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Matthieu Combe. « Nous baignons dans le plastique à tous les stades de notre vie »

Interview de Matthieu Combe, auteur de « Survivre au péril plastique – Des solutions à tous les niveaux » (éd Rue de l’échiquier). Récemment de passage dans les librairies « A la Lettre Thé » à Morlaix et « L’Ivresse des Mots » à Lampaul-Guimillau, il vient de se voir décerner pour cet ouvrage le prix Roberval Grand public 2019 à Compiègne.

Vous préférez parler des plastiques plutôt que du plastique…

Le terme « plastique » est un terme générique qui fait référence en réalité à une multitude de matériaux. Il existe des centaines de familles de plastiques. Les six familles les plus répandues sont le polyéthylène téréphtalate (PET), le polyéthylène haute-densité (PEHD), le polyéthylène basse-densité (PEBD), le polychlorure de vinyle (PVC), le polypropylène (PP) et le polystyrène (PS). Mais dans chaque famille, les plastiques restent différents, car ils présentent des propriétés différentes conférées par des additifs divers : anti-UV, anti-microbiens, colorants, retardateurs de flamme…

Le problème n’est pas le plastique en tant que matériau. La problématique concerne surtout sa production exponentielle et ses usages superflus, notamment dans les emballages. C’est le manque d’éco-conception qui fait que des plastiques techniquement recyclables ne sont pas recyclés par manque de rentabilité et de filières. C’est aussi le fait que les plastiques sont majoritairement produit à base d’énergies fossiles et que certains de leurs composants soient toxiques. C’est surtout le manque de gestion des plastiques en fin de vie qui fait que l’on en retrouve partout dans l’environnement et que près de 80% des déchets retrouvés dans la mer sont en plastique.

Vous dites que nous baignons dans le plastique à tous les stades de notre vie…

Le plastique est présent partout autour de nous, de notre enfance à notre vie adulte. Bébés, nous sommes en contact avec le plastique à travers les biberons, les tétines, la vaisselle… Puis, nous finissons rapidement habillés en plastique de la tête au pied. Textiles, emballages, numérique, cosmétiques… nous baignons au quotidien dans le plastique. Regardez autour de vous, vous verrez très rapidement du plastique, à commencer par celui de votre téléphone, de votre tablette ou de votre ordinateur.

Comment et pourquoi le plastique est-il devenu l’ennemi public n° 1 ?

Si le plastique est présent dans notre quotidien, il finit trop souvent par polluer l’environnement. Quelques chiffres parlent d’eux-mêmes. Environ 8 millions de tonnes de plastiques finissent dans les océans chaque année. Près de 270 000 tonnes flottent à la surface des océans, mais autour de 150 millions de tonnes se retrouvent sous la surface, jusqu’au fond des océans. Le plastique se retrouve désormais dans les eaux, les sols et l’air.

Pourquoi est-il devenu l’ennemi public n°1 ? Car il n’est pas biodégradable et mettra des centaines, voire des milliers d’années à disparaître en fonction du milieu où il finit. Parmi les grandes causes, citons le manque d’infrastructures de collecte et de traitement des déchets et des eaux usées. La consommation de plastiques augmente beaucoup plus vite que la construction des infrastructures nécessaires à leur collecte et à leur traitement. Dans plusieurs pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique du sud, entre 60 et 90% des déchets sont mal gérés. Les déchets plastiques se retrouvent majoritairement dans des décharges à ciel ouvert ou dans la nature.

Selon vous, nous avons toutes les clés en main pour lutter contre les pollutions du plastique… Quelles sont les plus encourageantes ?

Pour résoudre le problème, il faudra avant tout réduire notre consommation de plastiques. Il faudra des lois pour interdire certains types de plastiques à usage unique et les microbilles. Les engagements volontaires des entreprises et des marques pour réduire l’utilisation des plastiques et augmenter l’incorporation de matières recyclées devront laisser la place à des obligations chiffrées.

Afin de réutiliser ou de recycler 100% des plastiques, il faudra atteindre 100% de collecte. Cela passe par la mise en place du tri partout, dans toutes les collectivités, dans l’espace public, lors des événements et dans les entreprises. Les citoyens ont aussi un rôle important à jouer. Ils peuvent faire attention à leurs achats, en achetant moins de produits transformés emballés dans du plastique, en respectant les consignes de tri et en interpellant les marques sur leur utilisation de plastique.

Qu’appelle-t-on un plastique biosourcé ? Constitue-t-il il une solution prometteuse ?

Aujourd’hui, seulement 1% de la production mondiale de plastiques est faite à partir de produit biosourcés. Un plastique est dit biosourcé lorsque la matière première pour fabriquer ses polymères est issu de la « biomasse », c’est-à-dire d’origine végétale, animale ou de micro-organismes. Cela ne signifie par qu’il sera biodégradable ou compostable en fin de vie.

Dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique et la raréfaction des matières premières non renouvelables, la solution la plus prometteuse est la recherche de nouveaux plastiques biosourcés, réutilisables, recyclables, ou compostables à base d’algues, de déchets organiques ou de CO2.


Matthieu Combe a fondé le magazine en ligne Natura-sciences.com en 2009. Gratuit et à destination du grand public, le magazine a à cœur de présenter les solutions pour réduire son empreinte écologique. Les thématiques abordées sont variées : alimentation, énergie, pollution, santé, politique environnementale, transition écologique…

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