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Conversion : « Pour passer en bio, le plus gros changement se fait dans la tête »

Pourquoi avoir fait le choix de la conversion ?

Alain Fleury : Avant 2000, je faisais des céréales, des endives et des pommes de terre en conventionnel. Mon système ne dégageait pas beaucoup de revenu. C’est une rencontre qui m’a poussé vers le marché de l’œuf bio qui connaissait alors une forte demande. J’ai créé un poulailler en 2000 et j’ai commencé à convertir 13 hectares, notamment pour l’épandage des fientes. Ensuite, j’ai continué à convertir mes parcelles les unes après les autres. La dernière conversion date de 2008. Toutes mes terres et mon atelier sont aujourd’hui certifiés. Une entreprise prend mes œufs et je revends mes céréales au groupement qu’elle a créé et qui les mutualise entre les différents éleveurs sous contrat. C’est intéressant pour ceux qui ont moins de terres.

Toujours convaincu par ce choix ?

Pour passer en bio, le plus gros changement se fait dans la tête. Je faisais déjà des rotations donc de ce point de vue, ça n’a pas trop changé mais voir de la folle avoine et des fleurs jaunes dans les parcelles, ça fait mal. Le salissement fait très peur. On s’aperçoit vite que l’on peut maîtriser ce salissement par le désherbage mécanique. Mes premières parcelles converties, il y a 10 ans, sont toujours pas mal.
Je ne regrette vraiment pas mon conversion et j’espère que mon fils continuera en bio.

 

Comment ont évolué vos résultats techniques et économiques ? Êtes-vous satisfait de cette évolution ?

Alain Fleury : Je suis tout à fait satisfait de mes résultats techniques et économiques. En revanche, je n’ai été aidé que sur les 13 premiers hectares convertis, via la PAC. Pour le reste, je n’ai fait ni CTE, ni CAD et je l’ai senti passer. Pour autant, aujourd’hui, nous avons retrouvé un niveau de vie que nous avions perdu depuis longtemps. En terme de marges, pour les cultures, nous sommes mieux que ce que nous étions en conventionnel. C’est lié à la baisse des intrants et à une meilleure valorisation des céréales. Aujourd’hui, mes rendements varient peu et, pour l’instant, les années de forte spéculation comme en 2009 sont récupérées sur les exercices suivants. Il est d’ailleurs important de se battre pour la valorisation. C’est sur le prix qu’il faut se battre pas sur l’argumentaire habituel d’augmentation continue des rendements. Même en bio. Aujourd’hui, quand je vois que la grande distribution commence à communiquer sur des prix et des produits bio à 1 euro, c’est effrayant ! Je me dis qu’il y a un problème.

 

Comment avez-vous vécu la baisse des rendements sur votre exploitation ?

La baisse de mes rendements ne m’a pas choqué. Pour certains, ils ont baissé de 30 à 40%, le blé par exemple. Aujourd’hui, je suis entre 30 et 40 quintaux à l’hectare pour le blé et entre 40 et 50 quintaux hectares sur les autres cultures. J’ai déjà vécu une année de non récolte sur une parcelle ! J’ai aussi vécu un rendement de 5 quintaux à l’hectare sur du blé noir : j’ai arrêté d’en faire. Je pense que mes rotations n’étaient pas adaptées. J’ai été tenté de faire du chanvre, à la place, et puis finalement je vais reprendre le risque de tenter du blé noir. Globalement, la baisse des rendements ne me pose pas le problème car la rémunération permet d’obtenir de meilleures marges à l’hectare qu’avant.

 

Quels conseils donneriez-vous à un candidat à la conversion ?

Il faut essayer de voir et de rencontrer des producteurs sur le terrain qui sont déjà en bio. Pour voir comment ils font. C’est comme ça que l’on apprend le plus : voir comment les bio travaillent et font. Le suivi qui est proposé par le groupement d’agriculteurs bio de mon département peut aussi être utile car il permet d’obtenir des conseils. Les techniciens sont aussi un bon relais pour voir ce qui se fait sur le terrain et faire passer la pratique. Il faut aussi accepter qu’il y ait des accidents car on ne peut pas tout maîtriser. Ça fait partie des choses qui arrivent en bio. Une fois, j’ai eu un tracteur entier de brocolis de refusé car il y avait des chenilles… Et puis, il faut être bricoleur car, en bio, c’est important de pouvoir adapter son matériel. J’avais déjà une bineuse et j’ai gardé le même matériel pour le travail du sol et le semis.

Comment votre temps de travail a-t-il été impacté par la conversion ?

Je n’ai pas l’impression d’avoir vraiment plus de travail qu’avant. C’est sûr que l’on passe plus de temps que le désherbage par rapport à l’utilisation du pulvé. Mais il y a moins de passages. En fait le temps de travail augmente parce que les travaux prennent plus de temps. Et puis, il faut plus anticiper. En conventionnel, on a souvent une solution de rattrapage, pas en bio. Et c’est toujours dur de voir une culture rater. Mais ça peut toujours arriver car on ne maîtrise pas la météo !

Comment vous êtes-vous armés pour la maîtrise des adventices ?

J’ai suivi une ou deux sessions de formation et je me suis surtout formé sur le tas en rencontrant d’autres agriculteurs. Je me suis aussi formé sur la herse étrille et la bineuse. Les démonstrations sont très bien pour ça, ça permet de se faire une idée. Ensuite, on essaie soi-même. Là, je vais essayer, par exemple, le binage sur céréales. Il faut essayer de nouvelles choses.
Quand on convertit son exploitation à la bio, on se pose beaucoup de questions et on n’a pas toujours de réponse. C’est pourquoi, les autres agriculteurs ou la présence de bons techniciens sur le terrain sont essentielles. Malheureusement, nous ne sommes pas nombreux en bio sur mon secteur, ce n’est pas facile pour échanger.

 

Le ZOOM technique : Quel a été pour vous le point technique le plus important à maîtriser en bio ?

La maîtrise du désherbage dans les cultures est vraiment importante. Il y a encore du travail à faire pour faire évoluer les outils de désherbage. La lutte contre les maladies est aussi importante. Il faut aussi envisager que s’il y a une limitation future de la bouillie bordelaise, il va falloir trouver autre chose d’efficace pour les pommes de terre. En général, la protection des cultures est fondamentale et on ne peut pas tout résoudre et tout tester nous-mêmes. C’est là que la recherche et l’expérimentation en bio deviennent importantes.

 

Interview réalisée par Virginie Jourdan, de la Frab.

 

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www.agrobio-bretagne.org/

 




Diversifier son alimentation en achetant bio, c’est possible !


Diversifier son alimentation en achetant Bio, c… par BD_info

 

 

A voir aussi

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www.interbiobretagne.asso.fr

 

 




« Les fonds marins bretons sont aussi colorés que dans les tropiques ! »

En quoi consiste le métier de plongeur scientifique ?

La plongée scientifique est un outil qui permet de prélever des animaux, des plantes, pour des études scientifiques. Mais cela sert aussi à implanter des outils de mesure qui permettent de donner des informations sur l’environnement marin : des courantomètres, des houlographes, des appareils de mesure d’oxygène…Toute sorte d’outils utilisés aussi bien en chimie qu’en biologie.

Qu’est-ce-qui vous a donné envie de faire ce métier ?

L’envie de travailler sous l’eau ! Et ce, depuis tout petit. J’ai toujours été à l’aise dans l’eau, et ça m’a rapidement plu de travailler en milieu aquatique. Peut-être parce qu’on est un peu seul, et qu’on n’a personne au dessus de son épaule qui surveille…Et l’univers marin est tellement passionnant !
Au départ, je ne voulais pas forcément exercer dans le milieu scientifique, mais j’ai fait le tour de toutes les domaines où il est possible de plonger : le milieu militaire, celui des travaux publics, de l’animation dans des bassins…Et la plongée que je fais actuellement dans le cadre du CNRS me comble car les tâches sont très variées.

 
Quels sont les liens entre la protection de la biodiversité et le fait d’être plongeur scientifique ?

Il y a des études auxquelles on participe qui sont utiles pour définir une « carte » d’un milieu, savoir si il est riche, appauvri, détruit…On y participe par la plongée, par la prise d’images, des prélèvements…C’est le côté « technique ».
Nous collaborons aussi avec toutes les tutelles de protection de l’environnement en France, que ce soit l’agence des aires marines protégées, les parcs naturels marins, les réserves naturelles, notamment en Bretagne. La plongée scientifique sert alors soit à illustrer, soit à prélever, soit à avoir un regard précis sur cette biodiversité marine, notamment bretonne.

 
 
Justement, quel regard portez-vous sur les fonds marins bretons ?

On considère souvent l’eau bretonne comme austère, un peu verte et de fait, glauque…mais finalement quand on prend le temps de bien regarder, on s’aperçoit que les fonds marins bretons sont particulièrement colorés. Autant que les milieux tropicaux ! Il y a beaucoup de choses à y découvrir. Je m’y attelle, j’essaie de montrer qu’ils sont très intéressants à explorer.

 
Quelle est la chose la plus extraordinaire qui vous ayez observé en plongeant ?

Il y a des endroits qui me font toujours rêver, notamment l’Antartique. C’est un endroit exotique, très coloré. L’agencement des espèces y est complètement différent. Souvent, on a des «schémas-type », on sait qu’on va retrouver des reliefs avec une répartition précise d’animaux. Mais en Antartique, c’est comme si on remettait les compteurs à zéro. C’est une autre planète ! On ne s’y sent pas à sa place, c’est tellement froid et dur de plonger là-bas que tout devient extraordinaire.
L’autre endroit qui me fait rêver est en Papouasie, côté Indonésien. Il y a là-bas aussi une biodiversité d’une richesse incroyable.

 

 

 

           

 




Force 5 : « on espère avoir du poids ! »

Jean-Yves Quéméneur est président de l’association Force 5, il revient sur l’historique du projet d’extraction de sable sur le plateau des Duons.

« L’associations Force 5 se félicite de la décision des juges du Tribunal administratif de Rennes du 29 juin 2012 concernant l’arrêté préfectoral du 30 décembre 2009. Entre temps, un décret ministériel du 19 juillet 2011 signé par le Premier ministre François Fillon, le ministre de l’industrie Eric Besson et par le ministre du Budget François Barouin, accordait un titre minier à la Compagnie Armoricaine de Navigation (CAN). Ce décret est contesté par notre association au Conseil d’Etat. Ensuite, le Préfet du Finistère, P. Mailhos, a établi 2 arrêtés préfectoraux les 20 et 21 octobre 2011 autorisant la CAN à reprendre les extractions de sable coquillier. Ces deux arrêtés sont contestés au Tribunal administratif de Rennes, avec l’appui de l’avocat Me Leclercq. Suite à une décision de la commission de suivi scientifique du 13 janvier 2012, en application des arrêtés, Force 5 a appris par le directeur général de la CAN, Sébastien Floch que les extractions de sable coquillier reprenaient le 20 janvier 2012. »

« Beaucoup d’espèces pourraient être impactées »

Pour Jean-Yves Quéméneur, président de Force 5, « Le plateau des Duons est une zone Natura 2000 qui comporte de nombreux bars et lançons. L’extraction va entrainer des turpitudes et panaches dans les fonds marins. » Yves-Marie Le Lay nous parlait des risques de l’extraction de sable il y a quelques mois, concernant le projet en baie de Lannion, à Trébeurden : « Si le projet est mené à terme, beaucoup d’espèces seront affectées. L’extraction de sable si près des côtes entraîne un risque de turbidité : des éléments fins seront rejetés après aspiration par le bateau, et diffusés tout autour. Les fonds-marins risquent ainsi d’être détruits. Des ilots rocheux vont eux-aussi être recouverts de ces sédiments. L’impact économique n’est pas non plus négligeable, l’activité sous-marine comme la plongée est clairement menacée. »

 

Plus web :

3000 personnes contre l’extraction de sable à Trébeurden

A lire aussi

www.nordbretagne.fr/Force-5-Dix-annees-d-actions-sur-les-61-communes-du-Pays-de-Morlaix_a1690.html

 

 

                      




Biodiversité: «  Il faut agir au plus vite ! »

1,9 million d’espèces recensées. Et un taux de disparition de celles-ci actuellement supérieur de 100 à 1000 fois le niveau moyen estimé par le passé. Soit environ 1000 espèces en moins chaque année ! De quoi faire frémir et inciter à l’action les chercheurs, tel Gilles Boeuf, Président du Muséum national d’histoire naturelle (Mnhn). Pour ce scientifique de renommée mondiale et auteur de nombreuses publications, « c’est pour la première fois dans l’histoire de l’Humanité, que ces disparitions sont imputables à l’homme. Nous sommes d’ailleurs une soixantaine de spécialistes de la biodiversité qui venons de lancer un appel au Président Sarkozy afin de l’alerter des menaces qui pèsent sur notre planète, et de lui proposer des réponses qu’il conviendrait d’apporter à celles-ci car actuellement nous les jugeons trop timides», juge Gilles Boeuf.

Replacer l’homme au centre de la nature

La biodiversité, contrairement à ce que l’on pense, ne se limite pas au comptage des espèces. Pour Gilles Boeuf, c’est avant tout « une science : celle de toutes les relations établies entre les être vivants, avec leur environnement ».
La biodiversité est aujourd’hui menacée « par les destruction d’écosystèmes, la surexploitation des ressources, les espèces invasives, le changement climatique… » énumère le président du Muséum d’Histoire Naturelle.
Il clame qu’ « il faut convaincre aujourd’hui la société que nous avons besoin de cette biodiversité. Et abandonner la conception traditionnelle qui consiste à dire que la nature se situe à l’écart des hommes ! Lui n’en est pas extérieur, il en fait partie ».
Stopper l’érosion de la biodiversité est également nécessaire pour des raisons économiques : « les biotechnologies, la pharmacie, la cosmétologie, sont des domaines qui ont besoin que la diversité des espèces vivantes soit maintenue », précise encore Gilles Boeuf. Pour la santé, c’est également un enjeu extrêmement important : « une biodiversité érodée laissera le champ libre au développement d’espèces opportunistes », prévient le scientifique.

Politiques et citoyens peuvent agir

Quelles peuvent être les solutions face à ce constat alarmant ? La sixième grande extinction est en cours, « depuis 1850 », précise Gilles Boeuf. Mais on peut encore agir, tempère-t-il. «  L’important est de réconcilier économie et écologie. Il faut encore taxer ou interdire, les activités humaines qui entrainent l’exploitation voire la disparition des écosystèmes. Si on protège les milieux, on protégera les espèces ! », déclare Gilles Bœuf, qui pense « à la disparition de la forêt tropicale, et même, pour parler de disparition d’espèces, de la pêche au thon rouge ». Il faudrait alors «  une réflexion globale sur l’impact des activités humaines sur ces écosystèmes ».  Le monde politique invité à agir, mais aussi les citoyens (voir encadré). Un inventaire de la biodiversité des communes françaises va bientôt être lancé auprès des collectivités, « il faut initier des choses ! » s’enthousiasme Gilles Boeuf, « que les citoyens apportent leur pierre à l’édifice ! Et repenser le système dans lequel on vit ; ceci, avec tout le monde. Place au partage et à l’action », conclut-il.

Le SPIPOLL

Après le comptage des papillons dans les jardins ou encore celui des escargots, le Museum d’Histoire Naturelle de Paris propose avec le Ministère de l’Écologie une nouvelle opération participative nommée « SPIPOLL » (Suivi Photographique des Insectes Pollinisateurs). Le principe : devenir un « paparazzi » et traquer grâce à un appareil photo numérique les insectes pollinisateurs du jardin. Ouvert à tous, cette opération permettra de constituer des collections de clichés accessibles en ligne. Les informations récoltées, couplées à des données climatiques ou de typologie d’habitat et d’occupation des sols, permettront par la suite la construction des indicateurs et des scénarios de biodiversité, ou bien encore l’aide à la prise de décision pour l’aménagement du territoire.

Plus d’infos

www.spipoll.fr




Il tisse leurs toiles

Bruno Mével s’intéresse de près, de très près même aux minuscules gouttes d’eau suspendues sur les toiles d’araignées « comparables aux mandalas indiens, ces motifs avec des figures géométriques qui sont utilisées pour la méditation chez les hindous » raconte le photographe poète. Il s’agit, avec ces photos, de « découvrir différentes textures, lignes, motifs, que l’on peut voir régulièrement dans la nature, quelquechose de commun ». Depuis son adolescence, Bruno Mével est un passionné de photographie. L’idée d’immortaliser des toiles d’araignées lui est venue un matin, en découvrant l’effet étonnant que pouvaient provoquer les gouttes d’eau sur celles-ci. Un travail d’image, qui au delà de l’esthétisme, exprime un lien avec l’écologie selon lui : «Tout cela nous ramène à l’instant présent. Il faut regarder ce qu’il y a autour de nous. Ca, c’est la base de l’écologie, il faut déjà s’occuper de ce qui se passe près de nous. Et pour cela, il faut juste prendre le temps de s’arrêter et de contemple pour s’émerveiller! ».

Plus d’infos : exposition de Bruno Mével, au Bar le Tempo à Morlaix, du lundi 1er mars au vendredi 5 mars. Entrée gratuite. Tout le programme du festival Li’Voir disponible ici