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Un tour de France des alternatives en livre

« A l’heure où les urgences écologiques et sociales frappent chaque jour avec plus d’insistance aux portes de nos consciences, ces citoyens croient en la possibilité d’un avenir meilleur et le mettent en œuvre dès aujourd’hui », explique Emmanuel Daniel en ouverture de son ouvrage « Le Tour de France des alternatives ». Durant six mois, le jeune journaliste est parti sillonner la France. Utilisant le covoiturage et l’auto-stop, dormant chez l’habitant, il est allé au gré des rencontres à la découverte d’initiatives alternatives portées par des citoyens, seuls ou en groupes. Des « utopies concrètes » comme il les définit. « Partout en France, de simples citoyens montrent non seulement qu’un autre monde est possible, mais qu’il existe déjà. Ils lancent des monnaies locales, créent des coopératives avec des écarts de salaire réduits, réinventent les modes de mobilisation et de participation politique », explique-t-il également. C’est ainsi qu’il est allé à la découverte d’une épicerie associative et solidaire dans un quartier sensible d’Eybens près de Grenoble, a croisé la route d’une jardinière amateure qui participe à la préservation des semences dans le Cher, a découvert le fonctionnement d’une agence de communication en Scop autogérée près de Grenoble, de la monnaie locale complémentaire Sol Violette à Toulouse. L’auteur est également parti en vadrouille sur la Zone à Défendre (Zad) de Notre-Dame-Des-Landes et a donné la parole à ses occupants. La Bretagne n’est pas oubliée : outre la Zad, Emmanuel Daniel s’est aussi penché sur le parc éolien citoyen de Béganne dans le Morbihan, ainsi que sur le collège Montessori (fermé depuis, ndlr) au Rheu près de Rennes. Ce sont ainsi une dizaine d’intiatives qui sont présentées dans le livre.

 

Un Tour de France des Alternatives qui a redonné le moral et de l’envie au jeune journaliste. « Mon immersion dans cette France qui se réinvente par le bas m’a redonné foi en l’humanité et espoir dans le changement », déclare-t-il dans l’ouvrage, dans une partie plus « analytique ». Très accessible et facile à lire, « Le Tour de France des alternatives » est un ouvrage très agréable, qui permet à chacun de se rendre compte de la vitalité et de la diversité des initiatives existantes en France à l’heure actuelle. Il donne des idées et amène à réfléchir sur notre système actuel et la façon dont on peut construire des alternatives. A compléter par la lecture des autres articles (et ils sont nombreux) sur le site d’Emmanuel Daniel : http://www.tourdefrancedesalternatives.fr/

 

Le Tour de France des alternatives, d’ Emmanuel Daniel, éditions du Seuil, collection Reporterre, 133 pages, 10 euros.




Rob Hopkins « Ils changent le monde! 1001 initiatives de transition écologique »

« La cavalerie c’est nous », défend Rob Hopkins dans son dernier ouvrage « Ils changent le monde! », publié aux éditions du Seuil, en octobre dernier. Pour lui le constat est clair : le modèle de société actuel ne permettra pas de venir à bout des crises économiques et écologiques et personne ne viendra secourir l’individu ou sa communauté locale. Ni gouvernement, ni grand groupe industriel ou autre autorité locale. Ce seront donc les citoyens, tous les citoyens, en décidant de travailler ensemble autour d’une idée : la résilience locale. « C’est l’idée qu’en reprenant en main la satisfaction de nos besoins fondammentaux au niveau local, nous pouvons faire s’épanouir une nouvelle économie tout en réduisant notre dépendance au pétrole et nos emissions de carbone, et en ramenant le pouvoir au niveau local. », explique l’auteur. L’idée est développée et nourrie d’exemples d’initiatives citoyennes locales concrètes tout au long du livre, ainsi que de citations.

Un ouvrage compréhensible, s’adressant au plus grand nombre

Ce voyage dans le monde des transitions veut montrer qu’une autre façon de faire société est possible et, surtout, qu’elle est en marche. Pour autant, l’ouvrage, dénué de démonstrations théoriques – économiques et sociologiques – ne présente pas de solution universelle aux crises mais invite bien à explorer des pistes. Rob Hopkins, initiateur du mouvement de la Transition, connaît bien son sujet et en parle clairement, en invitant au fil des pages le lecteur à rejoindre ce mouvement post-croissance. Les mots clés et expressions bien définis rendent la lecture accessible à tous et une riche documentation est proposée pour creuser sur le sujet. Le livre s’adresse autant au lecteur curieux d’en savoir plus sur le mouvement des transitions qu’à celui cherchant à approfondir sur le sujet et à trouver de nouvelles initiatives à expérimenter.

 

Ils changent le monde! 1001 initiatives de transition écologique

Rob Hopkins

Editions du Seuil

198 pages

14 euros

 




La ligne de partage des eaux

Après « le temps des grâces », sorti en 2008, Dominique Marchais présente cette année un nouveau film, « La ligne de partage des eaux ». Tout au long du film, le réalisateur nous invite à une balade au fil de l’eau sur le bassin versant de la Loire, de la source de la Vienne jusqu’à l’estuaire, rythmée par des escales révélatrices de la vie et des conflits au sein du bassin. Entre protection de l’environnement et développement des activités humaines, partout l’eau partage les territoires autant que les hommes. Le film part d’abord de constats écologiques observés aux sources de la Vienne : disparition de la moule perlière et de l’écrevisse due à l’arrivée d’espèces envahissantes, aux barrages interrompant la migration des poissons et à la coupe des arbres autour des rivières. Le spectateur est placé au centre de la narration et peut facilement comprendre les enjeux de chacun à travers les regards de gestionnaires, d’élus, d’habitants, d’agriculteurs et d’un paysagiste. Il est invité à prendre en compte l’ensemble pour saisir sa complexité et où la qualité écologique de l’aval est déterminée par celle de l’amont du bassin. Le réalisateur ne proposera pas une réponse au problème mais nous laissera en saisir les tenants en laissant largement la place aux débats et à la parole lorsqu’en parallèle, l’eau continue son cours.

 

 

 

                                                    




Urgence, ralentissons !

Edgar Morin, Geneviève Azam, Jérémy Rifkin…mais aussi Rob Hopkins ou Pierre Rahbi. Toutes ces personnalités témoignent dans le documentaire « L’urgence de ralentir », diffusé hier soir sur la chaine franco-allemande Arte. Ce film veut montrer que, face au système capitaliste actuel qui pousse l’Homme à toujours plus s’enrichir, toujours plus consommer, et aller toujours plus vite, des alternatives existent, mises sur pied par les citoyens, et ce dans tous les pays. « Un peu partout dans le monde, des femmes et des hommes ont décidé d’échapper aux diktats de l’urgence, sur une planète aux ressources limitées », explique le réalisateur au début du film.

 

De la monnaie locale, à Notre-Dame-Des-Landes

 

Et les exemples sont légions. De Bristol à la la Normandie, en passant par L’inde, Notre-Dame-Des-Landes, les Etats-Unis ou l’Italie. Monnaie locale à Romans-Sur-Isère pour « relocaliser l’économie », comme à Bristol au Royaume-Uni ; Coopératives de produits locaux à Ithaka, au nord de l’Etat de New-York aux Etats-Unis ; Naissance du mouvement des « villes en transition » à Totness au Royaume-Uni avec l’anglais Rob Hopkins ; Permaculture dans une ferme en Normandie…Toutes ces initiatives sont présentées de façon pédagogique dans le film. Sans oublier deux grandes luttes écologique et sociétales d’aujourd’hui, dont une qui résonne particulièrement fort dans notre région Bretagne : le combat contre l’aéroport Notre-Dame-Des-Landes, et celui contre la ligne TGV Lyon-Turin, mené par des italiens militants « No Tav ».

 

Si le film est particulièrement instructif, il n’en est pas pour autant « révolutionnaire ». Les initiés n’y apprendront pas grand chose de neuf. Mais il reste riche en témoignages, notamment de personnalités dans les domaines économiques, philosophiques, sociétaux, qui apportent un éclairage sur le cynisme et les dérives du système actuel, notamment concernant le fonctionnement du système boursier et la vitesse fulgurante de tous ces échanges économiques. Un documentaire que nous vous invitons donc à prendre le temps de visionner, car il reste disponible durant sept jours sur la plateforme Arte + 7 !

 

Film à voir sur Arte + 7

 

 

 




Un guide pour la consommation collaborative

Co-voiturage, troc, partage de bureaux, disco-soupes…Ces initiatives essaiment sur tout le territoire français, fortement aidé par le développement d’internet et son utilisation. C’est ce qu’explique Anne-Sophie Nouvel, dans « La vie share », son nouvel ouvrage, qui prolonge et complète « Vive la CoRévolution ! », sorti en 2012. Pour elle, l’origine de ces nombreuses initiatives réside dans « Un constat : les biens que nous possédons (logement, place de parking, jardin, voiture, objets divers et variés etc…) restent inutilisés. Pourquoi ne pas les prêter ou les louer quand on ne s’en sert pas ? N’est-il pas plus simple et économique d’emprunter à d’autres ce dont on a besoin pour un temps limité ? ». Combiné à l’expansion d’internet et de ses usages, ce phénomène donne naissance à, « non pas une mode passagère, mais une tendance de fond », selon l’auteure, qui choisit alors dans son livre de se pencher sur plusieurs solutions proposées au consommateur.

 
Crowdfunding ou Couchsurfing ?

 

Elle évoque ainsi les sites de petites annonces entre particuliers, d’annonces de location ou de colocation, d’habitat groupé, de troc, mais aussi de suivi de cours en ligne, de crowdfunding, couchsurfing, jardins partagés, circuits-courts alimentaires…Les exemples ne manquent pas. A chaque fois, l’auteur explique l’initative et indique des noms de sites internet s’y référant, afin de guide le consommateur. Elle indique aussi en fin d’ouvrage les différents aspects juridiques et fiscaux auquel le consommateur peut-être confronté : par exemple, faut-il déclarer auprès du fisc l’argent que l’on reçoit lors de covoiturage ? Et pour la location de logement entre particuliers ?

« La vie share » est un ouvrage intéressant, sous forme de « guide » ou de « mode d’emploi » clair et bien écrit. Cependant, il est avant tout destiné aux néophytes, les habitués du covoiturage, du crowfunding ou du troc n’y apprendront en effet pas grand chose de nouveau. Les adresses de site internet mentionnées dans le livre sont cependant intéressantes et certaines mérite vraiment un détour, comme par exemple «la machine du voisin », qui propose aux propriétaires de machines à laver de la louer pour quelques heures et de recevoir ainsi chez eux un particulier venant laver son linge !

 

La vie share, mode d’emploi, d’Anne-Sophie Novel, collection « Manifestô », éditions Alternatives, 173 pages, 12 euros.




Et si, dans notre vie quotidienne, on « sauvait la planète » ?

Adopter le vélo en ville, utiliser un lombricompost dans son appartement, supprimer la viande de son alimentation, participer à une disco-soupe…Toutes ces expériences, ces initiatives (et d’autres), Sophie Caillat, journaliste à Rue 89 et auteur d’un précédent ouvrage avec Pierre Rahbi, les a testées dans sa vie quotidienne. Elle en a fait un livre, qu’elle a baptisé « Comment j’ai sauvé la planète ». Son objectif : montrer qu’il est possible de faire des petits gestes au quotidien, de faire évoluer sa vie de tous les jours vers plus de « durable », sans se culpabiliser. « Au delà de mon travail de journaliste, j’ai voulu mettre en application tout ce que j’ai appris au cours de mes enquêtes, sachant que ce serait une autre paire de manche », lance-t-elle dans le livre, en introduction.

 

Un récit drôle et ironique

 

Sophie Caillat a donc choisi de décrire chaque expérience, chaque rencontre, et de les « noter » sur 9, et suivant un système précis, avec trois critères : « efficacité »,  « économies réalisées » et « plaisir ressenti ». Pas d’angélisme ici : les avantages et inconvénients de chaque expérience sont explicités, de façon souvent drôle, voir ironique. Oui, manger moins de viande, voire pas du tout, est bon pour la planète, mais il est difficile de se priver. Les couches jetables permettent de faire des économies, mais peuvent entrainer aussi des machines supplémentaires, et ce n’est pas toujours très ragoûtant à laver… Chasser le gaspillage électrique est intéressant financièrement et bon pour la planète, mais la sensibilisation des membres de son foyer peut être compliquée…Si la vie quotidienne de l’auteure s’en est trouvée « améliorée » comme elle le confie à la fin du livre, le chemin est encore long et n’est pas de tout repos.

Ecrit à la première personne, « Comment j’ai sauvé la planète » est clair, et comprend de nombreuses sources et références au fil des pages. Sophie Caillat nous emmène avec elle dans ses pérégrinations, dont elle ressort séduite ou plus dubitative. Le lecteur peut facilement s’identifier et essayer lui aussi d’appliquer ces « écogestes » dans sa vie quotidienne. Un livre agréable à lire, drôle, bien écrit, qui « déculpabilise », montre les côtés à la fois positifs et négatifs, et donne au final envie de tester aussi les disco soupes, le vélo pour aller au boulot, ou les cosmétiques maison !