l’évolution des normes, d’utilisation précédente qu’on ne connait pas, de propreté, et parce que souvent le mode-d ’emploi manque et on n’a pas toutes les informations utiles au bon fonctionnement », commente Séverine. « Et puis offrir de l’occasion pour l’arrivée d’un bébé, ça reste encore compliqué pour pas mal de gens ».

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Des partenariats pour la collecte et le reconditionnement

Devant cette situation qui l’interpelle, la morbihannaise, qui a quitté Nantes pour revenir à Lorient d’où elle est originaire, quitte son emploi et se lance alors dans son projet. Suivie depuis septembre par le Tag56, « propulseur d’entreprenariat collectif du Morbihan », elle a pour objectif que TiKoantik soit opérationnel avant l’été 2022. « L’idée, c’est de travailler avec les recycleries et un réseau comme Emmaüs pour la collecte, et avec des partenaires pour la partie reconditionnement, contrôle de sécurité, aspect normatif et nettoyage, avec des Esat par exemple », souligne l’entrepreneuse, qui a embarqué avec elle deux autres personnes dans le projet, et un comité stratégique de cinq membres pour aider à son développement. Le matériel pourra ensuite être revendu aux parents, mais aussi aux professionnels, comme les assistantes maternelles, les micro-crèches, les associations de solidarité…Ce qui ne pourra pas être proposé à la vente sera démantelé et les matériaux réutilisés.

Pour la suite, et « une fois que le modèle aura montré sa viabilité », TikoAntik compte bien essaimer dans d’autres régions de France. C’est ainsi qu’une véritable filière de réemploi de matériel de puériculture pourrait voir le jour, en commençant par la Bretagne !

 

Pour en savoir plus

https://tikoantik.com/

 

Crédit photo de une : Violaine Pondard