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J’ai mal à notre Trégor, j’ai mal à notre Bretagne!

Les Sables d’Olonne, samedi 4 avril au Remblais, 1500 personnes défilent contre un projet de maternité porcine de 23 000 cochons par an en amont à Poiroux. La quasi-totalité des organisations politiques, syndicales, associatives y participent, Confédération Paysanne en tête. Le député-maire local UMP annonce la couleur : « Après avoir saturé et pollué la Bretagne, l’agriculture industrielle porcine cherche à tout prix à s’installer en Vendée, deuxième département touristique français. Nous ne nous laisserons pas faire (….) Comment l’Etat et Mme (Ségolène) Royal peuvent-ils laisser reproduire le dramatique exemple breton ».

Terrible constat, en Vendée comme partout en France, voilà l’image de la Bretagne, le cochon, le lisier, les algues vertes… On comprend mieux pourquoi, il en faut des Pig Parades pour la chasser des esprits, mais en Bretagne seulement, puisqu’ailleurs, ça ne marche plus depuis longtemps. En d’autres temps, sous d’autres cieux, on appellerait tout simplement cette opération de la propagande… ! ! Comment est-ce possible ? Qui mène cette mascarade cochonnière ? Bien sûr, les groupements d’éleveurs porcins hors-sols et toute la filière agroalimentaire. Ils ne font que leur sale boulot de pollueurs, en y rajoutant une bonne dose de cynisme. Mais rien de tout cela ne serait possible, sans tous les moyens et toute la logistique apportés par les élus des collectivités locales. Perros-Guirec d’abord, avec la mise à disposition gratuite des services municipaux. Surtout, alors que cette commune se débat avec ses emprunts toxiques, son maire et son conseil n’hésitent pas à trouver 8 000 euros pour financer cette opération dont on cherche vainement en quoi elle serait utile à la vocation touristique de la commune. Pas sûr que les touristes de Vendée ou d’ailleurs trouvent très attractifs la promotion du lisier et des marées vertes que lui rappelleront nécessairement cette Pig Parade…! !

Ensuite, ajoutons à cette longue liste de donateurs généreux, les milliers d’euros des villes qui la reçoivent : Quimper, Brest, Pontivy, Fougères, Rennes. Enfin, les Conseils Départementaux des Côtes d’Armor, du Morbihan, de l’IIle et Vilaine. Que d’élus en situation de gouvernance, de tous bords politiques, pour encourager la pollution et se moquer de notre santé avec l’argent de nos impôts ! Où sont ceux qui défendent à juste titre le Trégor contre les extractions de sable en Baie de Lannion ? Invisibles dès qu’il s’agit de la pollution de l’agriculture hors-sols. Il est visiblement plus facile et plus glorieux de se battre contre un Grand Satan qui vient de là-bas aux confins de la Bretagne que contre mille petits satans bien de chez nous qui empoisonnent notre environnement.! !

Devant tant d’irresponsabilité et de lâcheté, j’ai mal à notre Trégor, j’ai mal à notre Bretagne.

Pourquoi mériterions-nous cela ? Pour la défense d’une économie précaire qui ne fonctionne qu’à coups de casse et de subventions, qu’à coups de bas salaires et de conditions de travail déplorables ? Tout cela pour le profit de quelques banques, de coopératives, de dirigeants du syndicat agricole majoritaire ? ! !

Fort heureusement, dans la cité, aucun mal n’est incurable. Des citoyennes et des citoyens, des associations répondent à cette Pig Parade par une Pig Mascarade. Vendredi à Trestraou, une artiste a inauguré le début de toute une série de manifestations pour dénoncer cette mauvaise farce. Elle a dessiné sur la plage une fresque éphémère parsemée de ces queues de cochon coupées, symbole de cette industrialisation du vivant et de sa maltraitance, symbole d’un territoire souillé. Tous les artistes sont sollicités pour prendre le relai et opposer à ces cochons de béton des oeuvres qui disent la pollution dont nous sommes victimes. Pour que nous n’ayons plus honte d’être bretons, levons-nous de ville en ville pour dire tout haut avec la Pig Mascarade que nous ne voulons plus être les sacrifiés de l’agriculture industrielle porcine.! !

 

Yves-Marie Le Lay, président de Sauvegarde du Trégor membre de la Coordination Verte et Bleue.




Il s’est passé quelque chose…

Tout d’un coup, ils ont délaissé leurs maisons, leur confort, leurs écrans, leurs histoires personnelles. Là, dans la rue, ils ont regardé droit dans les yeux, l’image pourtant terrifiante de ces trois assassins qui tuent aussi facilement que dans les jeux vidéo. Ils ont dit à tous leurs commanditaires que plus personne ne leur imposera ce que leurs parents ont gagné pour eux. Les temps de la soumission à un ordre arbitraire et violent sont abolis. En battant le pavé, ils ont dit par leurs pieds qu’ils étaient la liberté d’expression, c’est à dire la liberté originelle, parce que c’est par elle que commencent toutes les autres. Ils ont dit que leur société était laïque, donc qu’elle faisait vivre ensemble toutes les religions et toutes les croyances. Ils ont dit que c’est ni le sexe, ni l’âge, ni la
couleur de la peau, ni la confession qui font le citoyen. Etre citoyen, c’est porter la République tout entière, avec cette volonté de vivre ensemble en s’enrichissant de la singularité de l’autre.

Elles et ils n’étaient pas seuls. A côté d’elles et eux, leurs voisins les plus proches les ont accompagnés pour porter le même message, les mêmes valeurs, la même détermination. Des citoyens africains, américains, asiatiques, à Paris et aux quatre coins de la planète, ont voulu aussi participer à cet événement. Jamais manifestation ne fut si européenne. Et de cette Europe enfin dépouillée de ses oripeaux de père Fouettard de l’austérité, s’est répandue aux quatre coins de la Terre cette leçon d’humanisme, tant dévoyé jusqu’à présent. Et, étaient là pour l’entendre en ce jour de janvier 2014, chefs d’Etat et de gouvernement de plusieurs dizaines de pays. Ne soyons pas dupes. Demain, combien d’entre eux sauront en tirer profit au bénéfice de leurs concitoyennes et concitoyens ? Qu’ils se méfient toutefois. Car, si dans l’histoire, les peuples n’ont pas toujours été sages, en ce 11 janvier 2014, ils ont su pourtant leur donner une grande leçon de sagesse qu’ils auront à coeur de leur rappeler, s’il le faut.




Breton et fier de l’être : samedi j’étais à Carhaix

Il leur aura suffi de casser quelques portiques d’éco-taxe pour redorer leur blason et trouver le coupable idéal. Comme les garnements dans la cour de récréation, pris la main dans le sac, ils disent alors : c’est pas nous, c’est les autres. Et les autres, ce sont toujours ceux qui sont loin : Paris, la République, l’Europe, la mondialisation, tout ce qui mettrait des freins à l’économie. Se dessine alors le cadre idéal : les autres sont les méchants responsables de tous nos malheurs. Faisons bloc entre nous Bretons contre eux. Et il faudrait croire à cette fable battue et rebattue qui a conduit à tant de tragédies ?

Je suis breton et fier de l’être, et me voilà invité par ceux qui ont apporté à la Bretagne la pollution de l’eau, les troubles musculo-squelettiques et maintenant la fermeture d’usines agroalimentaires, malgré des aides publiques massives. Me voilà invité à Quimper par tous ceux qui ont perdu la Bretagne depuis 40 ans et qui n’ont comme avenir à lui proposer que de continuer à la gérer comme avant pour la perdre demain encore et toujours ! Me voilà invité à Quimper par des décideurs publics et privés incompétents et cyniques qui cachent mal sous leur bonnet rouge les oreilles de leur bonnet d’âne !

Quant aux salariés de l’agroalimentaire, on est triste pour eux, tant leur désarroi les égare. Les voilà mariés, bras dessous bras dessous, avec ceux qui ont cassé leur corps pour trois francs six sous et qui leur promettent pour avenir de continuer à le faire pour encore moins cher ! Inutile de se voiler la face. Samedi à Quimper, ce n’était pas un bal de mariage, seulement et tristement le bal des cocus…

C’est parce que je suis breton et fier de l’être que je n’en peux plus de cette Bretagne qui souffre et surtout de tous ceux qui la font souffrir ! Je n’en plus de tous ces bateleurs d’une bretonitude rabâchée et racoleuse qui s’en servent pour mieux asservir les corps et les esprits ! Etre breton, c’est autre chose que d’être supporter d’un club de foot et d’applaudir les vedettes payées à prix d’or ! Etre breton, c’est respecter la dignité des femmes et des hommes. Etre breton, c’est respecter l’environnement dans lequel ils vivent et qui les fait vivre ! Etre Breton, c’est avoir l’humanité comme maison, et la Bretagne comme berceau.

C’est parce que je suis breton et fier de l’être que je veux que tous les enfants de cette terre aient un avenir différent de celui qu’ont connu beaucoup de leur parent. Et pour cela, qu’on ne me demande pas de faire confiance à ceux qui portent depuis 40 ans ce modèle économique et humain qui a tant failli en Bretagne. Il faut en changer et ce changement se fera sans eux.

C’est pour cela que j’étais à Carhaix. Samedi, c’est là que je me suis senti breton, avec toutes les organisations syndicales et politiques qui pensent un autre avenir pour notre région. Dans la capitale du Poher, loin de tous les démagogues nationalistes qui agitent le gwen a du et le bonnet rouge pour mieux masquer qu’ils sont les auteurs de la crise sociale, environnementale, économique et politique, loin des fossoyeurs de la Bretagne, il faisait bon être breton.