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Les cigales, les fourmis, et l’entrepreneuriat féminin

Le 8 mars, c’est la journée internationale pour les droits des femmes. A cette occasion, l’association Cigales de Bretagne, avec le soutien d’ Entreprendre Au Féminin, co-organisent une édition de l’opération « Cigales cherchent fourmis », dédiée à entrepreneuriat féminin. Deux événements, l’un en présentiel, l’autre en distanciel, se dérouleront les 8 et 11 mars.

Connaissez-vous les CIGALES ? Ces Clubs d’Investisseurs pour une Gestion Alternative Locale et de l’Épargne Solidaire sont nés il y a 40 ans. Ils permettent le financement de projets de l’économie sociale et solidaire, grâce à l’épargne des citoyen.ne.s regroupé.e.s au sein d’un club. En Bretagne, on compte 27 CIGALES, regroupant environ 350 citoyen.ne.s cigalier.e.s investisseur.e.. Il et elles sont désireux/ses de financer des projets locaux en économie sociale et solidaire et développement durable, sur une durée de cinq ans. Par groupe de 5 à 20 personnes, en indivision volontaire, ils mettent en commun une partie de leur épargne personnelle.

Dans le cadre de la Journée Internationale pour le Droit Des Femmes, l’Association des Cigales de Bretagne et Entreprendre au Féminin, réseau de professionnelles qui accompagne les femmes dans leur projet entrepreneuriat, organisent une opération « Cigales cherchent Fourmis spéciale entrepreneuriat féminin » . L’objectif est de rapprocher les porteuses de projets/entrepreneures, et les cigaliers d’un même territoire. « Pendant 1h, une porteuse de projet ou un collectif représenté par une femme, évoluant dans le champ de l’Économie Sociale et Solidaire ou le développement local, aura l’occasion de présenter son projet à un binôme cigalier/cigalière de son territoire, quel que soit le stade d’avancée de son projet (idée, démarrage, développement, reprise…). L’objectif est de cerner le projet, d’en comprendre les enjeux et les besoins et de voir s’il s’inscrit dans le champ d’intervention des CIGALES. La rencontre pourrait déboucher sur un financement à court ou moyen terme. Une présentation du fonctionnement des CIGALES et des conditions de financement sera réalisée au début de la rencontre. », peut-on lire sur le site des Cigales de Bretagne.

Les rencontres du vendredi 8 mars auront lieu :

  • A Brest, entre 16h et 20h, dans les locaux de l’ADESS 
  • A Concarneau, entre 16h et 20h, dans les locaux de l’Ecopôle
  • A Rennes, entre 16h et 20h, à l’espace ESS Anne de Bretagne
  • A Saint-Brieuc, entre 16h et 20h, dans les locaux de RICH’ESS
  • A Vannes, entre 16h et 20h, à la Pépinière PRISME

 

Et le lundi 11 mars, de 16h à 20h, en visioconférence par Zoom.

 

Plus d’infos et inscriptions sur le site des Cigales de Bretagne




Espero, un atelier rennais qui tisse des liens entre insertion, local et upcycling

A Rennes, dans le quartier de la Donelière, au sein du tiers-lieu d’artisanat «Comme un établi », les machines à coudre d’Espero se sont installées depuis octobre. Des salarié.e.s en insertion, exilé.e.s, fabriquent des vêtements et accessoires grâce à des tissus non utilisés. Des créatrices et créateurs locaux font aussi appel à leurs talents.

Espero est une « association à mission sociale et environnementale qui accompagne les personnes éloignées de l’emploi vers les métiers de la transition écologique ». Créée en 2016, elle a développé, d’abord en Ile-De-France, des activités d’apiculture urbaine, de maraîchage et de couture upcycling. C’est cette dernière mission qui a essaimé en Bretagne, à l’initiative de Marion Levesque, qui coordonne l’antenne régionale, après un passage par l’incubateur du Tag35.

L’atelier d’Espero a désormais posé ses machines à coudre dans le « Pôle textile » de Comme un Etabli, rue Bahon-Rault, à Rennes, « tiers-lieu » de l’artisanat. « On a ouvert nos portes le 2 octobre », rappelle Maëlle Pisigo, responsable de l’atelier couture. Depuis quelques mois, les salarié.e..s, des personnes exilées qui viennent d’Ukraine, d’Afghanistan ou encore de Guinée, sont embauchées en CDD d’insertion. « Ils et elles avaient déjà une expérience dans la couture, dans leur pays d’origine », précise Maëlle. Le fait d’être en contrat d’insertion permet d’être un tremplin, pour le futur. « Une conseillère les aide à lever les différents freins, et les épaule dans leur démarches administratives, comme par exemple au niveau du logement ou du permis ». Et 3 heures de cours de français sont dispensés chaque semaine.

Sur les machines professionnelles, boutonnières, ou encore presse, les salarié.e.s d’Espero travaillent avec du tissu invendu et récupéré, pour fabriquer des vêtements et des accessoires (sacs bananes). Une marque « Espero » est en train d’être développée. « On fonctionne aussi en sous-traitance, on accompagne des créatrices locales et créateurs locaux, dans la conception et la découpe notamment». C’est le cas par exemple avec Purée !, marque rennaise, dont la veste upcyclée « Vague » est fabriquée par l’atelier d’insertion. Ou encore de TraajeT, marque de vêtements pour vélo, qui a confié la confection de son pantalon spécial « Velotaf » à l’équipe d’Espero. Une philosophie de « circuit court » qui s’applique aussi ici au secteur du textile !

 

Plus d’infos

https://www.esperofrance.org




Comme un établi, pour partager des outils, des machines et des compétences à Rennes

[Rediff] Au nord de Rennes, au 5 Rue Bahon-Rault, se situe un atelier pas tout à fait comme les autres. Bienvenue à « Comme un établi » ! Ici, c’est en quelque sorte un tiers-lieu dédié à l’artisanat, un espace collectif où l’on se partage les machines et l’outillage. Ouvert aux professionnels et aux particuliers, l’espace, qui est une Scic, veut diffuser aussi des valeurs de partage et de mise en commun. Des événements y sont régulièrement organisés.

 

Dans cet ancien garage Peugeot, sur 1200 m2, on trouve ainsi « 22 structures pour 25 artisan.e.s » explique Awen, assistante de gestion et de développement. Quatre pôles composent le lieu : bois, métal, textile et décoration. Parmi les résident.e.s, on compte un menuisier, un charpentier, des architectes, un luthier, ébéniste, une tapissière, une métallière, un fabricant de vélo-cargo…les compétences sont variées. Certain.e.s se partagent les établis, dans une grande salle centrale baptisée « La Volière ». D’autres peuvent investir des box d’une dizaine de mètre carrés si besoin. Des bureaux sont aussi disponibles à l’étage, pour permettre aux profesionnel.le.s d’effectuer leurs démarches administratives, répondre aux demande de devis etc…Les particuliers ont également la possibilité de venir réaliser leurs projets personnels, et d’utiliser les outils électro-portatifs à disposition, « le soir et le week-end surtout », précise Awen.

 

Cliquez sur les photos pour les agrandir : 

C’est en 2017 que démarre l’aventure de Comme Un Etabli, à l’initiative de Benjamin Danjoun et Edvin Bernardin, deux passionnés de bricolage et de travaux manuels. Après avoir faire partie de l’une des promotions de l’incubateur du Tag35, le projet, d’abord associatif, a évolué ensuite vers une Scic (Société Coopérative d’Intérêt Collectif), qui comprend aujourd’hui 98 sociétaires. Le collectif est d’ailleurs l’une des valeurs forte portée par la structure. « L’idée, c’est aussi que chacun participe à la vie de l’atelier. On est ici dans l’échange », souligne Awen. Des espaces en commun, tels qu’une salle de pause ou une salle de réunion, ont été ainsi mises en place. « Et le mercredi, c’est cantine collective ».Les travaux d’aménagement de l’atelier ont été réalisés par les artisan.e.s du collectif. Comme un Etabli travaille aussi avec d’autres structures locales, comme par exemple La Briquetterie Solidaire, pour l’isolation du lieu en terre et paille. Elle va héberger aussi prochainement l’association Espero, qui œuvre à l’insertion de personnes réfugiées grâce à la couture upcycling, dans son espace textile. Et travaille également avec ses voisins de Vert Le Jardin, qui promeut le jardinage et le compost partagés.

Des évènements sont également régulièrement organisés au sein de l’atelier partagé : journée portes-ouvertes, projection de documentaires, participation aux Journées Européennes des Métiers d’Arts…et un grand marché de Noël, avec plus de 50 exposants, tous créateurs/créatrices et/ou artisan.e.s, qui aura lieu cette année les 16 et 17 décembre ! Une belle occasion de découvrir Comme Un Etabli au gré de la déambulation entre les stands, mis en place autour des machines.

 

Plus d’infos

https://www.commeunetabli.fr




Marguerite & Cie, engagée pour « changer les règles »

Des distributeurs de protections menstruelles respectueuses de l’environnement et de la santé, accessibles gratuitement dans des lieux publics, entreprises, et établissements d’enseignement. C’est ce que propose Gaële Le Noane avec « Marguerite & Cie ». L’entreprise, basée à Plobannalec-Lesconil dans le Finistère, labellisée Esus, veut aussi plus largement « lutter contre les inégalités en levant le tabou des règles », et proposer des solutions contre la précarité menstruelle.

 

L’histoire de Marguerite & Cie commence avec une colère. Celle de Gaële le Noane, la fondatrice de l’entreprise. En 2017, alors encore orthophoniste spécialisée en cancérologie, elle découvre l’étude de la Direction Générale de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCRF) sur la composition très chimique des protections menstruelles, serviettes et tampons : perturbateurs endocriniens, plastique responsable de la pollution marine, dioxine et pesticides au menu. «Ca m’a révoltée ! Je ne m’étais jamais penchée sur le sujet, alors que pour l’alimentation par exemple, j’étais passée au bio », retrace la finistérienne. Elle commence alors à chercher d’autres produits plus respectueux de l’environnement et de la santé, qui sont notamment vendus en Biocoop, et tombe sur la marque certifiée Natracare. « Mais, aller en Bicooop, ce n’est pas simple pour tout le monde », fait-elle remarquer. C’est l’occasion pour Gaële de repenser à une remarque qu’elle s’était faite en 2012, concernant les « Box » auxquelles on pouvait s’abonner pour recevoir mensuellement des produits à domicile. « On y trouvait bien des rasoirs, du thé…mais pourquoi pas des protections menstruelles ? ». Dès 2017, elle décide alors de lancer son propre projet de box. « Je ne m’en rendais pas compte de l’ampleur de la tâche! », sourit-elle. « Il a fallu trouver un fournisseur, et Natracare a accepté. C’était une première victoire ! » Ensuite, restait le packaging, et le nom. Ce sera « Marguerite & Cie », en hommage « aux grandes autrices françaises, notamment Yourcenar et Duras, et aussi à Marguerite Durand, une suffragette féministe au parcours incroyable ».

Un brevet déposé en 2019

Dès le 1er janvier 2018, Gaële Le Noane se lance seule dans l’entrepreneuriat, avec la première box menstruelle française, « 100% bio et solidaire ». En effet, pour une boite vendue, une autre était offerte à l’association « Agir pour la Santé des Femmes » (ADSF) qui distribue des kits d’hygiène à des femmes en situation de grande précarité. Mais la chef d’entreprise souhaite alors aller encore plus loin. « Pourquoi est ce que l’accès aux protections menstruelles n’est pas gratuit ? ». L’idée de lancer des distributeurs proposant tampons et serviettes en accès libres lui vient, et un brevet est déposé en 2019. Le système proposé par Marguerite & Cie est simplifié : il n’y a pas de manipulation à effectuer pour la recharge, tout est sécurisé et permet également un gain de temps.

Lever le tabou autour des règles

Le brevet à peine déposé, les demandes affluent déjà. L’Université Rennes 2 et le Crous de Bretagne passent des commandes. Les premiers distributeurs sont fabriqués à Quimper.

Aujourd’hui, on en compte 6000 installés, en France et dans cinq pays européens. « On estime qu’on touche 1 million trois cent mille bénéficiaires » souligne Gaële. Une réponse au problème de la précarité menstruelle, qui touche encore de trop nombreuses personnes. Un pas de plus aussi sur la question de l’égalité femmes-hommes, et du mieux-être au travail. Et pour des protections plus respectueuses de l’environnement et de la santé, car celles proposées par Marguerite & Cie sont à base de coton bio, blanchies sans chlore. On trouve ainsi les distributeurs « classiques », dans les collèges, lycées (avec la Région Bretagne), mairies, lieux publics, gymnases… et également des « capsules » ( appareil de plus petite taille et plus ergonomique) dans plus de 250 entreprises, certaines appartenant à de grands groupes. Marguerite et Cie, qui emploie 13 personnes, est par ailleurs labellisée Esus : tout le conditionnement est réalisé par deux Esat et une entreprise adaptée, basées en Bretagne et en région parisienne. « Cela permet de mailler le territoire, car le modèle logistique est ainsi reproductible ailleurs en France, ce qui permet de limiter l’impact écologique », déclare Gaële, qui souhaite aussi avec son entreprise, au delà de la simple distribution de protections menstruelles, lever le tabou qui règne encore au sujet des règles.  Des ateliers de sensibilisation sont d’ailleurs proposés dans les collèges et lycées. « La situation s’améliore, mais il y a encore, selon des sondages, la moitié de la population qui ne veut pas en parler ! ». Elle avoue d’ailleurs avoir connu quelques moments compliqués lors du développement de son projet, notamment concernant les financements, du fait de la nature même de son activité. Aujourd’hui, la Finistérienne, avec Marguerite & Compagnie, semble néanmoins en voie de « changer les règles ». Et vient de lancer des kits spéciaux pour équiper désormais les hôtels !

 

Plus d’infos : https://margueriteetcie.com




Portrait. Des salles de marchés à Londres à la monnaie locale de Morlaix, l’itinéraire peu commun de Nicolas

[Rediff] Rencontre avec Nicolas Makeiew, coordinateur de l’association pour une Monnaie Locale en Pays de Morlaix, le Buzuk. Un poste qu’il occupe depuis deux ans, après avoir effectué un virage dans sa carrière professionnelle et dans sa vie personnelle. Du trading à la city de Londres aux bureaux de Kerozar, lieu de développement de l’économie sociale et solidaire, il nous raconte son parcours et ses choix.

Depuis 2016, la monnaie locale Le Buzuk trace son sillon sur le secteur de Morlaix. Au fil des années, les billets colorés (mais aussi désormais l’application sur smartphone!) sont utilisés aussi bien par des citoyen.ne.s, des entreprises, des associations, des producteur.rice.s., des collectivités, pour effectuer leurs achats locaux. Un projet porté par une solide équipe de bénévoles, mais aussi par Nicolas Makeiew, salarié de l’association depuis maintenant deux ans. « Je suis coordinateur du Buzuk », explique-t-il. « Ma principale mission, c’est de développer le réseau des acteurs de la monnaie locale, qui partagent notre charte de valeurs ». Un poste qui l’amène aussi à « faire de l’éducation populaire auprès du grand public », en animant par exemple des ateliers et des conférences sur le fonctionnement d’une monnaie locale. Sans oublier l’aspect « logistique » : faire en sorte que les utilisateur.rice.s puissent avoir des billets, que les professionnel.le.s puissent reconvertir des Buzuks en euros si besoin…Nicolas est donc en quelque sorte un « couteau suisse », qui gère aussi les équipes de bénévoles et la vie associative, sans oublier la recherche de financements et subventions. « Tout ce qui fait le quotidien d’une association, mais avec la monnaie comme spécificité. ».

Une plongée dans le « grand bain » du milieu associatif pour Nicolas, qui a effectué un virage à 180 degrés dans sa carrière professionnelle et son mode de vie.

Ambiance « Le Loup de Wall Street »

En effet, avant d’être le salarié du Buzuk, le trentenaire a eu une carrière. « Je travaillais à la City de Londres, dans une grande banque d’investissement, je faisais du trading d’obligations. J’étais dans une salle des marchés, avec des traders ». Et ce pendant cinq ans. « C’est un peu le grand écart avec ce que je fais aujourd’hui », sourit-il. « Ce sont deux mondes radicalement opposés ». Un environnement qu’il jugeait à l’époque « très stimulant ». « Il y avait beaucoup d’adrénaline, de pression ». Un milieu également très majoritairement masculin, avec beaucoup de concurrence, et « d’humiliations » aussi. On imagine sans peine une ambiance similaire à celle décrite dans le film de Martin Scorcese « Le Loup de Wall Street », dans lequel on suit l’ascension et la chute d’un jeune loup de la finance interprété par Leonardo Di Caprio. « Il y a des scènes qui sont très réalistes », avoue d’ailleurs Nicolas, qui, au bout d’un moment, ne se sent plus aussi bien dans ce milieu particulier. « Au final, j’avais réussi, je travaillais 90 heures par semaine, je gagnais très très bien ma vie. J’étais jeune, mais j’étais malheureux », confie-t-il. « J’étais seul, parce que j’étais loin de ma famille et de mes amis. J’étais entouré par tous les autres financiers de la City, on vivait ensemble, parce qu’en fait on vivait au boulot. Et après le boulot, on sortait ensemble », raconte-t-il. « J’étais avec des personnes qui ne me faisaient pas du bien ». Un environnement viril, très « mâle alpha », avec beaucoup d’excès. Un monde « hors-norme, superficiel » qui pourtant au départ l’avait attiré. Ne s’y retrouvant plus, Nicolas décide alors de demander son transfert à Paris, sur le même poste. Il fait son retour à la capitale, son territoire d’origine. C’est alors le début d’un processus de « renoncement » à ce milieu. Il rencontre sa future femme, qui elle, est éducatrice spécialisée auprès de migrants à la rue. « Ca a été une prise de conscience assez énorme », reconnaît le coordinateur du Buzuk. « Le soir, on avait des discussions surréalistes sur nos journées respectives ! Je me censurais pas mal, je me demandais comment est ce que je pouvais parler de ma journée après la sienne. C’était complètement indécent ! ».

Nicolas avoue avoir alors ouvert les yeux sur « beaucoup de choses », notamment sur le monde de la finance. « Mais surtout sur le monde d’où je venais », admet-il. « J’étais un pur produit de mon environnement. Je viens des Hauts-de-Seine, d’une famille bourgeoise, j’ai fait une école d’ingénieurs privée…j’étais sur les rails de ma destinée » .

Un confinement passé à Morlaix

Mais parfois on décide de suivre un chemin autre que celui qui nous est tout tracé….

« Un jour, j’ai décidé de quitter les rails. Ca a été un peu dur pour mon entourage. Ca l’est encore aujourd’hui », raconte Nicolas, qui, suite, à sa décision de quitter enfin le monde de la finance, traverse une période de questionnement sur la suite de sa carrière. Avec sa compagne, qui elle aussi quitte son travail, ils décident de voyager. Pendant un an, le couple part en Nouvelle-Zélande, et vit de petits boulots. « On en a profité pour réfléchir à la suite ». Et fin 2019, c’est le retour en France, direction Morlaix, d’où vient la compagne de Nicolas. Vient alors le Covid, et le tout premier confinement, passé en Bretagne. L’occasion pour le francilien d’origine de découvrir la région, et de tomber sous la charme de la cité du viaduc. « Malgré le contexte inédit et un peu anxiogène, c’était super sympa ! » rigole-t-il. « J’ai adoré me poser, découvrir ce territoire, prendre le temps d’aller chez les producteurs pour s’approvisionner ». Il propose alors sa compagne de s’installer sur place. Très vite, il prend conscience du « caractère militant » et associatif de Morlaix et ses alentours. Et croise en ville les nombreuses pastilles « Ici on prend le Buzuk » sur les vitrines des commerces. Intrigué, Nicolas se renseigne et rencontre alors les bénévoles de la monnaie locale, devient à son tour membre de l’équipe, et est donc recruté en tant que coordinateur depuis 2021, ravi de mettre ses compétences au service « d’un projet citoyen ».

« Je m’épanouis dans beaucoup de choses immatérielles »

Mais le changement chez le néo-breton n’a pas été qu’une reconversion professionnelle. C’est aussi une nouvelle manière de vivre. « Tout mon rapport à ce qui fait qu’on est heureux dans la vie a changé », souligne-t-il. « Aujourd’hui, je considère que je n’ai pas besoin de gagner autant d’argent qu’avant pour être heureux dans la vie ». Pour lui, le bien le plus précieux est le temps. « On a beau être très riche, on ne peut pas lutter contre. J’ai gagné beaucoup de temps par rapport à ma vie d’avant, je travaille maintenant 35 heures par semaine sur quatre jours. Je m’épanouis dans beaucoup de choses immatérielles, telles que la solidarité, les moments de convivialité, le spirituel, l’intellectuel… Je me nourris de choses qu’on ne peut pas toucher, qu’on ne peut pas acheter ».

Avant de devenir salarié du Buzuk, le jeune homme a par ailleurs suivi un Master en Écologie Politique, spécialisé sur la Décroissance, dispensé par l’Université de Barcelone. « Ca m’a beaucoup parlé. J’ai découvert quelque chose d’assez exceptionnel : toute les règles qui régissent notre économie n’ont jamais pris en compte les limites planétaires ! ». Une autre prise de conscience pour Nicolas, pour qui le « mythe de la croissance » s’effondre. Il apprend aussi beaucoup sur le décolonialisme, et le féminisme, auquel il croit beaucoup. « Depuis Me Too, il s’est passé quelque chose qui semble inarrêtable, qui infiltre toute la société. De plus en plus de comportements sont traduits en justice, c’est très fort ! ».

« Tout cela m’a ancré dans un autre paradigme que celui duquel je viens. Il y a encore beaucoup de choses à changer dans notre société. Désormais je ne peux plus revenir en arrière », affirme-t-il « En tout cas aujourd’hui, je suis content du chemin que j’ai effectué pour arriver jusqu’ici, dans une ville à taille humaine, avec la nature à proximité, la mer… et la création d’une communauté d’entraide, de moments de convivialité, la fondation d’une famille… il n’y a rien de mieux que ça. C’est mieux que d’être à la City à Londres, entouré de six écrans, à ne regarder que des chiffres 90 heures par semaine ! », conclut-il en souriant.

 

 


Des portraits qui se conjuguent désormais autant au féminin qu’au masculin

Depuis 2020, nous vous proposons une série de portraits de femmes engagées dans des initiatives de transition écologique en Bretagne ( https://www.eco-bretons.info/edito-portraits-de-femmes-en-transition-ces-eco-bretonnes-qui-font-bouger-lecologie-dans-nos-territoires/ ). L’objectif est de mettre en lumière des femmes qui, partant d’un quotidien ne les satisfaisait pas, en ont modifié le cours et, ce faisant, ont intégré dans leur vie une autre façon de concevoir leurs rapports à la planète et aux autres. Beaucoup d’entre elles sont aujourd’hui des porteuses de projet, et nous souhaitons mettre en valeur leur parcours, leurs valeurs, leur manière de voir les transitions écologiques et sociales. C’est ainsi, vous avez pu jusqu’à présent découvrir le parcours et les actions de 16 d’entre elles.

Ce projet a été soutenu financièrement, d’abord par la Région Bretagne et la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement ») et désormais par la Direction Régionale pour les Droits des Femmes et l’Egalité.

S’il reste primordial de contribuer à mettre en œuvre des actions permettant d’établir l’égalité – hélas encore bien relative – entre les femmes et les hommes, cela ne signifie pas pour autant que ces derniers soient à mettre au second plan au motif de rétablir l’équilibre. C’est d’autant plus vrai que, au vu de l’immensité des chantiers à mener pour faire face à des enjeux écologiques déterminants pour notre avenir commun sur une planète encore habitable, toutes les forces humaines sont essentielles. Et des hommes y contribuent de belle façon. Nous vous invitons dès à présent à en découvrir quelques-uns d’entre eux avec nos portraits d’éco-Bretons en transition, accueillis dans une nouvelle rubrique, aux côtés de celle de nos éco-Bretonnes.

Laurence Mermet, présidente d’Eco-Bretons




Participez au déploiement de la Fresque des Possibles avec Le Lieu-Dit !

Le Lieu Dit, collectif d’associations brestoises engagées dans les transitions et l’ESS, lance un financement participatif afin de contribuer au déploiement de son outil, La Fresque des Possibles, en Bretagne et plus largement en France.

Créé en 2015, Le Lieu Dit est un collectif qui fédère douze structures brestoises. Il mène des projets coopératifs autour des transitions et de l’économie sociale et solidaire On y trouve des associations comme Brest à Pied et à Vélo (BAPAV), la monnaie locale brestoise Heol, Vert Le Jardin, Les Fabriques du Ponant…. « L’idée, c’est de travailler ensemble autour des transitions, sur des thématiques comme le réemploi, l’agriculture, la consommation locale, les circuits-courts…qui sont le cœur d’action des structures du collectif », expliquait Elena Kerrain, la coordinatrice du Lieu Dit, dans un article que nous avons publié précédemment.

Depuis 2021, le collectif est labellisé Fabrique de Territoire, dispositif du Ministère de la Cohésion des Territoires, qui soutient les tiers-lieux. Le Lieu Dit a d’ailleurs créé la Caravane des Possibles, tiers-lieu itinérant, qui est aussi un « outil d’animation territoriale ». Un guide des initiative locales a aussi été édité, et une « Fresque des Possibles » est aussi née.

C’est sur cette dernière que le focus est mis par Le Lieu Dit en cette fin d’année. L’association souhaite aujourd’hui la déployer dans tout le Pays de Brest, la Bretagne, et plus largement la France.

La Fresque des Possibles est un outil créé sur un modèle similaire à la célèbre Fresque du Climat, il vise à « échanger autour de la transition avec bienveillance, autour de thématiques telles que se déplacer, s’équiper, se nourrir, travailler. C’est un support qui permet aux participants d’échanger entre eux et d’identifier des acteurs locaux qui peuvent répondre à leurs besoins », souligne Elena. Trois thématiques sont aujourd’hui finalisées : « se déplacer », « s’équiper », et « se nourrir ». Deux nouvelles sont en cours de développement : « habiter », et « décider ensemble ». Plus de 1000 personnes ont déjà participé à une « Fresque des Possibles » en format classique, et plus de 2500 en format événementiel, sur stands ou avec la Caravane des Possibles.

Afin de pouvoir former des animatrices et animateurs sur d’autres territoires, et d’exporter la Fresque ailleurs, Le Lieu Dit a lancé un financement participatif. Objectif : 8000 euros.

Il reste encore 40 jours pour participer, à l’adresse suivante : https://www.helloasso.com/associations/le-lieu-dit/collectes/accelerer-le-deploiement-de-la-fresque-des-possibles