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Semer des graines pour cultiver nos humanités

Le monopole des semences et de l’agriculture est aux mains de grandes multinationales, ces mêmes grosses firmes qui tentent d’imposer des OGM qui ne disent pas leur nom.

Ce mois-ci (24 janvier) l’UE s’apprête à faire voter une déréglementation totale des nouveaux OGM, les Nouvelles Techniques Génomiques. Ces NTG recouvrent un champ de plus en plus étendu de biotechnologies, et leurs promoteurs veulent les faire échapper à la réglementation européenne en affirmant qu’elles sont sans danger puisqu’elles permettraient de « modifier des séquences génétiques sans introduire de gène étranger dans le génome ». Si cette déréglementation est votée, si ces NTG sont validées, plus rien n’avertirait le consommateur, ni l’apiculteur, de la présence d’organismes modifiés. Et rien ne permet de dire que l’éventualité de leur diffusion dans la nature serait sans effeti.

A l’opposé de ces firmes aux projets fondés sur les biotechnologies, des citoyens, des agriculteurs , de syndicats ou coopératives œuvrent à maintenir l’accès libre aux graines et semences, à leur usage, et à retrouver la diversité plus large qu’elles offrent. Parmi ces coopératives, et en Bretagne, Graines de Liberté – Hadoù ar Frankiz.

 

Graines de Liberté – Hadoù ar Frankiz

Graines de Liberté est à l’origine une association qui rassemble des maraîcher.ères, des céréalier.ères, des pépiniéristes, des éleveurs-éleveuses, des chercheurs-chercheuses, des détaillant.es, des artistes, des habitant.es et amateurs-amatrices de jardins. Cette association est ensuite devenue SCIC, une société coopérative d‘intérêt collectif. Son objet social est de promouvoir l’usage, la production et le travail de sélection de semences « variétés-populations » en Bretagne, et de contribuer à la reconnaissance du métier d’artisan semencier. Il s’agit aussi de considérer les semences de variétés populations comme des biens communs, libres de droit, et à pollinisation libre. L’entreprise basée à Quimper, est jeune. Son idéal n’est rien moins que ce qu’indique son nom : la liberté de promouvoir, proposer, retrouver, travailler à un autre rapport à l’agriculture, et à l’alimentation. De reconsidérer aussi ce qu’est fondamentalement la graine : une puissance en soi qu’un vent libre, qu’un geste libre, transporte et dépose à l’endroit précis où sa force pourra se redéployer et s’adapter. Et cela dans un cycle en théorie éternel. On a tendance à l’oublier. La devise de Graines de Liberté – Hadou ar Frankiz, « Des graines pour cultiver nos humanités » peut intriguer ; mieux (c’est ce qu’elle cherche à faire) elle peut nous interpeller : le jeu sur les mots est on ne peut plus sérieux. Sans doute nous appelle-t-on à la réflexion sur les liens nature-culture en une modernité qui semble vouer un culte à la technologie, c’est-à-dire à elle-même. Et qui oublie ce qui la constitue aussi : le partage des savoirs, la transmission dans le temps, la sagesse qu’il y a à regarder la nature dans ce qu’elle a de stupéfiant : la graine et sa puissance de vie.

« Mais ils avaient la poignée de graines dans leur poing et la graine a une force électrique qui traverse les peaux les plus coriaces et illumine les cœurs les plus sauvages ».

Jean Giono, Que ma joie demeure .

Crédit : Laurent Vanhelle

 

 

Les semences Variétés-populations contre les semences Hybrides F1

Les semences de variétés-populations (ou semences paysannes) sont l’origine de l’agriculture. Les pratiques des agriculteurs ont consisté jusqu’au XXe siècle à choisir une part de leur récolte pour en prélever les graines afin de réensemencer les champs l’année suivante, sélectionnant ces plantes appelées à devenir porte-graines en fonction de leur capacité à s’adapter à un climat, à un milieu, à un territoire, à l’évolution des goûts.

Au XXe siècle, à partir des pays industrialisés, ces semences ont été progressivement remplacées par des semences élaborées en laboratoire pour améliorer la productivité des récoltes et répondre à des exigences industrielles – de rendement, de stockage, de livraison, etc : ce sont les semences dites hybrides F1 en majorité. Ces semences hybrides F1 engendrent des plantes toutes identiques entre elles, homogénéité qui concerne les aspects physiques : taille, forme, couleur des fleurs, goût des fruits etc. Mais elles ont un défaut de taille : si un agriculteur les ressème l’année suivante, la productivité diminue, la plante dégénère et perd ses caractéristiques initiales. Le cultivateur doit donc racheter des semences ou des plants à chaque saison, ce qui conduit à l’érosion de la biodiversité et à la standardisation de l’alimentation, à un appauvrissement du vivant, mais un enrichissement conséquent des « big four », ces grands semenciers que sont Bayer-Monsanto, Corteva, Syngenta et BASF. Cette obsession de l’homogénéité dans la sélection variétale, obtenue par le contrôle de la sexualité et la consanguinité des plantes en vue d’obtenir la « lignée pure » d’une variété, a donc pour conséquence une érosion vertigineuse de la biodiversité cultivée.

Qui connaît encore les Blés poulards ? Ils ont été à la base de la production des pâtes et des biscuits au Nord de l’Europe avant l’importation au XXe siècle des blés durs du sud. C’est une céréale à redécouvrir.

« Si on avait fait du blé de notre race, du blé habitué à la fantaisie de notre terre et de notre saison, il aurait peut-être résisté. Tu sais l’orage couche le blé ; bon, une fois. Faut pas croire que la plante ça raisonne pas. Ça se dit : bon on va se renforcer, et, petit à petit, ça se durcit la tige et ça tient debout à la fin, malgré les orages. Ça s’est mis au pas. »

Jean Giono, Regain – 1930.

http://informations-documents.com

Des Graines d’un Paris et d’une Bretagne d’avenir

Avant Graines de liberté, il y avait eu la campagne Graines d’un Paris d’avenir, joli nom à tiroirs pour raconter la première aventure des graines libres sur le territoire parisien : douze variétés populations issues du patrimoine alimentaire avaient pu être réintroduites, à la place des fameuses F1 ou autres CMSi. Cette opération était portée par l’association Mingaii, par l’Alliance des cuisiniers de SlowFood en Franceiii, et l’OPASE, organisation professionnelle des artisans semenciers. Ont pu être ainsi recultivés l’oignon jaune paille des Vertus, le poireau de Gennevilliers, le chou de Milan de Pontoise, la betterave crapaudine, la laitue batavia blonde de Paris, et quelques autres légumes oubliés.

Le pari suivant, Graines d’une Bretagne d’avenir, est lui aussi le fruit d’un partenariat, qui regroupait Minga, l’Alliance SlowFood des cuisiniers, le Groupement des agriculteurs biologiques du Finistère et le Syndicat des artisans semenciers grâce auxquels ont pu être remis sur les étals le melon petit gris de Rennes, la tomate précoce de Kemper, l’avoine panache de Daoulas, et le fameux piment de la frite ar Faouiv (jolie histoire que celle de cette « frite ») !

De Graines d’une Bretagne d’avenir à «Graines de liberté – Hadoù ar frankiz»

La création en 2019 de l’association Graines de Liberté a été suivie de sa transformation en société coopérative d’intérêt collectif qui regroupe 17 producteurs bretons associés, le siège social est à Quimper. Elle travaille avec des chercheuses de l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) en remettant en culture des variétés anciennes. À la base de ces filières, ces semences sont essentielles pour développer une alimentation moins riche en viande, plus nutritive, plus goûteuse et plus accessible. Comme l’indique leur présentation : « La promotion de semences de variétés populations et la reconnaissance du métier d’artisan semencier sont indissociables de la bataille contre les anciens et nouveaux OGM, contre l’artificialisation et la privatisation du vivant. Parce que c’est un enjeu de territoire, le développement de la production de ces semences est aussi étroitement lié au renforcement des services public en milieu rural. Parce que la semence de variétés populations est un bien commun qui nous permet de mieux comprendre notre rapport aux autres espèces vivantes, la promotion du métier d’artisan semencier a besoin d’une recherche publique indépendante. » C’est donc bien un projet politique, au sens noble du mot, c’est-à-dire qui concerne la vie, dans la Cité, des individus et de leurs biens communs.

Un savoir, un savoir-faire : un métier

Le travail d’un artisan-semencier  est fondamental : il consiste à suivre de près la vie des plantes, jusqu’au moment de la récolte des graines, et à appliquer alors les protocoles stricts nécessaires pour les sécher, trier, tester, conserver, ensacher, commercialiser. L’artisan semencier détient et met en œuvre un savoir-faire qui lui permet d’accompagner le développement de populations de végétaux sur leur cycle complet, de la graine à la graine selon un mode de culture inscrit dans un écosystème. L’artisan-semencier est un chercheur producteur de biens communs mais il affronte ces nouvelles formes d’enclosuresv que représente aujourd’hui la privatisation des gènes via la production de brevets, le tout sous la pression des financeurs.

Les deux campagne qui ont précédé Graines de Liberté promouvaient l’usage des semences variétés-populations auprès des maraîchers, des jardiniers, des paysagistes ; la reconnaissance des qualités des légumes qui en sont issus auprès des cuisiniers, des transformateurs, des épiciers, des mangeurs ; la création d’un catalogue de semences produites en Bretagne, issues de la diversité des sols, des goûts, des modes de culture, des climats et des écosystèmes du territoire ; la reconnaissance du métier d’artisan semencier dans le respect de tous les travailleurs des filières alimentaires, et la création d’établissements coopératifs d’artisans semenciers en Bretagne.

Une première collection de 15 variétés de légumes et céréales a été mise au point, qu’on peut découvrir dans un livre édité par Locus Solus (Graines d’une Bretagne d’avenir). Cette collection s’est depuis bien agrandie et dispose d’un stock de 80 variétés, disponibles sur le marché de Quimper, et dans de nombreux points de vente (voir la liste plus bas) mais aussi dans des librairies indépendantes.

«  Nous avons été trop longtemps gouvernés par l’uniformité, et l’uniformité est un indicateur du fascisme. Nous devons maintenant nous orienter vers la célébration de la diversité, symbole de liberté. Ensuite, vous pouvez agir à votre échelle : même avec un petit pot de plante dans votre salon. Un basilic, un romarin, peu importe… Sauvez cette graine et sa liberté. Et en sauvant sa liberté, sauvez la vôtre ».

Vandana Shivai

Il s’agit d’essaimer … et de disposer d’un capital qui permette la production, la diffusion, l’information, et la formation.

Les mots choisis pour la communication de Graines de liberté l’indiquent assez, on ne peut pas privatiser une graine, sauf à s’accaparer l’avenir et la vie . Graines d’un Paris d’avenir, d’une Bretagne d’avenir, Hadoù ar Frankiz : la semence reste un bien commun libre, et prépare ou assure en quelque sorte l’avenir dans un contexte et en un temps où il peut paraître redoutable à bien des égards.

Il faut ainsi encourager sa diffusion, et pour cela, transmettre les expériences et réalisations convaincantes, comme à Penmarc’h par exemple. La ville a signé une convention de partenariat avec la SCIC Graines de liberté. « Les jardiniers municipaux expérimentent les semences de Graines de liberté à la serre municipale depuis maintenant deux ans. L’idée est de “sélectionner des variétés adaptées au climat et à la terre, de retrouver des semences dites “population” ou paysannes qui s’adaptent et qui résistent plus facilement que les plants hybrides F1” »

Et l’expérience rencontre un succès certain auprès de la population. Elle s’adresse aussi aux enfants des écoles avec lesquels sont menés des ateliers autour de la graine, et du semis (par ex la luffa qui fournira de belles éponges écologiques et efficaces).

 

Crédit : Laurent Vanhelle

 

 

La communication de Graines de liberté – Hadoù ar Frankiz – le partage des informations et des principes fondateurs – se fait aussi, peut-être avant tout, par les choix graphiques et d’images particulièrement esthétiques. C’est tout le talent du graphiste Laurent Vanhelle, partenaire indispensable de Graines de Liberté  de savoir transmettre le message par des réalisations aux lignes et signes clairement évocateurs, et d’inscrire ainsi le message de Graines de Liberté dans la liaison toute philosophique qu’il a avec le beau-et-bon – le « kalos kagathos » – des Grecs anciens.

Soutenir Graines de Liberté – Hadoù ar Frankiz

On trouvera ici la liste de points de vente où trouver les sachets de graines

https://www.grainesdeliberte.coop/qui-sommes-nous-/nos-points-de-vente/

Pour pérenniser le projet, la SCIC a besoin de capitaux afin de valoriser le travail de celles et ceux qui produisent et sélectionnent ces semences.
Tous les renseignements sont sur https://www.grainesdeliberte.coop/qui-sommes-nous-/

 

 


 

« Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y ait pas de modification génétique : des gènes peuvent être ainsi « allumés » ou « éteints », « suractivés » ou « effacés », ce qui en fait bien des OGM, comme l’avait jugé la Cour de justice de l’Union européenne dans un arrêt du 25 juillet 2018. Mais l’oligopole de l’agrochimie, Bayer-Monsanto, Corteva, Syngenta et BASF, les « Big Four » des semences, ainsi que les syndicats agricoles productivistes comme la FNSEA sont montés au créneau dès cet arrêt, avec la rhétorique habituelle : « résoudre le problème de la faim dans le monde » et « adapter les variétés végétales à des conditions climatiques de plus en plus difficiles ». Les dangers sont immenses. Tout d’abord, les consommateurs ne pourront plus savoir ce qu’ils mangent, et les labels AB, AOC, AOP, etc. n’auront plus aucun contenu. Ensuite, la dispersion de ces NTG dans la nature est irréversible, et ses effets sur la biodiversité complètement inconnus. Enfin, les OGM-NTG relèvent du droit des brevets : les « Big Four » pourront ainsi s’approprier la base de la chaîne alimentaire mondiale. Il est urgent d’arrêter cette catastrophe annoncée » Hélène Tordjman, dans Politis, le 10 janvier 2024

ii. CMS : La stérilité mâle cytoplasmique est un phénomène que l’on trouve à l’état naturel chez certaines plantes(betterave, carotte, oignon, orge, panais, tabac, radis notamment) : quelques individus d’une population sont mâles stériles. Cette aptitude peut être transférée chez une espèce ne la possédant pas naturellement via la fusion entre deux cellules.

iii. Cf https://minga.net/

 

Iv. Cf https://slowfood.fr/alliance-slow-food-cuisiniers-france/

 

V.. Le piment de la Frite ar Faou, symbole de la collection « Graines d’une Bretagne d’avenir » est un piment ramassé un jour en pays basque par Tonton Roger (dit « la frite ») qui  depuis 1970, le fait se reproduire et s’acclimater à Châteauneuf du Faou.

Vi. Terme anglais désignant la clôture d’une terre et, par extension, l’évolution qui, à partir du XVIIe siècle, conduisit à la privatisation des terres communales, provoquant du même coup la paupérisation d’une masse de paysans sans terre, dont les animaux se nourrissaient dans ces pâtures communes. Marx a fait des enclosures le début de la prolétarisation qui a permis à la révolution industrielle naissante de trouver sans difficulté la main-d’oeuvre bon marché et exploitée dont le capitalisme avait besoin.

 

Vii. https://www.plantes-et-sante.fr/articles/rencontres/223-vandana-shiva-sauver-les-grainescest-sauver-notre-liberte

 


A noter : Graines de Liberté organise une rencontre/réunion d’information le mardi 5 mars à 14h, à La Ronce, herboristerie-café, à Rostrenen




La loi française face au changement climatique

Face à l’urgence climatique et écologique, la France s’est fixé des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, qui passent par plusieurs stratégies et engagements, qui ne cessent d’évoluer.

Alors que le premier programme de lutte contre le changement climatique date de l’an 2000, le contexte législatif français s’est progressivement étoffé jusqu’à parvenir à un ensemble de lois dont la plupart ont été votées dans la seconde moitié des années 2010.

Deux d’entre elles se traduisent par des objectifs chiffrés : la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015 et la loi climat-énergie de 2019.

La première prévoit de diviser par deux la consommation énergétique finale en 2050 par rapport à l’année de référence 2012, en visant un objectif intermédiaire de 20 % en 2030.

La seconde inscrit l’urgence écologique et climatique dans le code de l’énergie, et vise la neutralité carbone en 2050. Cela signifie qu’à cette date, il faudra que la quantité de gaz à effet de serre engendrée du fait de l’Homme soit égale à celle absorbée par des puits de carbone ; l’objectif étant d’arriver à un total de 0 émission nette. Cette loi climat-énergie se décline en 2 principaux outils : la stratégie nationale bas carbone et la programmation pluriannuelle de l’énergie, qui définissent les grandes lignes des politiques transversales et sectorielles ainsi que les actions prioritaires à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre à moyen et long terme. C’est à cette loi que nous devons l’objectif des 33 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici à 2030.

Faisant suite à la loi ELAN de 2018, le décret tertiaire impose quant à lui aux gestionnaires de bâtiments tertiaires de plus de 1000m² de réaliser des économies d’énergie, avec un objectif de 60 % d’économie à l’horizon 2050.

Enfin, la loi Climat et résilience de 2021 traduit une partie des 146 propositions de la Convention citoyenne pour le climat pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici 2030, dans un esprit de justice sociale. On peut néanmoins souligner cette loi est majoritairement perçue comme peu ambitieuse par rapport aux propositions initialement faites par le collectif citoyen. Des avis défavorables ont été émis par plusieurs instances, à commencer par Le Haut conseil pour le climat ou la Convention citoyenne pour le climat elle-même.

Cet ensemble de textes est celui qui définit le contexte législatif français et qui permet aux différents acteurs de la société, à commencer par les collectivités, de mener le cap vers la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique.

L’agence locale de l’énergie et du climat HEOL œuvre pour la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique en Pays de Morlaix. Elle offre notamment des conseils neutres et gratuits sur la rénovation thermique, les énergies renouvelables et les économies d’énergie. Plus d’infos sur 02 98 15 18 08 et www.heol-energies.org .




Les réseaux de chaleur pour la transition énergétique des collectivités

Eléments clés de la transition énergétique, les réseaux de chaleur sont des installations généralement portées par des collectivités ou des entreprises. Ils sont composés d’une ou plusieurs chaufferies, qui produisent de l’eau chaude et l’acheminent jusqu’aux bâtiments proches géographiquement via un réseau de canalisations dédié, afin d’en assurer le chauffage et / ou l’eau chaude sanitaire.

L’intérêt de ces réseaux locaux est qu’ils peuvent fonctionner à partir de plusieurs sources énergies, en fonction des besoins identifiés au préalable et des ressources disponibles localement, comme par exemple le biogaz, le soleil, les déchets ou encore le bois, livré sous forme de bûches, plaquettes ou granulés.

Ces réseaux de chaleur ont de nombreux atouts : ils contribuent à l’économie locale, avec la mobilisation de ressources proches et une maintenance nécessairement réalisée in situ ; ils participent à l’indépendance énergétique, évitant ainsi de subir les aléas géopolitiques mondiaux ; ils répondent aux objectifs de développement des énergies renouvelables auxquels le pays est soumis (rappelons que la France s’est engagée à atteindre les 33 % d’énergies renouvelables dans son mix énergétique en 2030, et qu’elles atteignaient seulement 19,1 % en 2020, selon le ministère de la transition écologique).

Selon l’Ademe, la France compte 833 réseaux de chaleur répartis sur le territoire. S’ils sont encore majoritairement situés dans les grands centres urbains, ils se développent aussi fortement dans les régions rurales. En Pays de Morlaix par exemple, une dizaine de réseaux de chauffage au bois ont fleuri ces dernières années dans les communes de Garlan, Pleyber-Christ, Plougonven, Guiclan, Plouezoc’h, Lanmeur, etc. où ces derniers alimentent les bâtiments publics comme les mairies, écoles et salles multifonctions. Quand elles le peuvent, les communes profitent de l’installation pour revendre de la chaleur aux tiers qui se trouvent à proximité.

Le réseau de chaleur récemment inauguré par la communauté d’agglomération de Morlaix Communauté alimente par exemple les locaux de la collectivité mais aussi le centre culturel du SEW, les locaux du quotidien Le Télégramme, l’auberge de jeunesse, ainsi que quelques logements résidentiels situés à proximité. Cela permet à la fois de rentabiliser les coûts d’installation et de fonctionnement, et de faire profiter aux riverains des avantages d’une installation fiable et confortable.

Les réseaux de chaleur sont donc un formidable outil au service de la transition énergétique des collectivités. C’est dans ce sens qu’il existe des dispositifs d’aides intéressants, comme le « fonds chaleur » de l’Ademe qui permet de financer jusqu’à 60 % de leur coût d’installation.

L’agence locale de l’énergie et du climat HEOL œuvre pour la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique en Pays de Morlaix. Elle offre notamment des conseils neutres et gratuits sur la rénovation thermique, les énergies renouvelables et les économies d’énergie. Plus d’infos sur 02 98 15 18 08 et www.heol-energies.org .




La pétition citoyenne pour une convention Penfeld ouverte par la ville de Brest

(Plume Citoyenne) La ville de Brest vient de prendre en compte la pétition proposée par l’association Rue de Penfeld en vue d’un débat au conseil municipal, lorsque 2 000 signatures sont recueillies. Rue de Penfeld demande un débat citoyen sur le partage de l’usage des rives de la Penfeld, rivière au cœur de la ville à Brest en proposant à la ville d’organiser une Convention Citoyenne Penfeld. Marif et Pierre-Yves nous présentent cette démarche de pétition citoyenne et le contexte de la demande de convention.

La pétition citoyenne peut être signée en ligne ou dans l’une des mairies de quartier.

Bonjour Marif , Pierre Yves, pouvez-vous vous présenter rapidement et nous dire ce qu’est l’association Rue de Penfeld ?

Je m’appelle Marif Loussouarn. Rue de Penfeld, est une vieille association, créée en 1992 sur la thématique de l’ouverture de la Penfeld, rivière au coeur de la ville à Brest sous emprise de la marine et qui pourrait s’ouvrir beaucoup plus aux civils qu’elle ne le fait.

Je m’appelle Pierre-Yves Brouxel et je fais aussi partie de rue de Penfeld depuis près de 30 ans. A certains moments, cela a avancé : Fêtes maritimes de Brest 92, le port du Château, les Capucins, et d’autres où ça a stagné. Depuis les dernières élections municipales, on remet le sujet sur la table parce que c’est un enjeu d’avenir pour la ville de Brest avec les multiples opportunités d »accès aux rives de la Penfeld.

Pourquoi une convention citoyenne ? Qu’est- ce que vous pouvez en attendre ?

Une convention citoyenne, c’est quelque chose qui élargit le débat en associant davantage la société civile, les associations, les personnes qui s’intéressent à l’avenir de la ville. Sur ce territoire très particulier de la rivière en cœur de ville, ce débat qui fait sens à beaucoup de personnes. L’accompagnement citoyen peut permettre d’éclairer les possibles, de développer une synergie avec l’apport de personnes qui connaissent ces sujets, de se poser la question de quels terrains regagner, d’ouvrir la discussion avec la Marine nationale et les opérateurs de l’État.

Cela permettrait de donner à voir de façon plus vaste et avec des personnes différentes, une autre manière d’entrer dans ce sujet. L’idée est aussi que ce ne soit pas une petite association comme la nôtre qui se démène pour parler du sujet, mais d’élargir le plus possible et d’éclairer la population.

C’est aussi la confiance en ce que des citoyens mis en situation lors d’une convention sont capables de faire des propositions originales et pertinentes comme l’a démontré la convention citoyenne sur le climat.

Une convention, c’est aussi dépasser une forme d’opposition entre civil et militaire, Il ne s’agit nullement comme a pu le déclarer le Maire à la presse de « savoir comment expulser la Marine de la Penfeld », cela n’a jamais été dans nos intentions. On voit bien sur les réalisations comme les Capucins ou le port du Château, que la discussion fait émerger des projets et qu’il n’est pas question d’expulser, mais de construire de nouveaux espaces qui rencontrent un très grand succès.

C’est aussi dépasser l’opposition entre le maire et l’association et sortir de cette dualité en ouvrant plus largement. L’expérience avec le travail de l’architecte-urbaniste Paola Viganò sur le Plan-Guide Cœur de métropole  montre que lorsque l’on discute, quand on a des éclairages, on est tout à fait capable de donner des avis riches, intéressants qui permettent d’ouvrir et de sortir de ce blocage. Aujourd’hui, nos tentatives d’échanges avec la collectivité, ne marchent pas.

Quelles ont été les avancées dans cette ouverture de la Penfeld ?

Un élément déterminant a été la mise en place d’une commission Penfeld après un comité interministériel d’aménagement du territoire en 1998. Cette commission, présidée par le préfet, avec le préfet maritime, le maire de Brest et l’équipement, mais sans ouverture à la société civile, a permis l’ouverture du port du Château (auparavant yacht club de la marine nationale) et des Capucins (auparavant ateliers de la Direction des Constructions Navales.)

Au moment des municipales 2020, on a relancé l’ensemble des listes candidates pour connaître leurs propositions. Un an plus tard, on a écrit à la liste élue pour savoir qu’est-ce qu’elle allait faire, sans recevoir de réponse. Après, il y a eu l’épisode Covid et à mi- mandat, on relance la question un peu plus fermement puisque des engagements avaient été pris durant la campagne. Mais nous n’avons reçu aucun écho de la collectivité à nos sollicitations, sinon par l’intermédiaire de la presse.

Pourquoi cette pétition citoyenne et qu’est ce que ce dispositif ?

Face à ce blocage dans le dialogue, en cherchant comment mettre le sujet sur la table, on a pensé à utiliser l’outil de « pétition citoyenne » mis à disposition des habitants par la municipalité pour qu’un sujet soit mis à l’ordre du jour d’un conseil municipale de printemps.

La pétition citoyenne est un dispositif qui se déroule en trois étapes. :

  • Dans un premier temps une association dépose une pétition sur le site dédié « je participe » et les services municipaux ont deux mois pour juger de la recevabilité de la demande. La pétition a été déposée début septembre.

  • Si le principe est validé, ce qui vient de nous être signifié, l’association a quatre mois pour recueillir au moins 2 000 signatures de Brestois de plus de 16 ans. Et s’il y a plusieurs pétitions, les cinq premières sont sélectionnées.

  • Le maire peut alors mettre ces sujets en débat au Conseil municipal. C’est une proposition que le maire n’est pas obligé d’accepter.

Nous voulons utiliser ce dispositif pour élargir le débat auprès de la population sur l’ouverture et le partage de la Penfeld. Et, si on avait les deux mille signatures et que le maire ne souhaitait pas mettre ce sujet au Conseil municipal, ce serait malvenu pour ce dispositif et la participation citoyenne à Brest.

Vous avez commencé le recueil lors des journées du patrimoine, quel en a été l’accueil ?

On est intervenu une demi-journée rue Saint-Malo, lors des journées du patrimoine et on a eu beaucoup de monde avec plus d’une centaine de signatures. C’est un bon début et surtout, on a croisé beaucoup de personnes très intéressées par de nouveaux espaces pour la ville, ou qui découvraient le sujet et pensaient qu’il y avait beaucoup de choses à proposer. J’ai aussi le souvenir d’une action aux Capucins où on demandait aux personnes ce qu’était la Penfeld pour elles ; et dans les réponses, c’était souvent les étangs de Penfeld à Bellevue qui revenaient, mais pas du tout la rivière en centre-ville.

Quand une partie des personnes rencontrées allaient au terrain de la Madeleine qui, on ne sait pas pourquoi, s’était ouvert alors que c’est un terrain militaire, elles découvraient cet espace où se situe le monument historique du bâtiment au Lion et où il n’y a rien depuis des années. Le paradoxe est que ce monument n’était pas ouvert pour les Journées du patrimoine, alors qu’on pouvait visiter le bureau du préfet, des bateaux militaires, l’enceinte militaire, des souterrains militaires. Et pourtant il y a eu neuf millions d’euros de travaux, dont la moitié financée par le ministère de la Culture.

La convention citoyenne parle aux personnes parce qu’il y a eu celle sur le climat, connue pour ses propositions malgré les difficultés ensuite dans la mise en œuvre promise. C’est un sujet, un objet de démocratie que les gens se sont appropriés dans l’esprit et qui intéresse.

Et comme il y a déjà eu une convention citoyenne à Nantes et une autre à Rennes, c’est l’occasion à Brest de faire le triangle breton !

La pétition citoyenne : https://jeparticipe.brest.fr/project/petition-citoyenne/collect/deposez-vos-petitions/proposals/convention-penfeld

Rue de Penfeld : www.penfeld.net




Des visites à domicile pour lutter contre la précarité énergétique

Dans son étude « la précarité énergétique » menée en 2020, le ministère de la transition écologique estime qu’un ménage français sur dix souffre de précarité énergétique. Cela signifie que ces personnes ont des difficultés à « disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de leurs besoins élémentaires, en raison de l’inadaptation de leurs ressources ou de leurs conditions d’habitat ». Un chiffre qui a certainement augmenté suite à la crise énergétique que nous traversons ces dernières années.

Sont concernés les ménages qui rencontrent régulièrement des difficultés à honorer leurs factures d’énergie et d’eau ainsi que ceux qui se plaignent de souffrir du froid chez eux, à cause d’une mauvaise performance thermique de leur logement ou de la vétusté de leurs systèmes de chauffage. Une situation exacerbée par la flambée des coûts de l’énergie de ces dernières années !

Les conséquences de la précarité énergétique sont multiples : privations sur des budgets comme l’alimentation ou l’éducation, dégradation du bâti, problèmes de santé, risques d’incendie et d’intoxication au monoxyde de carbone, dégradation des relations avec le bailleur, isolement, etc.

Pour venir en aide à ces ménages, il existe divers accompagnements socio-techniques, comme les visites eau énergie, mises en place par une quarantaine de collectivités en France, dont le conseil départemental du Finistère. Pour en bénéficier, il faut être locataire ou propriétaire occupant et être éligible au plafond dérogatoire du fonds de solidarité pour le logement (FSL).

Les ménages peuvent alors bénéficier gratuitement d’un diagnostic technique incluant l’appréciation du bâti, l’analyse et conseils sur les équipements et questionnement sur les habitudes de consommation pour trouver des solutions personnalisées durables et adaptées. Selon les besoins, ils peuvent aussi recevoir des petits équipements, comme des rideaux isolants, mousseurs, bas de porte, ampoules LED, ou parfois même des subventions complémentaires pour le renouvellement d’équipements ou des travaux d’amélioration du logement.

Pour plus d’information les ménages concernés peuvent se renseigner auprès des CDAS du territoire ou des agences locales de l’énergie et du climat, qui sont habilitées à réaliser ces visites. Les parents, les proches, les voisin.es ou encore les associations d’aide aux personnes en difficulté peuvent aussi être de précieux donneurs d’alerte.

A lire aussi, le portrait que nous avons consacré à Nolwenn Ragel, chargée de mission précarité énergétique chez Heol, qui effectue justement des visites à domicile.

HEOL, l’agence locale de l’énergie et du climat du Pays de Morlaix, œuvre pour la transition énergétique et climatique en Pays de Morlaix. Elle offre notamment des conseils neutres et gratuits sur la rénovation thermique et les économies d’énergie. Plus d’infos sur 02 98 15 18 08 et www.heol-energies.org .




Quelles interactions entre innovation publique d’intérêt général et communs de la transition ? interview de Benoît Vallauri

Depuis 5 ans le Ti Lab à Rennes réunit des acteurs des collectivité locales et services autour d’innovation d’intérêt général. Aujourd’hui, les questions de la transition interpellent l’ensemble des politiques publiques, et des liens sont à construire entre cette innovation par les acteurs des services publics et les acteurs de la transition. Interview de Benoit Vallauri en introduction à la conférence atelier « Innovation publique et Transition », qui aura lieu le 17 novembre dans le cadre du Transiscothon à Quimper (29).

 

Peux-tu te présenter ainsi que le Ti Lab ?

Benoît Vallauri, je suis le responsable du Ti Lab. Avant d’être responsable du Ti Lab, j’ai commis pas mal de choses, dans la fonction publique ou sur d’autres terrains, qui avaient en commun d’être tout à la fois créatives, de chercher des interstices pour faire des choses intéressantes pour l’intérêt général et de s’intéresser à la question des communs.

Le Ti Lab est un laboratoire d’innovation publique qui agit en Bretagne, qui dépend tout à la fois des services de l’État et des services de la région Bretagne et que l’on définit, comme un laboratoire de recherche et développement de politique publique. En gros, on vient nous voir avec un problème et on essaie, par l’intermédiaire de recherches, d’actions créatives et d’expérimentations à petite échelle, de trouver des solutions. Nous hébergeons également des communautés de personnes qui ont envie de prendre un sujet, de le travailler sur d’échanger sur leurs pratiques ou sur des problématiques retenues en dehors des réseaux habituels.

Porté par la Préfecture de Bretagne et la Région Bretagne, le Ti Lab est un laboratoire territorial (préfecture de région).

  • Conduite de nouveaux projets, de l’exploration à l’évaluation des expérimentation

  • Accompagnement et accélération de projets existants

  • Coopération ouverte et multi-partenariale

  • Animation de communautés

  • Recherche-action en politiques publiques

  • Ethnographie/ Design de politique publique / UXDesign / Co-développemen

  • Facilitation directe / Ateliers coopératifs remix et Hackathon

  • Formations-actions

  • Conseil en Innovation publique et en Participation citoyenne

 

Merci. Qu’est- ce que tu entends par « Innovation publique d’intérêt général » ?

L’innovation publique concerne des éléments qui relèvent des politiques publiques, de ce que la « puissance publique » peut aider à faire ou ne pas faire pour laisser la place aux autres. Et l’innovation publique d’intérêt général, c’est pour moi quand l’innovation publique est au service de l’intérêt général, c’est- à- dire des usagers citoyens pour lesquels elle travaille. On essaie, au sein de la laboratoire d’innovation publique, d’être aussi des porte-parole des citoyens sur des aspects opérationnels ou plus politique, en alliant le côté politique publique et l’intérêt général, qui est particulier aux communs.

Justement, à propos de commun, ce n’est pas très courant que les laboratoires d’innovation publique fonctionnent en privilégiant ces communs. Pourquoi le TI LAB développe ces projets comme des communs ?

Il y a plusieurs raisons.

Déjà parce que ce qu’on essaie de faire a toujours une dimension coopérative. On ne travaille jamais tout seul et on a besoin des autres, de personnes sur le terrain, de citoyens, d’usagers. On a aussi des personnes qui viennent au sein du Ti Lab, parce qu’elles ne trouvent pas d’espaces de coopération au sein de leurs organisations. Lorsqu’elles sont dans des espaces de coopération, elles travaillent ensemble et cela nous semble normal que ce qui sort de ces travaux en communs soit « versé » aux communs, mises en partage et puisse s’enrichir.

Une deuxième raison relève d’un principe du Ti Lab. On considère que la recherche et développement financées par de l’argent public a vocation à être partagée, donc à être des communs. Pour le dire plus simplement, une action expérimentale développée par le Ti Lab qui ne trouve pas sa place en Bretagne peux être développée à l’autre bout de la France, voire même à l’autre bout du monde, parce que justement, c’est un commun qui peut être reproduit, et alors on en est très contents et on pense qu’on a rendu service.

Enfin, une autre raison, c’est aussi que le fait de pouvoir délivrer des communs permet à d’autres personnes que l’on ne connaît pas de pouvoir les reprendre, les réutiliser, les améliorer, les repartager et de bénéficier comme ça de toute la force que donnent les communs.

 

Comment s’organise cette pratique des communs ?

Fondé en 2017, le LabAccèsest un programme de recherche-action collaboratif porté par le Ti Lab (le laboratoire d’innovation publique en Bretagne) sur le thème de l’accès aux droits sociaux dans un contexte de dématérialisation de la relation administrative.

Le LabAccès apporte un éclairage concernant les effets de la dématérialisation aux différents niveaux de la relation e-administrative, et mène des expérimentations visant à agir contre le non recours aux droits et aux services publics.
Pour en savoir plus : https://www.labacces.fr

Sur le Labaccès, par exemple, elle s’organise parce qu’on essaye de faire coopérer des acteurs qui ne travaille pas forcément ensemble. Par exemple sur plusieurs échelles territoriales, des associations et des partenaires publics, des organismes dématérialisant comme la CAF et des maisons France Service ou des médiateurs numériques, voire des acteurs qu’on peut qualifier de militants.

Elle s’organise aussi parce qu’on essaye de faire coopérer ensemble différentes professionnalités, différents métiers, qui n’ont pas l’habitude de travailler ensemble, par exemple, des chercheurs en sciences sociales et designers. On recherche des solutions communes, des scénarios communs, et en dehors des silos habituels.

Cette pratique est aussi celle de la documentation de tout ce qui est produit au sein du laboratoire. Ces documentations et/ ou ces outils sont délivrés sous des licences ouvertes comme les licences Creative Commons qui permettent la réutilisation. On s’appuie également sur des données ouvertes pour essayer d’avoir des représentations qui soient accessibles.

 

Utilo, une communauté pour connecter les facilitateur.rices d’intérêt général

Tu t’intéresses à la facilitation, tu cherches à travailler différemment, en intelligence collective, tu as envie de rencontrer d’autres personnes qui sont dans le même cas pour recevoir et partager des outils, des conseils, développer d’autres compétences ?
La communauté est composée d’agent.es public.ques mais aussi de personnes issues du milieu associatif, de l’ESS, d’indépendant.es, tou.tes animé.es par l’innovation d’intérêt général.

 

Pour Utilo, ça s’organise encore plus, comme des communs, puisque à l’origine, Utilo, ce sont des personnes qui sont venues au Ti Lab pour ne se rencontrer entre personnes pratiquant de la facilitation, de l’animation, de l’expérience de l’intelligence collective, de la coopération. Des personnes qui se sentaient isolées dans leurs pratiques et dans leurs institutions ou dans leur milieu et qui voulaient partager.

Le Ti Lab les abrite. Le Ti Lab leur permet de faire des choses pour lesquelles elles nous missionnent. Utilo, ce sont les gens qui font Utilo qui gouvernent Utilo eux-mêmes, et qui mandatent le TI LAB pour enrichir Utilo, pour par exemple créer le site Internet d’Utilo. C’est donc eux qui sont à la base de la décision et qui conservent cette gouvernance qui est pour nous un élément clé des communs. Cela existe aussi dans LabAccès, mais plus à titre de co-gouvernance, avec une échelle de décision un peu plus stratégique et un peu plus administrative.

 

Et pourquoi le Ti Lab s’intéresse aujourd’hui à la transition ?

Déjà, il est évident qu’il faut s’y intéresser, cela nous concerne maintenant, c’est un sujet à la fois contemporains, urgent et important.

La deuxième raison, c’est qu’on s’est rendu compte que depuis sa naissance et par les sujets dont on est saisi, le Ti Lab a une entrée justice sociale importante. Or, on a besoin d’inscrire ces éléments de justice sociale à l’intérieur de la transition environnementale ou des transitions plus sociales en termes de pratiques entre les personnes.

On pense que cela peut permettre de résoudre un certain nombre de problématiques ou d’éviter de prendre de mauvaises solutions parce qu’il y a des limites planétaires qu’il va falloir respecter Pour que ces limites planétaires soient respectées, il y a des décisions à prendre, mais pour que ces décisions à prendre soient socialement acceptées, il faut qu’elles relèvent d’éléments de justice sociale. On est aussi déjà des pense être des acteurs de la transition par cette dimension très coopérative qu’on applique dans nos projets et en cherchant à diversifier les acteurs jusque ceux avec lesquels, généralement, la puissance publique ne dialogue pas.

Et puis enfin, la troisième raison, c’est que les institutions avec lesquelles on travaille souhaitent avancer sur ce sujet sans savoir forcément comment faire. Elles ont besoin d’être un peu aiguillonnés pour pouvoir le faire plus fortement au-delà des lieux communs ou du « greenwashing » Pour rentrer dans des choses dures, c’est certainement plus facile à faire dans un laboratoire en avance de phase que directement dans une administration, vu les changements qui sont à opérer, tant en termes de pratique qu’en termes de manière de décision publique. Ensuite, ces changements peuvent être diffusés.

 

Merci Benoît. Et puis, si les communs et la transition sont au cœur de l’action de Transiscope, peut- être deux mots un sur le sujet de la conférence du 17 novembre, qui sera l’interaction entre Innovation publique et acteurs des transitions.

La première chose, à laquelle je pense que c’est déjà d’avoir des espaces sur lesquels on puisse « s’interconnaître », s’apprivoiser et dialoguer. On a des pratiques en commun, mais parfois, effectivement, ce n’est pas toujours évident lorsqu’on on travaille pour des administrations, de pouvoir le faire aussi un peu librement avec d’autres acteurs. On peut nous dire que c’est trop politique, que ça relève trop de la militance. Or, il y a des choses aujourd’hui qui sont complémentaires, qu’on peut faire ensemble d’ailleurs, et qui nous permettent aussi d’identifier des interstices. C’est dans ces interstices que les actions porteuses de futurs et peut-être les plus intéressantes, vont pouvoir se situer.

Donc, apprendre à travailler ensemble.

Et puis on est déjà un acteur de la transition en accompagnant ou hébergeant des actions comme Utilo, ou lorsque dans Labaccès, on interroge des élus, des acteurs politiques ou sociétaux, sur le techno-solutionnisme qui est aussi présent dans la problématique des transitions.

Enfin, pour l’équipe du TI LAB, la transition concerne les personnes qui y sont embarquées, mais également les gens avec qui on travaille. On a vraiment besoin de jeter des ponts avec tout le monde.

 

Interview réalisée par Michel Briand